« Une chanson musicophilosophique est une chanson qui véhicule, outre des concepts philosophiques, un message novateur, rassembleur et constructif de la société… »
Né à MBOUMOU, un petit village situé à 11 km du district de Ntsiaki dans le département de la Bouenza, Bernard NGAVOULOU, musicophilosophe, comme il aime s’appeler, a démarré sa carrière musicale en 2011 chez Parfait Young en enregistrant le titre NTSIAEH qui signifie Ntsiaki avec l’appui de Laveron MOUKROKOTO son guitariste adulé et de sa fille Berfelelie Jessica NGAVOULOU Kintsissa qui a apporté la voix féminine. Ce premier single parfumé du style ntsiawa a boosté sa carrière musicale jusqu’à l’enregistrement d’autres titres comme wata yah mokah, Mahama, Mbaeh qui prône l’amour du prochain, Naloukaka…qui lui ont permis de sortir son premier album intitulé Mabouh qui signifie le bercail faisant allusion à son Mboumou natal.
Fonctionnaire de l’Etat congolais, Bernard NGAVOULOU, le musicophilosophe a connu une touche particulière quand il a rendu hommage à Fernand MABALA et à Lutumba Simaro Massiya.
Au cours de cette interview, il nous explique tout sur sa carrière musicale et ses projets.
Pagesafrik.info : Bonjour qui est réellement Bernard NGAVOULOU :
Bernard NGAVOULOU : je suis Congolais né à Mboumou comme vous l’aviez mentionné dans votre introduction, après avoir enseigné pendant plus d’une décennie, je suis allé à l’ENAM ce qui a fait de moi administrateur. J’aimerais ajouter que je suis aussi un ami de la philosophie, pas un philosophe, mais j’insiste un ami de la philosophie. J’avais des prédispositions de faire la musique d’autant plus que mon feu oncle dont je porte le nom jouait un instrument qu’on appelle chez nous « indité » ou la sanza.
Dans ma jeunesse, j’écoutais beaucoup la musique et j’ai commencé à composer les chansons lorsque je suis arrivé en classe de 3ème. Ma rencontre avec Laveron MOUKROKOTO m’a permis de faire la connaissance de Parfait Young auprès duquel j’enregistre mes chansons jusqu’à ce jour.
Pourquoi vous vous appelez musicophilosophe ?
BN : je suis le musicophilosophe parce que j’ai conçu et élaboré le concept de musicophilosophie. Je l’affirme sans esprit d’oscillation que je suis le seul et l’unique au monde à avoir créé ce concept. Et puisqu’il a une véritable énergie polémique et discursive, je lui ai donné une approche définitionnelle à ce dernier, j’ai circonscrit son objet d’étude, rassemblé les éléments épistémologiques qui expliquent sa scientificité et je m’emploie pour le devenir de ce domaine de savoir.
En quoi vos chansons sont musicophilosophique ?
BN : C’est probable. Ce qui est sûr, c’est que mes chansons ne sont pas obscènes et elles ne le seront jamais. Je laisse donc le soin aux esprits les plus assermentés pour dire si mes chansons peuvent être placées dans l’épicentre de la pensée musicophilosophique. Toutefois, mon premier single sera musicophilosophique comme le souhaitent les fans illuminés.
Une chanson musicophilosophique est une chanson qui véhicule, outre des concepts philosophiques, un message novateur, rassembleur et constructif de la société. Un album est en chantier pour corroborer cela. Les chansons aujourd’hui pleines des insanités ne peuvent pas être classées dans la musicophilodophie. Vous ne pouvez pas écouter des chansons pareilles avec vos enfants et autres membres de la famille.
Pourquoi vous valorisez le ntsiawa ?
BN : je valorise le ntsiawa parce que c’est un style musical qui est l’un des trésors culturels dont regorge le Congo. Le meilleur moyen de le conserver et le vulgariser, c’est de le mettre sur des supports audio visuels. C’est ça le véritable enjeu qui se cache derrière la pratique du ntsiawa.
C’est aussi une manière pour moi de faire un clin d’œil à Léopold Sedar Senghor qui parle du « rendez-vous du donner et du savoir », ça veut dire pendant que nous consommons les musiques qui viennent d’ailleurs, les Congolais ont aussi l’obligation de mettre à la face du monde leurs recettes musicales. J’ai un album intitulé Mabouh avec six titres et plusieurs singles. En passant je signale aussi que j’ai composé des chansons sur la municipalisation de la Lekoumou et de la Bouenza
Pourquoi avoir rendu hommage à Fernand MABALA et à Lutumba ?
BN : Fernand MABALA est un grand qui a vécu au « quartier meilleurs » où j’ai grandi et où se trouve notre maison familiale. C’est un grand artiste musicien qui a apporté sa touche dans la valorisation de la chanson congolaise à travers des compositions typiques. Personne ne peut oublier des titres comme « Yatama », « Ainsi va la vie ». C’est un monument de la
musique et de la sape qui mérite d’être reconnu et son nom restera à jamais dans la mémoire des nombreux congolais.
Concernant Lutumba, c’est un monument qui a fait une musique que moi je peux qualifier de « musique réflexive » c’est-à-dire qu’il a composé des chansons pleines de paraboles, d’interrogations et de questionnements. Il a fait la musicophilosiophie sans probablement le savoir.
Si vous avez un mot à l’endroit des promoteurs culturels, que leur diriez-vous ? Et quels sont vos projets ?
BN : je sollicite leur implication dans la valorisation de notre culture qui est en passe de disparaître. Ils doivent savoir qu’ils ont la responsabilité de mettre leur expertise au service de la musique du Congo au risque d’être accusé demain…
Concernant mes projets, ils se résument à deux choses : continuer à ntsiawaliser mes œuvres musicales et faire des clips si je peux trouver quelques sponsors que les musiciens ne trouvent presque plus.
Propos recueillis par Fresnel BONGOL TSIMBA