Faire fabriquer le livre à moindre coût, lever les barrières douanières et mettre en place des diffuseurs, sont les maux détectés pour que le livre circule facilement en Afrique Centrale. Cette problématique a fait l’objet d’un plaidoyer lors de la 3è édition de la Rentrée littéraire du Congo. Dans l’interview accordée à PagesAfrik, l’organisateur de cette rencontre, Florent Sogni Zaou explique le bienfondé de cette initiative.
PagesAfrik : Vous venez de clôturer la troisième édition de la Rentrée Littéraire du Congo. Etes-vous satisfait de ces trois jours ?
Florent Sogni Zaou : Je pense que la réponse, c’est oui. Puisque nul ne peut donner naissance à un enfant et le haïr. Nous sommes satisfaits parce que nous avons atteint l’objectif. Nous avons fait fabriquer le Grand Prix littéraire Jean Malonga et nous l’avons décerné (Ndlr : à Henri Djombo pour avoir réédité le Cœur d’Aryenne en 2004). C’est le grand moment de cette Rentrée littéraire du Congo en sigle Relico.
P.A : Cette édition a été placée sous une inquiétude : La circulation du livre en Afrique Centrale. Pourquoi avoir évoqué cette situation ?
F.S.Z : L’objectif était de faire un plaidoyer et de dire à tout le monde la réalité. Nous n’avons pas l’obligation de faire de ça notre affaire. Notre objectif était de fouiner dans la terre et sortir cela aux yeux du monde pour dire qu’il y a réellement un problème dans la circulation du livre dans la sous région. Mais avant de parler de cette partie du continent, on parle d’abord de notre Congo dans un cadre purement géographique. Comment circule-t-il ici au Congo d’abord et en Afrique Centrale ensuite pour ne pas avoir à se comparer au reste du monde.
P.A : Nous sommes présentement dans la révolution du numérique. Est-ce qu’on peut encore parler de l’inquiétude à ce niveau quand nous avons l’internet ?
F.S.Z : Moi je veux bien que ces plateformes existent. Mais supposez qu’on soit tous dans la forêt de Nouabalé Ndoki, vous n’avez pas de réseau et moi j’ai le livre en papier, qui va lire ? C’est vous ou moi ? Donc vous comprenez que le livre support papier a encore de très beaux jours. Le livre numérique… lorsque vous êtes dans un avion, on annonce le décollage. Qu’est-ce qu’on vous dit ? Arrêtez vos appareils ; donc on ne peut plus lire. Mais moi, j’ai mon livre papier, je décolle avec, j’atterries avec.
P.A : Les deux seules femmes qui ont exposé lors de ces rencontres pensent que ce problème de circulation ne se pose pas seulement en Afrique Centrale mais également dans l’ensemble du continent. Elles ont également parlé de la langue dans laquelle il faut écrire…
F.S.Z : Ce sont des écrivaines qui ont donné leurs points de vue. Je n’ai pas le droit de les juger. Il y a réellement un problème, c’est-à-dire que si vous n’avez pas vous-même votre réseau de distribution, votre livre est mort dans votre chambre. C’est un problème entier pour lequel tout le monde se plaint. Il n’y a plus de librairies, de bibliothèques, de musées. Il faut qu’il y ait des diffuseurs. Au Congo, il n’y en a pas. Il faut penser à une structure de diffusion. Nous sommes ici tous pour réfléchir aux solutions. Donc si Monique Alfred et Haubain-Mongo ont donné un point de vue, je ne peux pas le commenter ou le détruire (…) Ce que nous recherchons, c’est la promotion du livre et de l’écrivain (…) Nous avons parlé, les pouvoirs publics ont entendu et dans l’avenir nous verrons comment ils vont agir.
P.A : En votre qualité d’organisateur principal de cette rencontre littéraire, quelles peuvent être vos propositions pour que la circulation du livre devienne effective ?
F.S.Z : Je dirai premièrement il faut que nous arrivions à faire fabriquer le livre à moindre coût ; deuxièmement, avoir des services de diffusions qui prennent les livre en charge et troisièmement, il faut que ceux qui reçoivent le livre dans les frontières c’est-à-dire, les services de douanes laissent circuler le livre. Je n’oublie pas les faiblesses des services postaux avec la perte des livres qui sont probablement soustraits par des agents véreux. Il s’agit là des goulots d’étranglement dont on parle. Lorsque nous arrivons à poser ce genre de choses, à laisser les choses se faire, nous avancerons. Mais je crois que tout le monde a parlé et nous allons regarder vers l’avenir pour voir ce que ça va donner.
Propos recueillis par Achille Privat