Maroc. La croissance économique poursuit son ralentissement au deuxième trimestre de 2024
L’économie marocaine continue de montrer des signes de ralentissement au deuxième trimestre de 2024, les récentes données publiées par le Haut-commissariat au plan (HCP) indiquant une décélération de la croissance pour le deuxième trimestre consécutif de l’année. En effet, « selon l’arrêté des comptes nationaux du deuxième trimestre de 2024, la croissance de l’économie nationale s’est située à 2,4% au lieu de 2,5% durant le même trimestre de 2023 », a indiqué l’institution publique dans sa note d’information sur la situation économique nationale au deuxième trimestre de 2024. La croissance économique a ainsi évolué à un rythme en deçà de celui constaté au trimestre précédent où elle avait atteint 2,5% au lieu de 3,9% durant le même trimestre de l’année précédente. « Tirée par la demande intérieure, cette croissance a été réalisée dans un contexte d’une inflation maîtrisée et d’un besoin de financement de l’économie nationale représentant 1,1% du PIB », a fait savoir le Haut-commissariat dans sa note qui fait également état de la hausse des activités non agricoles et de la baisse de celles du secteur agricole, respectivement de 3,2% et de 4,5%. Ainsi, la valeur ajoutée du secteur primaire en volume (corrigée des variations saisonnières) s’est contractée de 5% au deuxième trimestre de 2024, après avoir enregistré un accroissement de 1,2% le même trimestre de l’année précédente. Selon le document, cette variation « s’explique par la baisse de la valeur ajoutée de l’agriculture de 4,5% au lieu d’une hausse de 1,5% et de la baisse de celle de la pêche de 14,7% au lieu d’une baisse de 4,5% ». En ce qui concerne l’évolution de la valeur ajoutée du secteur secondaire, les données montrent une amélioration de 3,8% au lieu d’une baisse de 2,4 durant le deuxième trimestre de l’année précédente. Pour le HCP, cette évolution est le résultat de l’amélioration des valeurs ajoutées de l’industrie d’extraction de 23,6% au lieu d’une baisse de 9,6%, du bâtiment et travaux publics de 3,6% au lieu d’une baisse de 2,4%, des industries de transformation de 2,9% au lieu d’une baisse de 1,6% et de la baisse de celle de l’électricité et eau de 6,3% au lieu d’une hausse de 0,8%. Analysant cette fois-ci l’évolution de la valeur ajoutée du secteur tertiaire, l’institution a noté un ralentissement de son taux d’accroissement qui est passé de 5% la même période de l’année précédente à 3,1% au deuxième trimestre de 2024. D’après les explications de l’organisme, cet essoufflement est lié au ralentissement des activités de l’hébergement et restauration à 9,3% au lieu de 32,8%, du transport et de l’entreposage à 5,1% au lieu de 6,9%, de la recherche et développement et services rendus aux entreprises à 3,8% au lieu de 4,4%. Cette décélération a été également constatée au niveau des activités des services de l’éducation, de la santé et action sociale (2,7% au lieu de 4,8%), des services immobiliers (2% au lieu de 3,2%), des services financiers et assurances (0,9% au lieu de 3,1%) ainsi que de l’information et communication (0,5% au lieu de 4,2%). Il est important de noter la hausse des activités des services rendus par l’administration publique générale et sécurité sociale de 3,6% au lieu de 3,3% et du commerce et réparation de véhicules de 1,9% au lieu de 0,9%. En conséquence, l’institution estime que « la valeur ajoutée du secteur non agricole a connu une augmentation de 3,2% durant le deuxième trimestre de 2024 au lieu de 2,5% une année auparavant », comme indiqué plus haut. Compte tenu de l’accroissement des impôts sur les produits nets des subventions de 3%, le HCP en arrive à la conclusion que « le produit Intérieur brut a affiché un accroissement de 2,4% en volume, au lieu de 2,5% le deuxième trimestre de l’année précédente », estimant en outre que le PIB a connu une hausse de 3,6% aux prix courants, dégageant une hausse du niveau général des prix de 1,2% au lieu de 7,3% le deuxième trimestre de l’année précédente. Alain Bouithy
DEPF: Ralentissement de la croissance chinoise en 2022
La croissance économique a marqué un net ralentissement en Chine, a indiqué la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) dans sa note de conjoncture de janvier 2023. Selon la DEPF, relevant du ministère de l’Economie et des Finances, elle est passée de +8,1% en 2021 à +3% en 2022, l’une de ses plus faibles performances en quatre décennies, suite au maintien par le gouvernement de la politique « zéro COVID » durant près de trois ans, en instaurant des restrictions de déplacements et des confinements stricts à répétitions au niveau des grandes villes. La même source relève que les indicateurs de conjoncture « font état d’une poursuite du ralentissement de la production industrielle à +1,3% en décembre, en glissement annuel, contre +2,2% un mois auparavant alors que les ventes au détail se sont repliées de -1,8% contre -5,9% ». Pour le cinquième mois consécutif, l’indice PMI composite s’est de son côté maintenu en zone de contraction, en se situant à 48,3 points en décembre, poursuit la DEPF dans sa note de conjoncture. Quant au taux d’inflation, il ressort qu’il s’est établi à +1,8% en décembre, en glissement annuel, après +1,6% en novembre. Ainsi, ajoute la DEPF, « la banque centrale de Chine a décidé le 20 décembre de maintenir son taux directeur inchangé mais s’est engagée à mener une politique accommodante afin de soutenir l’économie, en injectant suffisamment de liquidités et en réduisant les coûts de financement pour les entreprises ». Martin Kam
Ralentissement attendu de la croissance du commerce mondial pendant les derniers mois de 2022
La croissance du commerce des marchandises devrait ralentir pendant les derniers mois de l’année en cours et au début de l’année prochaine, a annoncé l’Organisation mondiale du commerce (OMC). En effet, selon les prévisions de l’OMC, qui se base sur les enseignements tirés du dernier baromètre du commerce des marchandises de l’OMC publié le 28 novembre, « la croissance du commerce devrait ralentir pendant les derniers mois de 2022 et au début de 2023 », a-t-elle indiqué rappelant que l’économie mondiale continue de traverser de fortes turbulences. Des récentes statistiques publiées par l’OMC, il ressort que « le niveau actuel du baromètre – de 96,2 – est inférieur à la fois à la valeur de base de l’indice et au niveau de 100,0 enregistré précédemment, sous l’effet d’un fléchissement de la demande des marchandises échangées». Pour les experts de l’organisation internationale, la baisse du baromètre des marchandises est conforme aux prévisions commerciales de l’OMC du 5 octobre. Lesquelles prévisions prévoyaient une croissance du volume du commerce des marchandises de 3,5% au terme de 2022 et de 1% en 2023, rappelle-t-on dans un communiqué. Cette diminution serait due à plusieurs chocs connexes : la guerre en Ukraine, les prix élevés de l’énergie et la crise monétaire ainsi que le durcissement observé dans les grandes économies, entre autres. Pour rappel, le baromètre du commerce des marchandises est un indicateur composite avancé du commerce mondial qui fournit des informations en temps réel sur la trajectoire du commerce des marchandises par rapport aux tendances récentes. Comme l’explique l’organisation sur son site Internet officiel, « les valeurs supérieures à 100 signalent une expansion supérieure à la tendance, tandis que les valeurs inférieures à 100 indiquent une croissance inférieure à la tendance ». Après analyse des dernières variations, force est donc de constater que « l’indice du baromètre est tombé en dessous de l’indice du volume du commerce des marchandises, qui montre l’évolution réelle du commerce au cours du deuxième trimestre », a fait remarquer l’OMC. L’organisation, qui s’occupe des règles régissant le commerce international entre les pays, est en outre persuadée que ce dernier devrait à terme suivre l’indice du baromètre à la baisse une fois que les statistiques commerciales trimestrielles du second semestre 2022 seront disponibles. Par ailleurs, explique-t-elle, la divergence récente entre les indices, comme on l’a vu en 2021 et 2022, pourrait s’expliquer par des expéditions retardées de marchandises résultant de perturbations de la chaîne d’approvisionnement depuis la pandémie. On retiendra toutefois que le commerce de marchandises a enregistré une hausse de 4,7% en glissement annuel au deuxième trimestre après une croissance de 4,8 % au premier trimestre. Pour que la prévision se réalise, l’Organisation mondiale du commerce estime que « la croissance du commerce devrait s’établir en moyenne autour de 2,4% en glissement annuel au second semestre 2022 ». Autres enseignements : l’indice du baromètre a été pesé par des lectures négatives dans les sous-indices représentant les commandes à l’exportation (91,7), le fret aérien (93,3) et les composants électroniques (91,0). Pris ensemble, « ces éléments suggèrent un refroidissement de la confiance des entreprises et une demande mondiale d’importation plus faible », a commenté l’OMC. Si les statistiques montrent que les indices du transport par conteneurs (99,3) et des matières premières (97,6) n’ont de leur côté terminé que légèrement en dessous de la tendance, l’organisation constate toutefois qu’ils «ont perdu de leur élan ». Soulignons enfin que la principale exception a été observée du côté de l’indice des produits automobiles (103,8). Selon les données recueillies, il a dépassé la tendance en raison de l’augmentation des ventes de véhicules aux Etats-Unis et de l’augmentation des exportations du Japon alors que les conditions d’approvisionnement s’amélioraient et que le yen continuait de se déprécier, a expliqué l’OMC. Alain Bouithy
Ralentissement de la croissance en Afrique subsaharienne dans un contexte de choc économique renouvelé
Alors que les économies d’Afrique subsaharienne peinent à se relever de la récession de 2020 induite par la pandémie de coronavirus (COVID-19), la région est maintenant confrontée à de nouveaux défis économiques, exacerbés par l’invasion russe de l’Ukraine. La dernière édition du rapport Africa’s Pulse de la Banque mondiale, une analyse semestrielle des perspectives macroéconomiques à court terme de la région, prévoit une croissance de 3,6 % pour 2022, en baisse par rapport aux 4 % enregistrés en 2021. Ce ralentissement s’inscrit dans un contexte régional marqué par la persistance de nouveaux variants de la maladie à coronavirus (COVID-19), l’inflation globale, la perturbation des chaînes d’approvisionnement et les chocs climatiques. La montée des cours mondiaux des matières premières, qui s’est accélérée depuis le début du conflit entre la Russie et l’Ukraine, vient s’ajouter aux autres défis économiques de la région. Principaux exportateurs mondiaux de denrées alimentaires, la Russie – qui est aussi le plus grand exportateur d’engrais au monde – et l’Ukraine, représentent une part importante des importations de blé, de maïs et d’huile de graines, et celles-ci pourraient s’interrompre en cas de poursuite du conflit. Alors que les économies d’Afrique subsaharienne risquent fort d’être touchées elles-aussi par le durcissement de la conjoncture mondiale et une réduction des flux financiers étrangers vers la région, l’analyse relève que la hausse des prix du carburant et des denrées alimentaires se traduira par une inflation à la hausse dans les pays africains. Les personnes pauvres et les populations vulnérables seront les plus touchées, en particulier dans les zones urbaines. Dans le contexte actuel d’instabilité politique accrue, on peut craindre que davantage de troubles civils n’éclatent du fait de l’inflation entraînée par les prix de l’énergie et de l’alimentation. « Alors que les pays africains se trouvent confrontés à une incertitude persistante, à la perturbation de l’approvisionnement et la flambée des prix des engrais et des produits alimentaires, les politiques commerciales peuvent changer la donne en garantissant la libre circulation des denrées alimentaires à travers la région », souligne Albert Zeufack, économiste en chef de la Banque mondiale pour l’Afrique. « Avec des marges budgétaires limitées, les décideurs doivent se tourner vers des options innovantes comme la baisse ou la suppression temporaire des droits à l’importation sur les denrées alimentaires de base, pour venir en aide à leurs concitoyens », L’étude note que la reprise demeure inégale, incomplète et à géométrie variable à travers la région. S’agissant de l’Angola, le Nigéria et l’Afrique du Sud, les trois principales économies régionales – l’Afrique du Sud devrait voir son niveau de croissance reculer de 2,8 points de pourcentage en 2022, ralenti par des contraintes structurelles persistantes. L’Angola et le Nigéria devraient quant à eux poursuivre sur leur trajectoire de croissance de 2022, en progrès de respectivement 2,7 % et 0,2 %, grâce notamment aux prix élevés du pétrole ainsi qu’à une bonne performance du secteur non-pétrolier. Les pays riches en ressources, en particulier dans le secteur extractif, enregistreront une meilleure performance économique du fait de la guerre en Ukraine, tandis que les pays ne disposant pas de ressources naturelles abondantes connaîtront un ralentissement de leur activité économique. Si l’on exclut l’Angola, le Nigéria et l’Afrique du Sud, la croissance régionale est projetée à 4,1 % pour 2022, et 4,9 % en 2023. L’Afrique de l’Est et australe affiche une reprise soutenue après la récession, avec 4,1 % en 2021, mais elle devrait baisser à 3,1 % en 2022 et se situer aux alentours de 3,8 % en 2024. À court et moyen terme, la République démocratique du Congo et la Zambie devraient bénéficier de la montée du prix des métaux et profiter de la transition vers les combustibles non fossiles sur le long terme. Le Rwanda et les Seychelles devraient connaître la plus forte contraction en 2022, avec une baisse de respectivement 4,1 % et 3,3 %. En Afrique de l’Ouest et centrale, on s’attend à une croissance de 4,2 % en 2022, et de 4,6 % pour 2023. Si l’on excepte le Nigéria, la sous-région devrait croître de 4,8 % en 2022, et de 5,6 % en 2023. L’évolution de la croissance pour le Cameroun, dont l’économie est relativement diversifiée, affiche de solides performances dans la durée, pour atteindre 4,4 % en 2024. Au Ghana, l’économie devrait connaître une croissance accélérée en 2022, pour atteindre 5,5 % avant de ralentir progressivement à 5 % en 2024, toujours en retrait par rapport aux 7 % de croissance d’avant la pandémie. Le rapport souligne également l’importance du développement des programmes de protection sociale au-delà des filets de protection sociale, pour renforcer la résilience économique et la capacité de faire face aux chocs, en particulier pour les ménages pauvres et vulnérables. Parmi les recommandations, on notera l’importance de développer les programmes d’assurance sociale, d’épargne et d’emplois, qui contribuent à la résilience économique en protégeant les employés urbains du secteur informel et en aidant les populations à investir dans leur santé et leur éducation.
Ralentissement de la croissance mondiale au quatrième trimestre 2019
Dans son dernier point de conjoncture, rendu public récemment, le Haut-commissariat au plan (HCP) a relevé que la croissance mondiale aurait poursuivi son ralentissement au quatrième trimestre de 2019. A en croire l’institution publique, le climat conjoncturel dans les pays avancés serait resté relativement atone au quatrième trimestre de 2019 en dépit de l’assouplissement des politiques monétaires aussi bien de la Réserve fédérale américaine (FED) que de la Banque centrale européenne (BCE). Commentant l’évolution de l’économie dans la zone euro, le Haut-commissariat a déclaré que l’activité se serait essoufflée dans cette région, affichant une progression de 0,8%, au lieu de +1,6% au début de l’année précédente. Evoquant le cas de l’Allemagne, le HCP a noté une stagnation de la croissance en raison de la baisse de l’investissement en équipement des entreprises. Et ce malgré une légère reprise des exportations.Concernant l’Italie, il ressort des analyses de l’institution que sa croissance aurait pâti de la faiblesse de la consommation privée et de la morosité de l’investissement. S’agissant de la France et de l’Espagne, il apparaît que « l’activité aurait fait preuve d’une plus grande résilience, soutenue par le bon comportement de la demande intérieure et des exportations », a estimé le Haut-commissariat.Quant à la croissance américaine, elle «aurait ralenti à +2%, sous l’effet de la décélération de la consommation des ménages -les relances fiscales de 2018 s’étant progressivement estompées- et de la contribution négative du commerce extérieur », a fait savoir le HCP. Dans son analyse, le HCP s’est aussi intéressé à l’évolution de l’activité économique dans les pays émergents qui, a-t-il fait remarquer, aurait, également, ralenti au quatrième trimestre de 2019. S’agissant de l’Asie, des chiffres à portée du HCP, il ressort qu’« en Chine, la décélération de la production industrielle et l’essoufflement de la demande intérieure et extérieure auraient pesé sur l’activité, dont la croissance aurait atteint +5,6%, au lieu de +6% un trimestre auparavant ». En parallèle, la décélération de la demande intérieure et de la production aurait affecté la croissance d’un autre pays de la région : l’Inde qui aurait vu celle-ci ralentir à +2,1%, au lieu de +3,2% un trimestre plus tôt.Dans sa description de la santé de l’économie mondiale, le Haut-commissariat a relevé quelques notes encourageantes du côté des économies russe et brésilienne qui « auraient légèrement repris, portées par la hausse de la demande intérieure et le recul de l’inflation ». Mais c’est surtout en Turquie où les signaux favorables de reprise ont été observés au troisième trimestre de 2019. En effet, « l’amélioration du climat des affaires et la baisse de l’inflation auraient permis un assouplissement de la politique monétaire et dynamisé la demande intérieure », a souligné le HCP relevant au final que la croissance aurait atteint +2% au quatrième trimestre. Analysant l’évolution du marché des matières premières énergétiques, le Haut-commissariat pense que « le cours du Brent se serait établi, en moyenne, à 63$/baril au quatrième trimestre de 2019, en baisse de 7% en variation annuelle ». L’institution a toutefois relevé qu’« un retournement à la hausse aurait été constaté lors des deux dernières semaines de décembre où les cours auraient avoisiné les 68$ le baril», après l’annonce d’une baisse des stocks américains de pétrole et d’une trêve commerciale entre les Etats-Unis et la Chine. Quant aux cours des céréales et du sucre, les analystes du HCP estiment qu’ils « se seraient renchéris au quatrième trimestre de 2019, avec des augmentations respectives de près de 4% pour le blé tendre et le maïs et de 7% pour le sucre », souligne-t-on dans le document du HCP. Cependant, le Haut-commissariat pense que « l’inflation dans les pays avancés serait restée contenue, se situant à +1,6% aux Etats-Unis et +0,8% en zone euro au quatrième trimestre de 2019, au lieu de +2,2% et +1,9%, respectivement, un an auparavant ». Pour rappel, le point de conjoncture établi par le Haut-commissariat au plan fait état de la situation des principaux indicateurs économiques observés pour le troisième trimestre au Maroc. Il relate aussi les estimations pour le quatrième trimestre de 2019 ainsi que les prévisions pour le premier trimestre de 2020. Alain Bouithy
Economie mondiale : ralentissement synchronisé et perspectives précaires
TRIBUNE. L’économie mondiale connaît un ralentissement synchronisé et nous avons, une fois encore, revu à la baisse les perspectives de croissance pour 2019, à 3 %, soit son rythme le plus lent depuis la crise financière mondiale. La croissance continue d’être affaiblie par l’augmentation des obstacles au commerce et la montée des tensions géopolitiques. Selon nos estimations, les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine réduiront cumulativement le niveau du PIB mondial de 0,8 % d’ici à 2020. La croissance est également freinée par des facteurs propres à certains pays émergents et par des forces structurelles, comme la faible croissance de la productivité et le vieillissement de la population dans les pays avancés. Dans l’édition d’octobre des Perspectives de l’économie mondiale, nous prévoyons une modeste amélioration de la croissance mondiale à 3,4 % en 2020, ce qui constitue une nouvelle révision à la baisse de 0,2 % par rapport à nos projections d’avril. Toutefois, contrairement au ralentissement synchronisé, cette reprise n’est pas généralisée et est précaire. La faiblesse de la croissance est due à une forte détérioration de l’activité manufacturière et du commerce mondial : une hausse des droits de douane et une incertitude prolongée en matière de politique commerciale nuisent aux investissements et à la demande de biens d’équipement. En outre, l’industrie automobile connaît également une contraction en raison de divers chocs, tels que les perturbations dues aux nouvelles normes d’émission appliquées dans la zone euro et en Chine, dont les effets sont durables. Dans l’ensemble, la croissance du volume des échanges commerciaux au premier semestre de 2019 est tombée à 1 %, soit le plus faible niveau enregistré depuis 2012. Contrairement à l’industrie manufacturière et au commerce qui affichent une faiblesse extrême, le secteur des services continue de résister dans la majeure partie du monde, ce qui a permis aux marchés du travail de conserver leur dynamisme et à la croissance des salaires ainsi qu’aux dépenses de consommation de rester saines dans les pays avancés. Des premiers signes de fléchissement se font toutefois sentir dans ce secteur aux États-Unis et dans la zone euro. La politique monétaire a largement contribué à la relance de la croissance. En l’absence de tensions inflationnistes et face à un affaiblissement de l’activité, les grandes banques centrales ont assoupli à juste titre leur politique monétaire afin de réduire les risques de dégradation de la croissance et de prévenir un désancrage des anticipations inflationnistes. Nous estimons que, sans cette relance monétaire, la croissance mondiale serait inférieure de 0,5 point de pourcentage en 2019 et en 2020. Les économies des pays avancés continuent de ralentir et se rapprochent ainsi de leur potentiel à long terme. La croissance a été ramenée à 1,7 % en 2019 (contre 2,3 % en 2018) et devrait se maintenir à ce niveau en 2020. Les solides conditions du marché du travail et les mesures de relance contribuent à compenser les effets néfastes du fléchissement de la demande extérieure pour ces pays. La croissance des pays émergents et des pays en développement a également été révisée à la baisse, à 3,9 % pour 2019 (contre 4,5 % en 2018), en raison notamment des incertitudes liées aux politiques commerciales et nationales, et du fait du ralentissement structurel en Chine. L’accélération de la croissance mondiale en 2020 est tirée par les pays émergents et les pays en développement, qui devraient connaître un rebond de la croissance à 4,6 %. Ce rebond s’explique pour moitié par une reprise ou une récession moins forte dans des pays émergents en difficulté, comme l’Argentine, l’Iran et la Turquie, et pour le reste par une reprise dans des pays où la croissance a considérablement ralenti en 2019 par rapport à 2018, comme l’Arabie saoudite, le Brésil, l’Inde, le Mexique et la Russie. Toutefois, une grande incertitude entoure ces reprises, notamment parce que de grands pays comme la Chine, les États-Unis et le Japon devraient connaître un ralentissement plus marqué en 2020. Escalade des risques Plusieurs risques de dégradation pèsent en outre sur la croissance. La montée des tensions commerciales et géopolitiques, y compris les risques liés au Brexit, pourrait perturber davantage l’activité économique et faire dérailler une reprise déjà fragile dans les pays émergents et dans la zone euro. Cela pourrait entraîner une brusque évolution de la propension au risque, des perturbations financières et un retournement des flux de capitaux à destination des pays émergents. Dans les pays avancés, la faiblesse de l’inflation pourrait persister et restreindre davantage la marge de manœuvre monétaire, ce qui en limiterait l’efficacité. Politiques de relance de la croissance Pour redynamiser la croissance, les dirigeants doivent lever les obstacles au commerce au moyen d’accords durables, apaiser les tensions géopolitiques et réduire l’incertitude qui entoure les politiques intérieures. Ils contribueraient ainsi à renforcer le climat de confiance et à relancer l’investissement, l’industrie manufacturière et le commerce. À cet égard, nous attendons avec intérêt des précisions sur l’accord de principe conclu récemment entre la Chine et les États-Unis. Nous considérons comme bienvenue toute initiative visant à désamorcer les tensions et à revenir sur les récentes mesures prises sur le plan commercial, en particulier si elles peuvent ouvrir la voie à un accord global et durable. Pour écarter d’autres risques pesant sur la croissance et accroître la production potentielle, la politique économique devrait stimuler l’activité d’une manière plus équilibrée. La politique monétaire ne saurait suffire. Elle devrait s’accompagner d’un appui budgétaire lorsque l’espace le permet et si la politique n’est pas déjà trop expansionniste. Des pays comme l’Allemagne ou les Pays-Bas devraient profiter de faibles taux d’emprunt pour investir dans le capital social et les infrastructures, même dans une simple perspective coûts-avantages. Si la croissance devait se détériorer davantage, il pourrait être nécessaire d’élaborer une riposte budgétaire coordonnée à l’échelle internationale, et adaptée à la situation de chaque pays. Bien que l’assouplissement monétaire ait favorisé la croissance, il est essentiel de mettre en place dès à présent une réglementation macroprudentielle efficace pour prévenir une mauvaise évaluation des risques et l’accumulation excessive de facteurs de vulnérabilité financière. Pour assurer une croissance
Le ralentissement des économies européennes pourrait impacter le Maroc
En dépit d’une évolution conjoncturelle contrastée, la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) a fait état dans sa note de conjoncture du mois de juillet (N°269) de perspectives globalement positives à fin mai pour le Maroc. S’appuyant sur l’analyse des principaux indicateurs économiques, ce département relevant du ministère de l’Economie et des Finances a affirmé que «les voyants des différents secteurs économiques, appréciés sur la base de l’évolution cumulée au titre des cinq premiers mois de l’année, demeurent dans le vert». Prudente, la même DEPF a prévenu que «les perspectives de l’économie nationale risquent d’être impactées par le ralentissement de l’économie mondiale, particulièrement dans la zone euro». A ce propos, soulignons que l’économie européenne a connu un ralentissement de la croissance au cours du deuxième trimestre 2019, selon une estimation préliminaire de l’Office statistique de l’Union européenne (Eurostat). En effet, d’après les chiffres publiés par cette institution, le produit intérieur brut (PIB) corrigé des variations saisonnières a augmenté de 0,2% tant dans la zone euro (ZE19) que dans l’UE28 au deuxième trimestre contre 0,4% dans la zone euro et 0,5% dans l’UE28 au premier trimestre 2019. «En comparaison avec le même trimestre de l’année précédente, le PIB corrigé des variations saisonnières a enregistré une hausse de 1,1% dans la zone euro et de 1,3% dans l’UE28 au deuxième trimestre 2019», a relevé Eurostat rappelant qu’au trimestre précédent le PIB avait augmenté de 1,2% dans la zone euro et de 1,6% dans l’UE28. S’agissant toujours de cette région, le Haut-commissariat au plan (HCP) avait, en début de mois de juillet, attiré l’attention sur le fait que l’activité économique dans la zone euro «serait impactée par le tassement de la demande extérieure et le fléchissement de la croissance des échanges intra-zone ainsi que par la forte incertitude liée au Brexit». Alors qu’elle présentait la situation économique nationale en 2019 et ses perspectives en 2020, cette institution publique avait conclu que «dans ce contexte, et malgré la poursuite des mesures de soutien budgétaire, la croissance de la zone euro devrait rester modeste, s’établissant à 1,2% en 2019 et à 1,4% en 2020, après 1,8% en 2018». Commentant les perspectives de l’économie mondiale jugées peu porteuses, le haut-commissaire au plan, Ahmed Lahlimi Alami, avait prévenu, à cette même occasion, que celles-ci «devraient impacter les échanges commerciaux avec les principaux partenaires de l’économie nationale, notamment les pays de l’Union européenne». Selon lui, «la croissance de la demande adressée au Maroc devrait se limiter à 3,5% en moyenne en 2019 et 2020 au lieu de 3,3% en 2018 et 5,5% en 2017». Il est évident que l’évolution modérée de l’économie européenne ne devait pas faire l’affaire du Maroc dont les liens commerciaux avec l’Europe demeurent très importants. Mais il y a plus grave encore : les nombreuses incertitudes qui entourent les perspectives économiques mondiales. Lesquelles incertitudes sont liées, notamment, «aux tensions commerciales sinoaméricaines, aux perturbations du secteur automobile en Allemagne, au Brexit, aux cours du pétrole et aux conflits géopolitiques», avait rappelé la DEPF dans sa note. Alain Bouithy