CONGO. Pousser les enfants et les amateurs du conte à s’intéresser aux livres fondés sur le fantastique et le merveilleux, voilà une option que semblent oublier les écrivains congolais de la nouvelle génération.
Il y a quelques années, des écrivains tels Guy Menga et Caya Makhélé nous faisaient découvrir la littérature de jeunesse à travers le conte. Avec le premier, les enfants pouvaient se délecter avec Les aventures de Moni Mambou de Guy Menga aux éditions Clé tandis que le second nous offrait Une vie d’éléphant à l’edicef. Aujourd’hui, quelques auteurs de notre époque comme Liss Kihindou avec Mwanna la petite fille qui parlait aux animaux, éditions L’Harmattan et Bernard Nkounkou Bouesso avec La Prince, le Papillon, l’Abeille, éditions LC de Paris se révèlent comme héritiers de Guy Menga et de Caya Makhélé, pour nous replonger dans le conte.
Trois petites histoires constituent le petit ouvrage de Bernard Nkounkou Bouesso, trois textes assez brefs et succincts pour s’adapter à la perception des amateurs des livres qui aiment parfois que l’on leur raconte des histoires qui se fondent sur le fantastique et le merveilleux.
C’est le texte intitulé « L’Écureuil, la Corneille et l’Érable » qui ouvre la lecture de l’ouvrage de Bernard Nkounkou Bouesso. Rencontre de l’Écureuil avec une Corneille au niveau des branches de l’Érable. Se crée une ambiance amicale entre les trois protagonistes malgré la plainte de l’Érable qui se voit martyrisé par la neige de l’hiver. Malade, la Corneille sera soignée par son ami l’Écureuil qui va l’héberger chez lui avant qu’ils puissent prendre la route du Parc des Pins. Et l’auteur de résumer cette belle histoire, en affirmant que « depuis lors, l’Écureuil et la Corneille avaient tissé une fidèle amitié sur les branches de l’Érable sans se battre comme deux ennemis (…). La couleur des poils, des plumes et de la peau ne peut pas être un obstacle pour l’amitié et la compagnie dans le monde des vivants ».
Dans le deuxième conte, nous sommes en présence du Grillon qui vient de s’apercevoir qu’une partie de son champ de légumes a été dévastée au moment où il comptait en vendre deux sillons. Son amie La Luciole qui le surprend dans son désarroi, va l’aider à découvrir l’auteur de son malheur. Quelle surprise pour elle en apprenant que c’est son meilleur ami l’Escargot, celui-même qui était avec lui au mariage du Crapaud à l’île Tsoukoula, qui est à l’origine de son malheur. C’est La Luciole qui, avec ses larves, va mettre fin à l’existence de l’Escargot. Ce dernier ne pourra plus mettre en exécution son intention de détruire les champs de légumes restants du Grillon. Conclusion moralisante de l’auteur : « Chacun de nous dans la nature a son rôle et la nature sait les choses devant le désespoir d’une situation alarmante ».
Du conte éponyme de cet ouvrage, nous découvrons enfin un univers spatiotemporel dans lequel évoluent enfin l’humain (La Princesse et son prince) et deux insectes appelés couramment « Papillon » et « Abeille ». C’est l’histoire d’une princesse martyrisée par son prince après leur mariage quand ils rentrent d’un voyage de noces sous le soleil des Caraïbes. Aussi, le désespoir la pousse à aller se reposer dans un jardin public où va la surprendre Le Papillon. Aidée par celui-ci en complicité avec la « Fourmi docteur », l’Abeille, et le Saule pleureur, la Princesse va retrouver sa beauté et la joie de vivre. Et quand ses amis la ramènent au palais, notre prince ne croit à ses yeux : le spectacle dressé devant lui est éblouissant, à la grande satisfaction du Papillon et de l’Abeille, les deux amis de la Princesse. L’amour renaît alors entre les deux tourtereaux qui auront des triplés, au grand bonheur des enfants des Caraïbes qui l’avaient souhaité.
À la manière de Jean de la Fontaine au XVIIe siècle qui moralise l’homme à travers la société des animaux, Bernard Nkounkou Bouesso a réalisé trois contes pour inciter les hommes à prendre conscience des relations sociales et sociétales. Et comme les fables de la Fontaine, l’auteur a terminé ses trois textes par des leçons de morale implicites : tant qu’il ya la vie, il y a de l’espoir dans toute chose. La Princesse, Le Papillon, l’Abeille et autres contes un ouvrage écrit dans une langue soutenue, des contes dont la lecture respecte l’imaginaire des enfants ainsi que celui de leurs parents. Et comme le souligne les éditions LC, « ce recueil de contes pour adultes, de création nouvelle aux allures de fables, poétiques regorge de leçons de vie et de valeurs morales ».
Noël Kodia-Ramata
(1) Bernard Nkounkou Bouesso, La Princesse, Le Papillon, L’Abeille…, éditions LC, Paris, 2022