RDC : Une transition politique sans Joseph Kabila

La non-organisation des élections présidentielle et législatives en 2016 ne cesse de fragiliser les institutions étatiques et la cohésion nationale. Aujourd’hui, l’impossibilité pour la Commission électorale nationale indépendante (CENI) d’organiser les scrutins provinciaux, sénatoriaux, présidentiel et législatifs ne peut que déboucher sur une crise sociale et politique en mesure d’hypothéquer à jamais l’avenir de la République Démocratique du Congo et de déstabiliser longtemps la région des Grands Lacs, ainsi que l’Afrique centrale. En tout cas, l’échec du dialogue national politique inclusif initié par le président Joseph Kabila et les événements dramatiques en cours dans notre pays incitent à une transition politique sans Joseph Kabila.

Trois raisons expliquent la situation dans laquelle se trouve la République Démocratique du Congo et son incapacité à prendre en main son destin.

Primo, l’absence flagrante de vision commune de la part des leaders politiques congolais, et de l’élite, qui affaiblit l’autorité de l’État.

Secundo, tant que le problème des forces négatives agissant en toute impunité dans l’Est du pays ne sera pas réglé, les présidents Paul Kagamé et Yoweri Museveni trouveront toujours un prétexte relatif à un danger imaginaire qui pèserait sur le Rwanda et l’Ouganda à partir du territoire congolais. Raison pour laquelle, ces deux pays frontaliers n’ont jamais respecté les résolutions de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba du 24 février 2013 qu’ils avaient pourtant signés.

Tertio, les différents petits conflits ethniques à travers le territoire national finiront par être exploités, si on ne les règle pas en urgence, par des pays voisins dans l’espoir de parvenir, à leur profit, à l’éclatement de la République Démocratique du Congo.

Cet aspect ternaire a toujours été, aux dires des spécialistes de la problématique congolaise, au cœur de la gestion de notre pays qui, pendant très longtemps, s’est reposée sur trois piliers : le parti unique, l’armée et l’Église.

Or, aujourd’hui, l’armée s’est affaiblie et le parti unique a fait long feu. De ce fait, seule l’Église reste l’actrice majeure en mesure d’irriguer l’ensemble du corps social, de suppléer l’administration étatique et d’assumer convenablement le système éducatif. Il est donc illogique que, du point de vue républicain, les fonctions relevant normalement de l’État soient assumées par la seule Église.

De toute évidence, il se pose un sérieux problème, quant à la non-présence des institutions étatiques, comme le Trésor public et les forces sécuritaires, sur l’ensemble du territoire national. Voilà pourquoi la force onusienne, laquelle est en réalité victime de l’irresponsabilité de la classe dirigeante congolaise, est une partie de la solution et non le nœud de la complexité de l’inhumaine situation que connaissent les populations du Kivu.

Force est de constater que les conséquences de la guerre dans l’Est de la République Démocratique du Congo de 1996 à nos jours résident dans la destruction du lien social, ainsi que dans la haine incroyable entre les populations rwandophones et le reste de la population congolaise à majorité bantouphone. La cohésion nationale et sociale ne se consolidera que grâce à la réhabilitation de l’État congolais.

Pour cette raison, il faudra à tout prix penser autrement les services d’état-civil, faire un vrai recensement de la population et instaurer une carte d’identité fiable. Il faudra aussi encourager l’émergence d’une armée, d’une gendarmerie et d’une police nationales républicaines. En effet, seule l’affirmation d’un leadership conscient peut mettre un terme à la pratique de la violence comme mode de gouvernance.

En tant que Congolais enclins au vivre ensemble et au bonheur collectif, nous pensons qu’il y a urgence à juguler la crise politique sans cesse destructrice. Cela permettra de sortir définitivement la République Démocratique du Congo de l’impasse après tant d’années de troubles et d’anarchie, ainsi que d’inconscience sur fond d’insouciance.

Il va donc falloir consolider les institutions étatiques balbutiantes, en commençant par achever le long et difficile processus de normalisation, afin d’aboutir aux changements, à la vraie alternance politique et à l’État de droit tant souhaités par les populations congolaises.

Même si notre beau pays est une puissance économique incontournable aussi bien dans la sous-région qu’à l’échelle du continent, il apparaît néanmoins comme un colosse aux pieds d’argile. En effet, même dotée de potentialités énormes, la République Démocratique du Congo reste ce géant impuissant qui se cherche et qui, visiblement, peine à décoller.

Ainsi est-il indispensable de se pencher sur cette puissance très malade, dans l’optique de trouver des voies et moyens pouvant lui permettre de rayonner enfin à travers l’Afrique centrale et la région des Grands Lacs, tout en révélant sa véritable dimension continentale.

L’année 2016 aurait été, pour la République Démocratique du Congo, une occasion d’encrer solidement la démocratie dans les mœurs locales, de confirmer le processus de normalisation des institutions étatiques et de confirmer l’avènement de l’État de droit.

Malheureusement, le manque de volonté politique de la majorité présidentielle et l’amateurisme de l’opposition institutionnelle se sont avérés très consternants au regard des populations congolaises et décevants vis-à-vis des organismes étrangers qui ont accompagné notre pays en vue du triomphe de la démocratie et de la paix.

Il est donc temps que nous, Congolais, retroussions nos manches et œuvrions ensemble à la démocratisation de notre pays et à la consolidation de ses institutions. Le patriotisme doit nous contraindre à travailler, la main dans la main. Ainsi pourrons-nous faire taire nos divergences – d’appréciation et de perception –, dépasser le trop plein d’ego qui inhibe parfois le sens de responsabilité.

Au vu des arguments avancés ci-dessus, mue par le génie bantou, la Direction de l’Alliance de Base pour l’Action Commune (ABACO) propose quelques mesures qui, si elles sont exploitées à bon escient, élèveront la République Démocratique du Congo au rang des grandes Nations ayant su prendre leur destin en main et servir de modèle à la merveilleuse aventure humaine.

« Les problèmes sont donnés aux êtres humains pour qu’ils les transforment en quelque chose de bien », ne cessait de répéter l’écrivain argentin Jorge Luis Borges. Les Congolais doivent avoir à l’esprit, au-delà du « trop plein d’ego » de quelques acteurs politiques qui nous ont conduits dans l’impasse, que la République Démocratique du Congo a enfin rendez-vous avec l’Histoire.

Par conséquent, il est de notre devoir de préparer collectivement et patriotiquement l’avènement d’un Congo socialement apaisé, économiquement viable et politiquement démocratique.

Au-delà de l’appartenance philosophique et spirituelle, sociale et politique, nous devons nous fier à notre sens de responsabilité pour que la République Démocratique du Congo sorte non seulement agrandie, mais surtout stable et forte. Ainsi notre pays sera-t-il en mesure de s’administrer de manière cohérente et de pourvoir aux besoins essentiels de ses populations.

Nous sommes convaincus que cette feuille de route sortira notre pays de la crise sociale et politique qui n’a jamais cessé d’hypothéquer notre avenir commun.

Pour la Direction de l’Alliance de Base Pour l’Action Commune (ABACO),
Gaspard-Hubert B. LONSI KOKO
Premier Vice-Président.

Cliquez pour en savoir plus sur les propositions de l’ABACO: Résolution de la Crise en RDC

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