Avec la mort du chanteur congolais Mbuta Mashakado le 22 juin 2011, en Afrique du Sud, c’était une légende de la chanson congolaise qui disparaissait.
La Famille « Langa Langa » perdait ainsi un de ses meilleurs fils. Mbuta Mashakado était devenu un mythe, ayant acquis un très large public de fans qui appréciait ses chansons et surtout sa fureur sur scène. Mbuta Mashakado a conquis des générations de congolais avec des tubes comme : « Pesa nzoto kilo », « Belly », « Mabita »…
I – Le Show Man Dieudonné Nzola Ntima (et son parcours dans Zaïko)
Le grand public le connait par nom « Mbuta Mashakado, surtout à travers la Pop Music dont il était le véritable Show man au cours des premières années de Zaïko. On se souvient de sa prestation à des mémorables Show concerts au cours desquels il s’appliquait avec succès à faire une musique proche de celle d’Otis Redding ou de celle de James Brown dont il reproduisait fidèlement et avec fouge toutes les acrobaties de danse.
Il a osé, il l’a gagné ce pari parfaitement intense de se positionner en grande vedette au cours de la première partie de tous les concerts. Sur une tessiture invraisemblable, il swingue comme une section rythmique, et scatte comme un possédé.
II- Caractères premiers du chant Zaïko
A cette époque (1970 à 1975) le « Tout choc Zaïko Langa Langa » fort de la pléiade de ses chanteurs de premier plan, s’étant engagé de les repartir en trois divisions décroissantes, qui se valaient chacune dans son rôle.
1)- La division 03 était assurée par le show man Mbuta Mashakado qui à lui seul communique à travers son chant et ses acrobatie de la pop music une émotion profonde, sans jamais sacrifier à aucun effet vocal. Son rôle de l’ouverture de rideau, sans atteindre la virtuosité d’Otis Redding ou de James Brown, ses idoles, mais on peu voir en lui ses héritiers dans le talent qu’il déploie à faire vivre le texte le plus anodin. Athlète de ses pieds, Mbuta Mashakado est une sorte d’énorme danseur rock échappé dans l’avant-garde. Sept ans avant l’avènement de Michael Jackson, il patinait déjà à reculons dans le genre « Moonwalker ».
2)- La division 02 est représentée par Nyoka Longo « Jossart », Bimi Ombale et Pene Kikumba. Première réaction du public un profond abasourdissement devant tant de maîtrise et de virtuosité dans les voix. Ensuite un réveil soudain et on abat les idoles avant de leur laisser le temps de murir.
3)- La division 01, celle de la synthèse de tous les aspects de l’art du groupe à travers l’accompagnement de la danse «Choquez » et avant sa période éclectique, est solidement assurée par Evoloko « Lay Lay », Efonge, Lafanza « Gina wa Gina, Jules Wembadio et Simon Mavuela. C’est la division des poètes tendres et paumés qui chantent les nostalgies de la jeunesse et des amours perdues, les jeunes filles, avec l’humour du désespoir et la lucidité de l’intelligence.
Certes, la part la plus populaire et la plus festive est celle qui intervient au moment où l’ambiance est son comble et au cours d’un répertoire exceptionnel, qui engage tous les acteurs de toutes les divisions confondues sur un tempo d’enfer.
III- L’Evolution de Mbuta Mashakado
Décembre 1974, l’orchestre Zaïko enregistre la toute première défection de ses membres. Ils sont : Jules Shungu Wembadio « Papa Wemba» Mavuela Somo, Bozi Boziana et Evoloko « Lay Lay » (chant) pour former l’orchestre Isifi Lokole avec entre autres musiciens Chora Mukoko, Ada Muwangissa (guitare), Djo Mali (basse), Biko (drums) Otis Koyongonda (Lokole).
Si la relève dans Zaïko est immédiatement assurée par des jeunes recrues, cependant Mbuta Mashakado doit pouvoir désormais se familiariser avec la chanson et le rythme typique « Choquez ». Il a dans son approche du changement intervenu, une étonnante réussite dans la variété rythmique et vocale. Il est très apprécié du collectif pour la facilité avec laquelle il s’est dégagé de l’influence écrasante de la Pop Music. Il s’exprime désormais dans un style tout particulier. Il tient d’ailleurs une part de sa célébrité à son grand talent de danseur.
Novembre 1975, l’orchestre Isifi Lokole est bord de la crise, aussi la séparation est inévitable. Shungu Wembadio « Papa Wemba » et d’Evoloko « Lay Lay » pour former l’orchestre Yoka Lokole. Le trio s’octroi les services du guitariste-solo Chora Mukoko et de Otis Kayongonda (lokole-drums).
En Mars 1976, Mbuta Mashakado quitte le Zaïko « Langa Langa » au sommet de sa gloire, pour intégrer l’orchestre Yoka Lokole. Il fait désormais partie de l’attaque chant surnommé « The Fania All stars » pour sa virtuosité typique de la nouvelle génération des chanteurs dont Wembadio « Papa Wemba », Mavuela Somo et Bozi Boziana collectionnent les grands succès.
1976, Shungu Wembadio est l’objet d’une plainte judiciaire pour laquelle il écope plusieurs mois de tôle. Après son acquittement en Décembre 1976, il est irrecevable par le collectif de Yoka Lokole a la tête duquel se trouve Mavuela Somo.
C’est précisément au cours d’un concert au bar « 1-2-3 » à Kinshasa que Mbuta Mashakado se passera pour le véritable tombeur de Wemba, par un renvoi en public on ne peu plus dégradant, un acte qui est demeuré anecdotise. Pendant longtemps deux versions Yoka Lokole vont existées séparément : Yoka Lokole aile Mavuela et Yoka Lokole, aile Shungu, avant d’opter en Février 1977, par l’appellation Viva la Musica.
Entre temps, en Janvier 1977, Mbuta Mashakado est retenu par Tabu Ley pour faire partie de l’orchestre national du Zaïre qui a pris part du 15 Janvier au 12 février au II° Festival mondial des arts nègres de Lagos (Nigéria).
Au retour de l’orchestre National à Kinshasa, Mbuta Mashakado est exclu de Yoka Lokole par Mavuela Somo. Ceci étant, Mbuta Mashakado s’impose un jour de lui-même au cours d’un concert de Zaïko pour y faire désormais partie. D’ailleurs à ce sujet, une anecdote se raconte toujours de la façon dont il s’était présenté : Il monte sur scène et lance le cri ci-après et avec arrogance « Nazongi na canaille kaka » (je reviens de mon propre gré sans de compte à rendre) En dépit du geste, Zaïko en avait effectivement besoin.
Le célèbre Mbuta Mashakado est resté l’un des quelques génies incontestables qu’ai donnés la famille Zaïko. Son fulgurant passage sur la scène de la « Rumba choquez » a exercé une influence déterminante, analogue à celle de la bande de Evoloko Mavuela, Wembadio, Bozi Boziana et Nyoka Longo.
Depuis, fort longtemps, Mbuta Mashakado, a tiré un trait sur la carrière musicale pour évoluer dans une entreprise productive de son frère ainé Displanmat, Agence Conseil en publicité.
Mbuta Mashakado a prouvé a qui voulait bien l’écouter, son génie vocal, ses pieds de danse son humour, et une vertu mélancolique qui faisait de ce monsieur une espèce bizarre de grand Show man.
Clément Ossinondé