TRIBUNE. Tout le monde le reconnaît, la Justice congolaise fonctionne à deux vitesses : un acharnement sur les opposants souvent accusés d’atteinte à la sûreté de l’Etat et détentions illégale d’armes de guerre et une complaisance et une impunité criarde face aux responsables de ce que l’on a choisi d’appeler antivaleurs : corruption,enrichissement illicite,biens mal acquis, détournements de deniers publics, fraude, concussion et autres.
Dans ce cadre, le bilan est préoccupant avec la belle illustration de la condamnation dans des conditions extrêmement difficiles de Jean Marie Michel Mokoko, André Okombi Salissa et bien d’autres. Sans oublier les nombreux décès dont celui de Roland Gambou et tout récemment celui d’Augustin Kalla-kalla.
Beaucoup de congolais ont cru, au regard des faits vécus, à la libération de tous les prisonniers politiques, à la suite de l’Accord de Kinkala qui a permis la prise des mesures d’élargissement à l’endroit des personnes que les gouvernants avaient qualifié de terroristes. Jusque là l’incompréhension subsiste.
S’agissant des crimes et scandales économiques, on a plutôt fait le choix de la complaisance et de l’impunité à la fois criarde et intolérable. En la matière, la structure de Lamyr Nguele a démarré un travail louable qui a été arrêté net sous le prétexte fallacieux de la recherche d’une plus grande efficacité. La réalité est que ce travail avait commencé par agacer et inquiéter les gouvernants.
Il est difficile de comprendre le mutisme de la justice devant certaines situations déjà mises à nu comme:
-la révélation faite par un député sur le déblocage de l’argent pour une route imaginaire de 135 kilomètres,
-la déclaration faite sur les ondes de Radio Congo par le Directeur général de la Crf sur le deblocage d’une somme de 9 milliards, laquelle aurait selon lui disparu à partir de l’un des comptes de cette structure ;
-la situation des 14.000 milliards d’excédents budgétaires. Il n’y a jamais eu audit du compte ouvert à cet effet à la Banque centrale et où est passé cet argent?
-les révélations faites par les Panama et Paradise Papers qui font apparaître que certains congolais detiendraient des fortunes colossales dans les paradis fiscaux ;
-les nombreux crimes et scandales économiques ;
-les fonds de plus de 100 milliards alloués à l’agriculture de 2008 à 2016;
-le cas du Fonds de soutien de l’agriculture pour lequel la Direction générale de la surveillance du territoire avait publié un communiqué clair en mars 2018. Il donnait aux personnes impliquées un délai au 30 avril 2018 pour régler ce problème sous peine d’être présentées au parquet. Depuis,c’est silence radio et pour cause!
En fait, on peut se demander si le Congo avait besoin d’aller chercher l’aide et le soutien au Fonds monétaire international. Encore que ce n’est pas la première fois. Sera t-elle la dernière? Attendons de voir!
Il aurait suffi d’avoir le courage de :
-libérer tous les prisonniers politiques ;
-organiser un dialogue national inclusif ;
-entreprendre des réformes audacieuses et immédiates ;
-lutter sans complaisance contre la corruption, les détournements de deniers publics, les vols,la fraude et autres,
-prendre à bras le corps les problèmes des crimes et scandales économiques parmi lesquels les Panama et Paradise Papers.
On ne peut que noter le manque de volonté politique et l’impuissance des gouvernants à passer à des actions concrètes.
Ils ont fait un choix: celui des déclarations et théories non suivies d’effets.
Pendant ce temps les congolais souffrent.
Clément Mierassa