
Furtive, incisive et juste, la touche de l’artiste-peintre franco-marocaine Maria Kermadi nous introduit directement dans son univers pictographique où elle donne libre cours à sa sensibilité. Dans ses œuvres, tout suggère cette volonté de voyager au-delà du rythme quotidien, de la parole envolée pour accéder à la béatitude de l’être. C’est comme si l’artiste ne se suffit plus de platitude et cherche à brusquer par le volume, le tissage imposant qui rime avec l’excellence souvent gaie et béate du dire.
Sa passion : la peinture. Sa devise : la créativité et le sérieux. Et son terrain de jeu : la toile. Il s’agit d’une plasticienne dont la fertilité intellectuelle se reflète dans la production picturale. Cette expérience, Maria Kermadi l’a partagée un peu partout, au Maroc comme à l’étranger, à travers plusieurs expositions et rencontres d’art. Le tout dans un rendu visuel attrayant où la vie est toujours présente. De quoi ravir les amateurs de l’art contemporain marocain, évidemment. D’autant plus qu’il s’agit d’une artiste charismatique, une figure éprise d’art et de liberté. Et la fantaisie qui caractérise sa liberté d’expression demeure quasiment lyrique.
« Pour cette artiste franco-marocaine intarissable, la peinture fait partie de sa vie depuis son jeune âge. Cependant, il a fallu attendre l’obtention de son Master en Histoire de l’Art en 2008 à la Sorbonne pour qu’elle renonce à une carrière toute faite de comptable et se consacrer entièrement à sa passion. Dès ses premières créations, la place de ce que Kandinsky appelle une « vérité intérieur » s’impose à travers une palette chaude qui ne l’a jamais vraiment quittée. Chaque œuvre est une ode aux couleurs chatoyantes empruntées de sensations profondes qui s’abreuvent dans les territoires marocains qui l’ont vue naître. Depuis sa période académique, elle n’a cessé de restituer dans ses toiles ces empreintes dans lesquelles le soi et les choses du monde demeurent indissociables», indique à ce propos l’écrivain et poète Lahsen Bougdal.
Toutefois, l’œuvre de Maria révèle une audace picturale et une intensité stylistique originale. Cette plasticienne nous révèle une palette diversifiée d’œuvres inspirées de fragments et de symbolisme, plus gestuelles et moins formelles. Pictographies finement tracées, productions plus libres reposant sur l’emploi de signes, de symboles, de motifs géométriques riches en termes de plasticité et de picturalité. Un exemple illustre d’une synthèse d’expressions aussi proches que lointaines. Les tableaux de Maria Kermadi ont toujours été vus et acceptés dans cette démarche et cette alliance pluridisciplinaires. Son œuvre capte une réelle intuition qui se nourrit d’une créativité qu’elle maîtrise avec une aisance sans aucune complaisance. C’est la clé de lecture qui permet aux visiteurs de décoder ses tableaux.
Pour toutes ces raisons, elle est considérée aujourd’hui comme une artiste contemporaine de la nouvelle vague, ceux qui associent leur art au symbolisme gestuel. «Il y a dans le coup de pinceau de Maria Kermadi une urgence fiévreuse qui la transforme de l’intérieur tout en transfigurant le monde qui l’entoure et l’interpelle par ses violences, ses déchirures, ses amours et ses désillusions. La vision qu’elle déploie dans ses toiles se nourrit de ces questionnements et de cette connexion du corps à son environnement. C’est le cas par exemple de cette dernière toile où elle revient sur le corps de la femme, en l’occurrence le culte de la déesse primordiale. Un travail documenté et structuré où elle reprend cette allégorie consacrée dans les mythologies anciennes et dans les religions pour repenser poétiquement la question de la fertilité et de la fécondité à l’aune des préoccupations actuelles», poursuit Lahsen Bougdal. Pour lui, cette image des divinités qui précède les dieux masculins des religions abrahamiques convoquée dans l’espace pictural, n’est pas sans nous rappeler la volonté de l’artiste de revenir sur la place des femmes dans les sociétés d’aujourd’hui.
De ce fait, il faut dire que les peintures que nous propose Maria Kermadi sont animées par des fragments mystérieux innombrables inspirés de la perception visuelle esthétique. C’est dans cet esprit qu’elle puise naturellement dans la fascinante luminosité, la féerie des couleurs et son rythme de vie. Résultat : une peinture qui devient source de connaissance de soi, de spiritualité et de paix intérieure. Et une école de vie qui fait rêver. Il s’agit avant tout d’un art contemporain marocain prôné comme méthode de travail par cette artiste. Sa méthode d’approche du regardeur procède par induction de virtualités contenues dans l’œuvre qu’il ne reste plus qu’à nommer.
L.M