Selon un nouveau rapport de l’organisation Africa No Filter, un tiers des articles sur l’Afrique publiés par les organes d’information du continent proviennent d’agences de presse étrangères.

Intitulé « How African Media Covers Africa » (Comment les médias africains couvrent l’Afrique), le rapport souligne le fait que les récits concernant l’Afrique continuent d’être présentés à travers le prisme des mêmes stéréotypes et points de vue négatifs et tenaces sur la pauvreté, la maladie, les conflits, la médiocrité de la gouvernance et la corruption.

Dans le cadre de l’enquête menée entre septembre et octobre 2020, 38 rédacteurs africains ont été interrogés et le contenu de 60 médias africains de 15 pays (Botswana, Afrique du Sud, Zambie, Zimbabwe, RDC, Égypte, Tunisie, Tanzanie, Éthiopie, Kenya, Rwanda, Ouganda, Ghana, Nigeria et Sénégal) a été analysé.

En outre, quatre groupes de discussion ont réuni 25 rédacteurs en chef de médias africains, d’agences panafricaines et des correspondants internationaux. Les résultats confirment les défis et expériences qui sont de notoriété publique dans le secteur : les recettes publicitaires et le nombre de salles de rédaction diminuent – ce qui a une incidence sur le type d’informations que les Africains lisent – et les actualités sont majoritairement négatives et liées à des conflits.

Les principales conclusions du rapport soulignent que les sources de collecte des informations sur les pays africains sont problématiques, que les contenus qui en résultent continuent à faire le lit de stéréotypes éculés, et que la qualité du journalisme local rend souvent impossible la production d’une narration nuancée et mise en contexte, essentielle lorsqu’il s’agit d’écrire des articles sur les 54 pays africains.

« Les médias ont une énorme influence sur l’établissement de la ligne éditoriale et sur le choix des articles consacrés à l’Afrique », déclare Moky Makura, directrice générale d’Africa No Filter. « L’enquête a montré clairement que, malgré des années d’indépendance, ce ne sont toujours pas les Africains qui tiennent la plume lorsqu’il s’agit d’écrire les histoires qui les concernent. Plus important encore, au travers des articles que nous partageons dans nos médias, nous continuons à colporter l’image d’une Afrique divisée, dépendante et manquant d’engagement. Il faut que nous reprenions la plume. »

Africa No Filter est une organisation à but non lucratif fondée il y a un an pour mettre fin aux récits stéréotypés et néfastes sur l’Afrique grâce à la recherche, au plaidoyer et à l’octroi de subventions. L’organisation est financée par la Fondation Ford, Bloomberg, la Fondation Andrew W. Mellon, Luminate, la Fondation Open Society, Comic Relief, la Fondation Hilton et le British Council.

Moky Makura a ajouté : « Paradoxalement, 50% des rédacteurs en chef interrogés estiment que leur couverture des pays africains autres que le leur ne contient pas de stéréotypes. Cela signifie clairement que nous devons faire de gros efforts pour nous auto-éduquer et changer le rôle que nous jouons dans la perpétuation de stéréotypes dépassés sur nous‑mêmes. Les récits ont une grande importance et leur influence va au-delà de la simple narration. Ils ont un impact sur l’investissement en Afrique, sur la jeunesse et les opportunités que les personnes perçoivent dans leurs pays, sur la migration, la créativité et l’innovation. »

À la suite de ce rapport, Africa No Filter a décidé de lancer la toute première agence de presse du continent qui se concentrera sur des récits ayant pour sujet la créativité, l’innovation, les arts, la culture et la dimension humaine, afin de combler cette lacune du secteur.

Par APO

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