La valse des sélectionneurs se poursuit à la tête de l’équipe de Tunisie, qui a usé pas moins de sept entraîneurs en cinq ans. Un record difficile à battre. Jugez-en plutôt par vous mêmes:
– Ruud Krol (Pays-Bas) : septembre 2013-avril 2014
– Georges Leekens (Belgique) : avril 2014-juillet 2015
– Henryk Kasperczak (Pologne) : juillet 2015-avril 2017
– Nabil Maâloul (Tunisie) : avril 2017-juillet 2018
– Faouzi Benzarti (Tunisie) : juillet-octobre 2018
– Maher Kanzari et Mourad Okbi : juillet 2017-Décembre 2017
– Alain Giresse (France) : depuis le 13 décembre 2018.
Résultat: les Aigles de Carthage ne savent vraiment plus sur quel pied danser !
Le dernier exemple de cette frénésie, le limogeage à la surprise générale le 20 octobre dernier de Faouzi Benzarti, « débauché » du club marocain le Wydad de Casablanca où il était pourtant fortement apprécié afin de prendre en charge la sélection de son pays, mais remercié trois mois plus tard alors qu’il a réussi durant ce court laps de temps à assurer la qualification de la Tunisie pour la phase finale de la Coupe d’Afrique des nations 2019 à la faveur de trois victoires consécutives.
Les motifs de cette séparation étaient restés obscurs, même si la fédération a invoqué des difficultés de communication avec les joueurs et un caractère nerveux. Une thèse rejetée par un technicien très populaire, jouissant d’un fort crédit parmi les sportifs du pays et qui a considéré sur le coup son remerciement comme « une véritable humiliation ».
Cette instabilité technique n’est pas pourtant propre au team national. En effet, les clubs n’échappent pas à ce remue-ménage permanent, ce qui a incité le pouvoir fédéral à décréter une mesure interdisant aux clubs d’engager plus de trois entraîneurs par saison. Mais les clubs ont régulièrement trouvé l’astuce pour contourner les règlements et s’astreindre à une folle instabilité sous forme de changements interminables de techniciens.
En tout cas, le Français Alain Giresse, 66 ans débarque à la tête du Onze tunisien où il est engagé du 1er janvier 2019 jusqu’au 30 juin 2020 selon un contrat renouvelable.
L’objectif assigné à l’ancien sélectionneur de la Géorgie, du Gabon, du Sénégal et du Mali à deux reprises n’est ni plus ni moins que le carré d’as de la prochaine édition de la CAN.
« Le public sportif tunisien est habitué de voir ses favoris rejoindre les quarts de finale à chaque nouvelle édition de la CAN, et il en est forcément lassé, observe le président de la Fédération tunisienne, Wadii El Jari, lors de la présentation officielle d’Alain Giresse à la presse, vendredi 14 décembre. Pour une fois, il aimerait voir les Aigles de Carthage en demi-finale. Ce sera d’ailleurs notre objectif, l’année prochaine. Une fois ce cap rejoint, alors là, tout peut arriver ».
« Au départ, en contactant Giresse, nous lui avions remis un disque-dur comprenant l’enregistrement de 31 matches disputés les deux dernières années, révèle le patron de la FTF. Bien entendu, l’ancien membre du carré magique de l’équipe de France aux côtés de Fernandez, Tigana et Platini n’a pas visionné toutes ces rencontres. Mais, sur ce qu’il a pu voir, il a été convaincu par la qualité du groupe qu’il aura sous la main. Le fait d’avoir exercé durant au moins une dizaine d’années sur le continent, et d’avoir par conséquent emmagasiné une solide expérience du foot africain, en plus de ses grandes qualités humaines et de sa discipline, et d’avoir travaillé au plus haut niveau de la compétition que ce soit à la tête du PSG ou des sélections nationales fait de lui l’homme adéquat répondant au profil recherché. A coup sûr, on ne pouvait trouver meilleur CV », insiste El Jari. Lequel a avoué qu’un technicien français correspond le mieux en termes de possibilités de communication (langue) et de connaissances des joueurs expatriés qui évoluent en France (huit joueurs au moins).
De son côté, Giresse a souligné qu’il a accepté volontiers le nouveau challenge sur un continent qu’il connaît fort bien « compte tenu des conditions de travail qu’offre la Tunisie aux commandes d’une belle sélection », selon ses termes.
« Sur le plan humain, j’ai toujours énormément apprécié le fait de travailler que ce soit au Nord ou au Sud du continent, a-t-il relevé. La Tunisie a d’ailleurs toujours fait partie des perspectives intéressantes pour moi ».
« Gigi » (son surnom du temps où il était joueur) a rejeté d’un revers de la main les lieux communs avancés sur le compte de la Tunisie et prétendant qu’elle opte le plus souvent pour des choix défensifs.
« Lors du dernier Mondial, la Tunisie a été supérieure à la Belgique ou au Panama au niveau de la possession de la balle, et on ne peut pas prétendre qu’elle ait joué de façon défensive, assure-t-il. Pourtant, elle a été lourdement battue par les Diables rouges. La France a été championne du monde sans jamais posséder un meilleur taux de possession du ballon que ses adversaires ».
L’objectif avoué de Giresse est simple. « Continuer à améliorer et faire progresser le groupe en termes de qualité de jeu, et derrière en termes de performances, a-t-il lancé au cours de son premier contact avec les médias locaux. Nous allons nous employer à bien préparer et disputer une CAN réussie », a-t-il dit.
En attendant sa première sortie, le 22 mars prochain dans le dernier match- sans enjeu- contre l’Eswatini (ex-Swaziland) à Radès, aux éliminatoires de la CAN Total 2019, Alain Giresse doit choisir son staff et décider s’il va garder les deux intérimaires, Mourad Okbi et Maher Kanzari qui ont perdu les deux rencontres de leur mandat: face à l’Egypte (3-2) le 16 novembre dernier pour le compte du groupe « J » des qualifications pour la CAN, et devant le Maroc (1-0) à Radès le 20 novembre en amical.
Par rapport aux objectifs qui lui ont sont fixés par ses nouveaux employeurs, la tâche du nouveau patron de l’équipe de Tunisie ne sera pas une sinécure.