Arts plastiques Maroc. L’œuvre de Laila Iraki s’invite au World Trade Center d’Abou Dhabi

Suite au franc succès qu’elle a rencontré lors de la résidence artistique «Le mois de l’art des femmes» qui vient de prendre fin à Art Hub d’Abou Dhabi, la plasticienne Laïla Iraki expose actuellement ses œuvres récentes réalisées in situ, à la galerie du World Trade Center de la ville. En effet, ses œuvres ont été sélectionnées par les organisateurs pour faire partie de l’exposition qui se poursuit au même endroit.

Durant un mois, la plasticienne Laïla Iraki a représenté l’art contemporain marocain dans le cadre d’une résidence artistique organisée par Art Hub sur le thème «Le mois de l’art des femmes». Cette artiste-peintre a ébloui le public émirati par ses œuvres originales réalisées in situ aux côtés de des artistes Kristina Bartkute et Henrika Bartkute (Lituanie), Liza Bobkova (Russie) et Maria Grazia Collini (Italie). Aujourd’hui, ses œuvres ont été sélectionnées pour faire partie d’une exposition collective au World Trade Center d’Abou Dhabi. L’occasion d’apprécier la démarche expérimentale de cette figure éprise d’art et de liberté.

Médecin de formation, Laïla témoigne d’un parcours assez distinct. «L’art a toujours été une passion, j’ai toujours été un peu artiste. Depuis toujours, j’ai griffonné des esquisses, fréquenté les galeries, les musées. Par manque de temps, je n’ai pas pu me consacrer à cette activité. Après le départ volontaire, c’était une nécessité pour moi, il fallait que je m’y mette. J’ai pris des cours académiques avec des artistes chevronnés pendant un certain nombre d’années pour avoir les bases techniques de peinture, de gravure, de monotype, de sérigraphie et de sculpture», nous confie Laïla Iraki.

Elle a parcouru toutes les écoles universelles d’arts plastiques et a touché à tous les styles. Du figuratif à l’abstrait et nous propose aujourd’hui le fruit de cette quête à travers cette exposition de rare pureté. Cette artiste peint avec passion.

Il faut l’entendre parler de ses œuvres, de ses coups de cœur, de ses inspirations. Elle aime jouer avec la lumière sur tous les supports et tester l’«intestable»! Admirer ses œuvres, c’est comme se retrouver accoudé à une fenêtre face à une vue apaisante. Elle témoigne d’un parcours assez distinct. « Je suis le genre qui commence une toile spontanément. Je pense que la gestation se fait au cours de ma recherche où j’emmagasine le maximum d’informations. En général, au cours de l’exécution d’une œuvre, mon travail se transforme au gré de mon humeur…La première chose que je fais sur la toile c’est d’imaginer la composition. Une fois que c’est fait, le sujet et les personnages arrivent au fur et à mesure. Les matériaux et les couleurs viennent ensuite au gré de l’instant présent. La peinture pour moi est le moyen de m’évader de l’espace-temps et de l’environnement socio-culturel et politique qui pour moi est de plus en plus agressif aussi bien visuel que verbal. La toile me permet d’exprimer ma spiritualité et ma marocanité… Actuellement, on voit de plus en plus de femmes se mettre à l’art par besoin d’évasion et de liberté, en fait pour avoir leur propre jardin secret», confie-t-elle.

Personnalité riche et simple, Laïla Iraki est considérée comme une des artistes les plus sensibles à la beauté de l’univers. Merveilleusement dominée par les mains de l’artiste, sa dernière série de tableaux transperce tout amateur d’arts plastiques. L’apparente sobriété que notre peintre déploie dans la distribution des éléments rend ses œuvres très attractives. Celle-ci pourrait être comprise comme une rationalisation de l’espace.

Toutefois, la spontanéité et la liberté se dégagent de ses œuvres. Un vrai égal surtout quand il s’agit d’une artiste pour qui l’art a toujours été le moteur de ses actions. «Je crois que c’est un moyen de transmettre l’invisible. De rendre visible, l’invisible. Il y a pour moi deux médiums: la musique et la peinture. C’est-à-dire que ces deux médiums ne s’adressent pas directement aux sens, et encore moins à l’intellect. Ce sont les médiums de l’âme», poursuit-elle. Il faut dire que le travail de Laïla Iraki fait preuve d’exigence et d’honnêteté foncière, mais aussi d’instinct immédiat, de rêve, de poésie et de fantaisie. Et ces aspects s’harmonisent pour s’incarner littéralement dans la matière, le pigment, le trait et la lumière.

Pour elle, peindre est une nécessité. Il a choisi ce mode d’expression par sensation. Et surtout par conviction. Mais elle demeure malgré tout une artiste contemporaine. Et donc, elle ne peut se résoudre à se lover, elle aussi, dans un rassurant discours «peinture-peinture» prônant un sublime retrait.

Son œuvre est à la fois une peinture et une critique de celle-ci. Une critique de l’histoire de la peinture et du discours souvent entendu sur la peinture. Tantôt fasciné par les dessins et formes en transe, tantôt ébloui par le langage fascinant des couleurs et des symboles, Laïla Iraki révèle une palette diversifiée d’œuvres inspirées de fragments et de symbolisme, plus gestuelles et moins formelles. Et si l’art contemporain a pour désinvolture de se séparer, alors là, il faut bien admettre qu’apparemment ce temps est révolu.

L’art que Laïla nous donne à apprécier aujourd’hui n’a plus grand-chose à voir avec cet art contemporain – art de la séparation et du sublime détachement, du néo-plasticisme à l’expressionnisme abstrait – qui semble réjouir certains artistes peintres ou sculpteurs. En fait, il s’agit avant tout d’un soupçon vis-à-vis de l’art contemporain marocain prôné comme méthode de travail par cette artiste. Sa méthode d’approche du regardeur procède par induction de virtualités contenues dans l’œuvre qu’il ne reste plus qu’à nommer.

En chargeant un peu ses tableaux, on peut avancer qu’une telle pratique n’a de cesse de réaliser un programme idéologique, en même temps qu’esthétique, de réhabilitation des notions d’identification et de reconnaissance. Le tout dans un rendu visuel attrayant où la vie est toujours présente. De quoi ravir les amateurs de l’art contemporain marocain à Abu Dhabi. Les œuvres constituent une richesse qu’il convient d’apprécier avec douceur. Car, la valeur intrinsèque de chacune d’elles s’additionne aux autres et toutes s’enrichissent mutuellement. Toutes ces pièces font foi d’une leçon de peinture différente et belle. Une harmonie qui crée une façade et une nouvelle entité.

L.M

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