L’obsession des marocains du postérieur de la femme

TRIBUNE. Je partage avec vous cette interview réalisée avec une jeune journaliste talentueuse ayant eu l’idée de traiter ce phénomène marocain tabou. L’article a été rédigé et publié dans un prestigieux journal arabophone (numéro du weekend 23-24 novembre 2019).

Quelles sont les raisons de l’obsession marocaine pour le postérieur ? (L’attirance des hommes et la préoccupation des  femmes de l’avoir plus gros)

Je n’ai pas d’études ou de statistiques sérieuses et précises à propos de ce sujet, en revanche je vais me contenter d’analyser le phénomène uniquement d’un point de vue psychanalytique qui se traduit forcément  dans la culture.

1- Symboles fantasmatiques des fesses de la femme

Les fesses (féminines ou masculines), sont des parties qui rappellent la forme du sein de la femme. Or la relation avec le sein de la mère est le premier plaisir qu’un bébé découvre dans sa vie (le contact confortable et agréable, la douceur du goût et la température du lait, être cantonné dans les bras de la mère contre le sein, se sentir en sécurité, l’état de béatitude après satiété….).

A partir de l’adolescence et de façon inconsciente et fantasmatique, homme et femme sont attirés par tout ce qui peut rappeler le plaisir du sein par tous nos sens (la bouche, le toucher, le regard…). Même les constructeurs des voitures font appel à ce fantasme et dessinent des voitures avec un postérieur  surélevé et volumineux pour attirer la clientèle essentiellement masculine.

Maintenant, le mâle est attiré aussi bien par les gros seins que les grosses fesses. Evidemment plus les seins sont gros plus la femme est considérée très maternelle, nourricière et sécurisante. Les grosses fesses rappellent aussi inconsciemment les contours du sein maternel et plus elles sont grosses, plus la femme est nourricière du 1er plaisir (inconsciemment).

Consciemment, la femme sait que le postérieur est un objet de désir sexuel masculin, tout comme ses seins. C’est tout comme le maquillage que la femme utilisait depuis la nuit des temps, mettre du rouge sur les lèvres et sur les joues, pour les mettre en évidence au regard masculin. En fait, au moment du rapport sexuel, les lèvres de la femme sont gorgées de sang ainsi que ses joues. En se maquillant, inconsciemment elle éternise l’état du plaisir sexuel mais aussi pour rappeler l’homme qu’elle est en état de désir sexuel.

2- Le désir des fesses et l’interdiction religieuse

La religion interdit de poser un regard sexuel insistant sur le corps de la femme. Culturellement ce regard sexué est mal accepté jugeant l’homme sans foi et sans éducation. Raison pour laquelle, regarder le postérieur de la femme n’est pas détectable ni par elle ni par les autres, du moment que l’homme regarde devant lui. Ainsi, le désir sexuel du corps de la femme de ses cheveux à ses pieds de face, est projeté sur le postérieur de la femme.

Chez la femme, comme il est interdit ou très mal vu de mettre en apparence ses parties sexuées (mini jupe, porter un décolleté laissant apparaitre une partie des seins, porter des robes moulantes, légères et courtes…), elle ne peut  donc laisser de visible que les contours de ses fesses comme partie sexuée féminine (même en portant une djélaba ou autre robes traditionnelle) sans être accusée de quoi ce soit. D’ailleurs ceci explique pourquoi certaines marocaines qui portent le hijab font en sorte que leur postérieur soit bien dessiné et les contours bien visibles inconsciemment comme sciemment.

3- Symboles fantasmatiques de l’homosexualité masculine refoulée

Dans le monde masculin marocain et plus spécifiquement à partir du début de l’adolescence, les yeux se fixent sur le postérieur. Ainsi, celui qui en a un assez gros, est vulgairement insulté de « zamel» et ceci n’est autre qu’une attirance homosexuelle refoulée. On sait aussi que les adolescents de façon générale, filles et garçons, passent par des expériences homosexuelles appelées chez les garçons « nwiba » c’est-à-dire chacun à son tour fleurte le postérieur de l’autre ou le sodomise selon leur arrangement initial. Rapidement après quelques expériences l’homosexualité est refoulée et le désir de sodomiser est projeté sur le postérieur de la femme.

D’ailleurs, les hommes qui préfèrent sodomiser la femme et qui en éprouvent plus de plaisir que par le vagin, sont des homosexuels latents.

4- La virginité

Nous sommes dans une culture où la fille dot garder son ’hymen intact avant la nuit de noces. De ce fait, pour que la fille garde son éventuel futur mari, elle lui permet souvent de la sodomiser. Ainsi pour le mâle marocain le postérieur de la femme devient l’objet sexuel de préférence pour lui et tous ses désirs sexuels sont projetés sur le postérieur féminin.

Peut-on dire que la course pour élargir les fesses (femmes) et obtenir la femme avec un fessier serré (hommes) transforme ce désir en une obsession délirante ?

Non, mais il s’agit plutôt d’un jeu sexuel social et culturel dans lequel le plaisir est sublimé. Il ne faut jamais oublier que la sexualité, en dehors de sa fonction procréatrice,  est chez l’être humain une sorte de jeu de désir, de plaisir et d’attirance.

Des poètes arabes ont maîtrisé la description du postérieur de la femme en lui donnant une place centrale dans les rêves érotiques des arabes et un symbolisme sexuel de l’attirance érotique. Qu’en pensez-vous ?

J’ai déjà répondu plus haut en partie à cette question « l’interdiction religieuse de poser un regard sexuel sur la femme).

Par contre, je peux ajouter que le postérieur est la partie sexuée  de la femme visible à l’homme. Visible par son volume et par ses contours et de ce fait le désir sexuel masculin et ses fantasmes sexuels sont projetés sur cette partie de la femme. Il faut noter que la femme, en marchant et laissant derrière elles les regards des hommes, elle laisse échapper son postérieur, cette partie sexuée en mouvement ou ce qu’on appelle « la danse des fesses », une qui remonte et l’autre qui redescend et ainsi de suite. Ce mouvement de « monter et descendre » rappelle évidemment de façon inconsciente les mouvements du phallus lors d’un rapport sexuel. Ce mouvement des fesses lors de la marche de la femme est fantasmé chez l’homme comme une invitation sexuelle.

D’ailleurs la partie du corps maitrisée et mise en évidence dans la danse orientale, est le postérieur de la danseuse à un point où on a l’impression que c’est le postérieur qui danse indépendamment du reste du corps de la danseuse. Contrairement à la danse occidentale, le corps en entier est en mouvement sans aucune insistance sur une partie du corps en particulier.

Docteur Jaouad MABROUKI

Psychiatre, Expert en psychanalyse de la société marocaine et arabe.

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