Cameroun. Issa Tchiroma Bakary : ni ange ni démon, mais un politicien

SANS DETOUR. Tel un renard, le politicien s’engouffre dans la moindre brèche, exploite la faille la plus subtile et s’insère dans la fissure la plus fine : c’est cela, la ruse politique. Rien à voir avec la perfidie ni la barbarie cynique de l’exécutif abject de Yaoundé.

L’engouement que vous observez autour du candidat Issa Tchiroma n’est pas un coup de foudre populaire. Ce n’est pas non plus une prestidigitation envoûtante qui aurait charmé le peuple camerounais. C’est l’expression d’un ras-le-bol collectif, d’une rupture radicale avec le régime de Yaoundé.

Dans la logique du « Tout sauf Biya », les Camerounais sont prêts à miser, à raison, sur le diable lui-même.

Mais pourquoi Issa Tchiroma, et pas un autre ? Pourquoi lui, alors qu’il était, il y a peu, ministre de Paul Biya, partie prenante de la coalition gouvernementale et véritable laudateur d’un exécutif corrompu et incompétent ?

La réponse est simple : il est aujourd’hui le seul candidat à tenir un discours tranchant de rupture. Le plus frontal, le plus incisif contre le régime de Paul Biya. Ses sorties médiatiques sont de plus en plus véhémentes. « Je défendrai ma victoire jusqu’à mon sang si les Camerounais m’accordent la faveur des urnes ». .

Dans le contexte actuel, cette phrase résonne plus fort qu’un programme politique, et Tchiroma l’a compris. Il a compris qu’un naufragé est capable de s’accrocher à la queue d’un serpent pour tenter de se sauver. Et cette allégorie colle parfaitement à la situation camerounaise, un prêtre l’a même paraphrasée : « Vaut mieux un diable que Paul Biya. »

Issa Tchiroma Bakary a également compris qu’après l’élimination brutale du professeur Maurice Kamto, le peuple du changement était en quête d’un opposant farouche, prêt au sacrifice suprême pour voir tomber le régime en place. Beaucoup considèrent d’ailleurs cette élection comme un prétexte, un casus belli, qui pourrait enclencher un mouvement de contestation populaire à la népalaise.

Tchiroma a ajusté son langage, affûté son discours et adapté ses positions pour répondre à cette aspiration.

Faut-il lui faire confiance ?

Non.

Pas plus qu’on ne doit faire confiance à la queue du serpent. Mais dans une telle situation, il représente le meilleur risque, la dernière chance ( même si elle n’est qu’apparente) . Comme le parieur de la dernière heure, il faut fermer les yeux et miser sa dernière pièce. Soit l’on gagne, soit l’on perd tout, même le dernier franc de la veuve.

Mais au moins, on aura essayé. Et ne dit-on pas : qui ne risque rien n’a rien ?

Moi, je voterai pour Issa Tchiroma Bakary.

Par Teddy Patou

Journaliste et animateur radio

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