Dix ans après l’épidémie la plus meurtrière au monde, MSF demande un stock d’urgence de traitements contre Ebola

Alors que le monde célèbre les dix ans de l’épidémie la plus meurtrière de la maladie à virus Ebola, qui a tué plus de 11 000 personnes en Afrique de l’Ouest in 2014, Médecins Sans Frontières (MSF) regrette que, bien qu’il existe désormais deux traitements approuvés contre Ebola, ils ne soient pas facilement accessibles à travers un stock d’urgence prêt à être utilisés dans les endroits où ils pourraient être nécessaires lors d’une future épidémie. Les traitements restent sous le contrôle exclusif de deux sociétés pharmaceutiques américaines, Regeneron et Ridgeback Biotherapeutics, et la quasi-totalité des traitements actuellement disponibles dans le monde sont conservés dans un stock de sécurité nationale et de biodéfense détenu par les États-Unis. Il est donc nécessaire de constituer un stock international d’urgence de ces traitements, fourni par Regeneron et Ridgeback et géré par le Groupe international de coordination (GIC) sur la fourniture de vaccins, afin de garantir que les traitements puissent toujours être fournis à court terme à toute personne qui en a besoin et où qu’elle se trouve. « Il y a dix ans, le monde n’était pas préparé à l’apparition de la maladie à virus Ebola en Afrique de l’Ouest. Il n’y avait pas de traitement antiviral, ce qui rendait difficile de convaincre les malades de se rendre dans les unités de traitement. Il n’y avait pas de vaccins et la protection des personnes se limitait donc à essayer de les convaincre de changer de comportement, ce qui, des années d’expérience nous l’ont appris, prend du temps et n’a souvent qu’un succès limité. Il était donc difficile de contrôler l’épidémie « , explique le Dr Armand Sprecher, spécialiste en santé publique à MSF. « Maintenant qu’il existe des traitements antiviraux et des vaccins efficaces, nous pouvons utiliser des outils importants pour sauver des vies, prévenir la maladie et contrôler les épidémies, mais seulement s’ils sont entièrement disponibles pour les personnes qui en ont besoin. C’est pourquoi nous demandons la constitution d’un stock d’urgence ». Après près d’un demi-siècle sans traitement spécifique, ce n’est que lors de la plus grande épidémie d’Ebola en 2014, lorsque les pays les plus riches ont été confrontés à la menace d’Ebola dans leurs frontières, que le financement de la recherche et du développement de traitements et de vaccins contre le virus a augmenté de façon spectaculaire. Puis, après une combinaison de plus de 800 millions de dollars américains de financements publics et de contributions essentielles, notamment de la part des gouvernements des pays touchés, des ONG et des établissements universitaires, qui ont accueilli ou facilité les essais cliniques, ainsi que des patients et des survivants qui ont directement participé à l’expérimentation des traitements, deux traitements ont été approuvés par la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis en 2020. Ces traitements ont été recommandés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2022, et figurent désormais sur la liste modèle des médicaments essentiels de l’OMS. Il existe également deux vaccins, qui en plus du traitement, sont essentiels pour prévenir et répondre à une épidémie d’Ebola. Bien qu’il s’agisse d’un ajout important à la boîte à outils de la riposte à Ebola, ces nouveaux outils médicaux ne répondent qu’à l’ébolavirus du Zaïre, l’espèce de virus la plus courante à l’origine de l’épidémie de 2014.* Les traitements – REGN-EB3 (atoltivimab/maftivimab/odesivimab), commercialisé par Regeneron sous le nom d’Inmazeb, et mAb114 (ansuvimab), commercialisé par l’OMS sous le nom d’Ebanga – restent largement inaccessibles aux personnes qui en ont besoin pendant les épidémies. Même si le déploiement rapide des traitements lors d’une épidémie d’Ebola se heurte à de nombreux obstacles, le fait que seul un tiers des patients ait reçu l’un ou l’autre traitement lors des cinq épidémies survenues depuis 2020 s’explique en grande partie par le fait que les traitements ne sont pas facilement accessibles là où les épidémies se produisent le plus souvent. Regeneron et Ridgeback conservent le contrôle privé de ces traitements par le biais de brevets et de licences, et presque tous les traitements disponibles sont détenus et contrôlés par les États-Unis. « Une leçon claire tirée des dix dernières années est que compter uniquement sur la bonne volonté des entreprises privées ou des gouvernements n’est pas la solution à un problème d’accès aux médicaments « , explique le Dr Márcio da Fonseca, conseiller en maladies infectieuses pour la Campagne d’accès de MSF. » Pour que les traitements contre Ebola et les outils de prévention d’aujourd’hui et de demain soient plus largement disponibles, des conditions d’accès mondiales doivent être fixées dès le début du processus de recherche et de développement des outils médicaux mis au point avec de l’argent public, et l’accès aux traitements pour les communautés qui les ont testés doit être légalement garanti. Nous devons nous préparer dès maintenant à la prochaine épidémie et veiller à ce qu’il n’y ait aucune lacune dans l’accès aux outils médicaux appropriés, y compris pour les autres espèces d’Ebola, afin d’éviter les pertes de vies catastrophiques que nous avons connues il y a dix ans ». En outre, MSF a exhorté tous les détenteurs de brevets sur les traitements contre Ebola à délivrer des licences et à transférer les technologies à des fabricants compétents afin que davantage de producteurs puissent fabriquer des traitements contre Ebola, ce qui contribuera à accroître leur disponibilité à l’avenir. *L’épidémie en Ouganda en 2022 a été causée par l’espèce Soudan.
RCA : La recrudescence des attaques contre le personnel et les patients à Batangafo menace la continuité des soins de santé

Les travailleurs humanitaires, les patients et leurs soignants subissent des niveaux de violence insupportables perpétrés par des groupes armés locaux lors de leurs déplacements dans la périphérie de la ville de Batangafo, dans le nord de la République centrafricaine (RCA), a déclaré (vendredi 1er septembre, dnr) Médecins sans frontières (MSF). Deux incidents graves en l’espace de moins d’une semaine mettent en péril notre capacité à continuer à fournir des soins de santé dans la région. MSF demande instamment aux groupes armés de respecter et de protéger les patients et le personnel de santé. Depuis le début de l’année 2023, les équipes de MSF ont subi au moins 16 incidents à Batangafo et dans sa périphérie. Les dernières attaques ont eu lieu les 26 et 30 août. Les agressions consistent principalement en des vols avec violence. Elles sont perpétrées par des groupes d’hommes armés qui assaillent les motards qui transportent les patients, les agents de santé communautaires qui dispensent des soins dans les zones rurales, ou les convois de véhicules transportant du personnel qui se rend sur les activités à proximité. De plus, à deux reprises, en mars et en août de cette année, ces attaques ont également entraîné des violences sexuelles à l’encontre d’une employée MSF et d’accompagnants des patients. « Nous sommes scandalisés par ces violences commises à l’encontre de patients, de soignants, de notre personnel et des motocyclistes qui effectuent les références alors qu’ils se déplacent en étant clairement identifiés comme appartenant à une organisation humanitaire », déclare Gisa Kohler, responsable des opérations pour la République centrafricaine. « Nos équipes sont régulièrement braquées sous la menace d’une arme, et les réponses évasives fournies par les groupes armés locaux, qui attribuent toujours les actions à des éléments incontrôlés pour se dégager de toute responsabilité, sont inacceptables. » Les incidents subis par MSF près de Batangafo ont impliqué une série d’acteurs armés. « Même si le conflit en République centrafricaine ne fait pas la ‘une’ del’actualité internationale, la violence contre les civils s’y déroule en permanence. Ils sont les premiers à en subir les conséquences », explique Gisa. Les attaques répétées qui affectent MSF et nos patients mettent en péril la poursuite de nos activités médicales dans la périphérie de Batangafo. Si nous étions contraints de partir, cela réduirait considérablement l’accès aux soins pour les habitants. » Suite à ces incidents, MSF a décidé de suspendre tous les mouvements de supervision dans la périphérie de Batangafo et a suspendu la référence des patients sur l’axe de Ouogo, où s’est produit l’un des derniers incidents majeurs. « Nous sommes déterminés à rester pour sauver des vies dans cette région négligée, mais nous ne pouvons pas le faire à n’importe quel prix, en mettant nos patients et notre personnel en danger », poursuit Kohler. « Nous appelons tous les acteurs armés à respecter et à protéger le personnel de santé, les travailleurs humanitaires, les patients et les personnes qui s’occupent d’eux. » L’année dernière, MSF a été contrainte de fermer son projet à Kabo, dans le nord de la République centrafricaine, après 16 ans d’existence, suite à l’attaque d’un convoi en janvier 2022. Nous avons cessé nos activités en raison de l’impossibilité d’assurer la sécurité des déplacements de nos équipes dans cette région instable du pays. MSF est présente à Batangafo depuis 2006. Ses équipes gèrent actuellement un hôpital, soutiennent un réseau d’agents de santé communautaires formés pour traiter le paludisme et les cas modérés de diarrhée, et appuient deux centres de santé à la périphérie de la ville par des visites régulières. Entre janvier et juillet 2023, l’organisation a assuré près de 115 000 consultations médicales et référé à l’hôpital de la ville plus de 2 000 patients en provenance des zones rurales ayant besoin de soins plus spécialisés.
Soudan : faute de visas, les activités de MSF dans l’Hôpital Turc de Khartoum menacées de fermeture
Si les autorités soudanaises ne délivrent pas rapidement des visas à ses équipes, Médecins sans Frontières (MSF) pourrait bientôt être contrainte de cesser ses activités en soutien au ministère de la Santé à l’Hôpital Turc de Khartoum, l’un des rares hôpitaux de la ville à fournir des soins 24 heures sur 24. Les demandes de visas pour du personnel MSF spécialisé en urgences, dont des chirurgiens et des infirmiers, sont en attente depuis plus de huit semaines, alors que les visas d’une grande partie du personnel actuellement présent à Khartoum sont sur le point d’expirer, ce qui signifie que cette équipe devra bientôt quitter le pays. « L’équipe MSF actuellement présente dans l’hôpital travaille sans relâche avec nos partenaires du ministère de la santé depuis plus de deux mois pour le maintenir ouvert et élargir l’offre de soins. Notre équipe est restée à Khartoum, y compris après un grave incident au cours duquel des membres de l’équipe ont été la cible d’une agression, de menaces de mort et de vol », explique Claire Nicolet, responsable des urgences de MSF. « Malgré notre détermination à continuer à travailler dans cet hôpital, les soins vitaux dispensés par notre équipe sont désormais menacés du fait de l’impossibilité de faire entrer du personnel dans le pays. » « La détérioration de la situation en matière de sécurité et les pénuries de carburant à Khartoum font que chaque jour est un nouveau défi pour notre personnel, qui s’ajoute à leur combat quotidien pour maintenir les patients en vie. Nous devons être en mesure de remplacer régulièrement notre personnel pour continuer à relever ces défis et à fournir des soins. Nous avons une équipe en attente, prête à partir, mais sans visa, elle ne peut se rendre au Soudan. Nous avons impérativement besoin d’au moins sept visas pour remplacer notre équipe à l’hôpital turc. Outre l’octroi des visas que nous avons déjà demandés, nous demandons également aux autorités soudanaises des procédures transparentes d’approbation des visas qui nous permettront de remplacer régulièrement notre personnel dans le pays. » « À défaut de pouvoir faire entrer du personnel pour renouveler notre équipe, nous serons contraints de cesser nos activités dans l’hôpital. Cela aurait un impact désastreux sur les personnes qui vivent encore à Khartoum et auront besoin de soins vitaux au cours des prochains mois », alerte Claire Nicolet. Au cours des six dernières semaines, MSF a fourni des soins à plus de 3 800 patients à l’Hôpital Turc, dont plus de 1 700 consultations aux urgences, 20 % d’entre eux étant des blessés de guerre. Au cours de la même période, près de 800 personnes ont également été hospitalisées, dont plus de 200 enfants. La majorité des cas pédiatriques étaient des nouveau-nés souffrant de septicémie, de jaunisse et de malnutrition. Les soins de santé maternelle sont également une activité majeure dans cet hôpital, tout comme le traitement des maladies chroniques. Depuis le début de la crise en avril, les autorités soudanaises ont centralisé le processus d’octroi des visas à Port-Soudan et cessé d’accorder des visas de résident, accordant uniquement des visas pour deux mois avec la possibilité de les prolonger d’un mois supplémentaire si la personne se rend à Port-Soudan – un véritable défi compte tenu des conditions de sécurité dans les régions du pays où nous travaillons, telles que le Darfour et Khartoum. Un seul lot de sept visas a été accordé depuis avril à notre équipe travaillant à l’hôpital turc de Khartoum. Les visas pour d’autres projets de MSF dans le pays ont également été rarement accordés. Un processus plus transparent et un plus grand nombre de visas sont nécessaires pour que MSF puisse maintenir sa réponse face aux immenses besoins auxquels fait face le pays.
Nigeria : MSF alerte sur le nombre sans précédent d’enfants malnutris traités à Maiduguri

A Maiduguri, la capitale de l’État de Borno, les équipes du centre de nutrition thérapeutique de Médecins Sans Frontières (MSF) constatent un nombre sans précédent d’enfants souffrant de malnutrition et nécessitant un traitement vital. MSF met en garde contre une catastrophe imminente si des mesures immédiates ne sont pas prises. Depuis le début de l’année 2023, le nombre d’admissions est le plus élevé jamais enregistré par les équipes de MSF dans l’État de Borno, au nord-est du Nigéria, pour les semaines précédant la » période de soudure » annuelle, lorsque les stocks de nourriture de la récolte précédente s’épuisent et que les niveaux de malnutrition atteignent leur maximum. « L’augmentation massive du nombre d’enfants malnutris exige que les activités de prévention et de traitement de la malnutrition soient immédiatement renforcées afin d’éviter une situation catastrophique lorsque la période de soudure arrivera « , explique Htet Aung Kyi, coordinateur médical de MSF. L’équipe du centre d’alimentation thérapeutique Nilefa Kiji de MSF à Maiduguri a constaté une augmentation des admissions d’enfants admis pour malnutrition aiguë modérée et sévère. En janvier de cette année, environ 75 enfants ont été admis chaque semaine pour malnutrition sévère dans ce centre géré par MSF, soit trois fois plus que la moyenne des cinq dernières années pour la même période. Début avril, le chiffre est passé à près de 150 par semaine, soit deux fois plus qu’il y a un an. « C’est du jamais vu depuis que nous avons commencé à mener des activités de lutte contre la malnutrition en 2017 », témoigne Htet Aung Kyi, coordinateur médical de MSF au Nigéria. « Le nombre d’admissions hebdomadaires pour malnutrition sévère et modérée est deux à trois fois plus élevé que la moyenne enregistrée au cours des cinq dernières années. Et la tendance est à la hausse. L’année dernière a été terrible, mais cette année pourrait être pire si cette tendance se poursuit. » Une action immédiate s’impose La malnutrition n’est pas un phénomène nouveau à Maiduguri, où des années de conflit et d’insécurité ont conduit à une situation humanitaire critique. De nombreuses personnes ont été déplacées et vivent désormais dans des conditions précaires dans des sites informels, au sein de communautés d’accueil ou en transit dans des camps de détention. Le nombre de patients traités par MSF pour malnutrition sévère a explosé en 2022, avec plus de 8 000 enfants hospitalisés pour des soins nutritionnels intensifs. À cette époque, un enfant sur sept provenait du camp de détention de Hajj, mis sur pied par les autorités pour les anciens membres des groupes d’opposition armés, leurs familles et ceux qui vivaient sous leur contrôle. Nombre d’entre eux sont arrivés dans ce camp de transit dans un état de santé précaire qui s’est aggravé en raison des conditions de vie difficiles sur place. La fin de l’année 2021 a vu la fermeture des camps officiels de personnes déplacées et la réduction de l’aide humanitaire et alimentaire. Pour la plupart des gens, les conditions de vie sont extrêmement difficiles, tandis que certains sont soumis à des restrictions de mouvement, ce qui les empêche de gagner leur vie ou de cultiver leurs terres. La vulnérabilité des populations s’est accrue. Plus récemment, la vulnérabilité des populations s’est aggravée du fait de la pénurie d’argent liquide qui a suivi le changement de la monnaie nigériane fin 2022, et à la destruction récente de certains marchés à Maiduguri. Les équipes de MSF dispensent des traitements hospitaliers et ambulatoires aux enfants souffrant de malnutrition et fournissent une alimentation ciblée aux enfants souffrant de malnutrition modérée afin d’éviter que leur état ne se détériore. Les équipes mobiles de MSF gèrent également des cliniques offrant des soins de santé de base aux personnes vivant dans le camp de Hajj et dans les sites informels de Muna et Maisandari. « L’aide alimentaire seule ne suffira pas » Les autorités et les organisations humanitaires doivent immédiatement intensifier les activités liées à la malnutrition et augmenter le nombre de lits dans les centres de nutrition thérapeutique intensive, mais elles doivent également améliorer les conditions de vie dans les camps de transit et élargir l’accès des personnes aux soins de santé. Ces mesures doivent s’accompagner d’une augmentation rapide du financement des donateurs et une forte coordination de ces fonds afin de s’assurer que les denrées alimentaires parviennent à ceux qui en ont le plus besoin. À ce stade, seuls 16 % des fonds demandés par le groupe nutrition ont été obtenus. Cette situation est également alarmante. Entre début janvier et le 20 avril 2023, 1 283 enfants malnutris ont été admis pour des soins hospitaliers intensifs au centre d’alimentation de MSF de Maiduguri, soit environ 120 % de plus qu’au cours de la même période l’année dernière. Outre cette urgence nutritionnelle à Maiduguri, les équipes MSF répondent également à des crises sanitaires et de malnutrition de grande ampleur ailleurs dans le nord-ouest du Nigeria, travaillant dans 32 centres d’alimentation thérapeutique ambulatoires et 10 centres d’alimentation thérapeutique hospitaliers dans les États de Kano, Katsina, Kebbi, Sokoto et Zamfara. L’année dernière, MSF a traité 147 860 enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère dans le nord-ouest du Nigeria.
Niger. MSF dénonce une insuffisance critique d’abris et de soutien pour les migrant.e.s abandonné.e.s à Assamaka

Des milliers de migrant.e.s expulsé.e.s d’Algérie et abandonné.e.s dans le désert au nord du Niger sont bloqué.e.s, sans accès à un abri, à des soins de santé, à la protection et aux produits de première nécessité, a déclaré aujourd’hui l’organisation médicale humanitaire internationale Médecins Sans Frontières (MSF). Entre le 11 janvier et le 3 mars 2023, 4 677 personnes en situation de migration sont arrivées à pied à Assamaka, une ville de la région d’Agadez située au nord du Niger, et sont bloquées dans le désert, après avoir été expulsées de l’Algérie. Moins de 15 % d’entre elles ont pu bénéficier d’un abri ou d’une protection à leur arrivée. MSF demande à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) de fournir immédiatement une protection à ces personnes abandonnées à Assamaka, dans des conditions extrêmement précaires. Le Centre de Santé Intégré (CSI) d’Assamaka, appuyé par MSF, est débordé tandis que des milliers de migrant.e.s cherchent à s’y abriter. « La situation est préoccupante », déclare Schemssa Kimana, coordinatrice de terrain de MSF à Agadez. « Aujourd’hui, le centre de santé que nous appuyons à Assamaka est bondé. La majorité des personnes récemment arrivées à Assamaka se sont installées dans l’enceinte du CSI, en raison du manque d’espace dans le centre de transit. » Selon Kimana, des personnes dorment dans tous les coins de l’établissement. Certaines ont installé des tentes de fortune à l’entrée ou dans la cour. D’autres campent devant la maternité, sur le toit ou dans la zone de déchets. Le personnel de MSF a déclaré que c’est une situation sans précédent. Les températures à Assamaka —une ville aride—, peuvent atteindre 48 degrés Celsius, si bien que les gens cherchent à s’abriter de la chaleur partout où ils le peuvent. Cela les a conduits à dormir dans des endroits très peu hygiéniques, comme les zones de déchets, ce qui les expose davantage à des risques sanitaires tels que les maladies contagieuses et les infections cutanées. L’indisponibilité d’abris obligeant les gens à dormir dans ces conditions est consternante, a déclaré MSF. Cette situation représente désormais une urgence – elle est intenable pour quiconque de continuer à vivre dans ces conditions. « Nous sommes inquiets parce que personne ne nous donne une réponse sur le jour de notre départ pour notre pays d’origine », confie une migrante Camerounaise à MSF. « Nous ne savons pas quand nous allons quitter Assamaka. On est comme dans une prison à ciel ouvert. Pour les repas, ce qu’on nous sert est très mal préparé car il y a plus de sable là-dedans que de nourriture. Ça nous rend malade et nous cause la diarrhée et des maux de ventre. Ou alors les rations sont tellement insignifiantes que nous n’arrivons pas à manger à notre faim. On vit au niveau du CSI dans des hangars qui avaient été construits pour les malades de COVID. Pendant la nuit, la police mène des patrouilles pour renvoyer vers le CSI tous les migrants éparpillés dans le village ». « Il s’agit d’une situation sans précédent qui exige une réponse humanitaire d’urgence de la part de la CEDEAO, d’où provient la majorité de ces personnes », déclare Jamal Mrrouch, chef de mission de MSF au Niger. « En tant qu’organisation médicale humanitaire, il est de notre devoir de signaler l’insuffisance tangible d’assistance pour ces personnes – y compris les enfants – qui se trouvent dans une situation précaire dans le désert d’Assamaka, et les risques pour leur santé. » MSF
Epidémies de rougeole en RDC : une lutte sans fin ?

Tous les deux à trois ans, des flambées de rougeole affectent des dizaines voire des centaines de milliers d’enfants en République démocratique du Congo. L’année passée n’a pas échappé à la règle avec plus de 148.600 cas et 1.800 décès notifiés. Comment expliquer cette situation d’urgence permanente ? Et, surtout, comment y mettre fin ? Lorsque l’on parle d’urgence en République démocratique du Congo (RDC), le problème de la rougeole est rarement la première image qui vient à l’esprit. Pourtant, cette maladie fait régulièrement des ravages auprès des enfants en bas âge – principales victimes de la rougeole – et constitue depuis des années la première raison d’intervention des équipes d’urgence de Médecins Sans Frontières (MSF) en RDC. « Nous avons cinq équipes d’urgence mobilisées quasiment en permanence pour répondre aux différents foyers de rougeole à travers le pays. Mais dès qu’on éteint un feu ici, ça flambe de l’autre côté. En 2022, nous avons réalisé 45 interventions d’urgence liées à la rougeole ; c’est plus des trois quarts de nos réponses d’urgence en RDC », résume le Dr Louis Massing, référent médical pour MSF en RDC. La plus grande épidémie de rougeole jamais documentée en RDC s’est déroulée entre 2018 et 2020. A l’époque, près de 460.000 enfants avaient contracté la maladie, et 8.000 d’entre eux y avaient succombé. De vastes campagnes vaccinales avaient été organisées par les autorités sanitaires, appuyées par des partenaires internationaux comme MSF, permettant de réduire drastiquement le nombre de cas en 2021. « Mais l’année passée, près de la moitié des zones de santé du pays se sont à nouveau retrouvées en situation d’épidémie », déplore le Dr Massing. « Et ce n’est pas fini puisque qu’en janvier 2023, près de 20.000 cas suspects de rougeole ont été notifiés en RDC. Rien qu’en ce début d’année, nos équipes ont déjà répondu à des flambées de rougeole dans les provinces de la Tshopo, du Maniema, du Sud-Kivu, du Nord-Kivu, du Lomami et du Lualaba. » « Il ne peut y avoir aucun maillon faible » Maladie parmi les plus contagieuses au monde, la rougeole bénéficie heureusement d’un vaccin qui offre une protection quasi-totale s’il est administré deux fois. Sachant qu’une personne porteuse du virus peut infecter jusqu’à 90% des personnes non-vaccinées autour d’elle, assurer une couverture vaccinale maximale est donc vital. Ce qui nécessite des investissements massifs dans la vaccination de routine, dans la surveillance et dans l’organisation de campagnes de rattrapage. « La lutte contre la rougeole est comme une chaîne entourant le virus : si un seul maillon est brisé, le virus peut s’échapper », explique le Dr Massing. « Premièrement, le pays doit s’assurer d’avoir des quantités suffisantes de vaccins disponibles pour éviter les ruptures de stocks dans les structures de santé. Il faut ensuite veiller à leur acheminement vers les structures en question et que celles-ci disposent d’une chaine de froid efficace, à même de garantir la conservation des vaccins dans de bonnes conditions. Il faut également du personnel sur place pour vacciner les enfants lors des consultations, et que les familles aient les moyens économiques et physiques de s’y rendre. Enfin, il faut organiser régulièrement des campagnes de rattrapage pour protéger les enfants qui passent entre les mailles du filet… Vu la virulence de la rougeole, il ne peut y avoir aucun maillon faible. » Malheureusement, de nombreux maillons de cette chaîne souffrent de faiblesses structurelles en RDC, un pays qui connait une forte natalité avec chaque jour un grand nombre de nouveau-nés à protéger. Et ces défis sont encore aggravés par les contraintes sécuritaires et géographiques qui compliquent fortement l’accès dans certaines zones. En conséquence, malgré les campagnes d’urgence menées à chaque flambée, la couverture vaccinale reste insuffisante pour éviter les épidémies. Si les estimations de couverture peuvent fortement varier d’une source à l’autre, les dernières estimations de l’UNICEF et de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) indiquent qu’en 2021, seuls 55% des enfants étaient couverts par une dose de vaccin contre la rougeole. Et ce, alors qu’une couverture de minimum 95% à deux doses est recommandée pour prévenir la propagation de la maladie. « Certaines zones ne sont atteignables qu’en pirogue, voire même à pied en traversant la forêt », témoigne Alexis Mpesha, responsable logistique au sein de l’une des équipes d’urgence de MSF en RDC. « Il n’est pas rare que nos équipes soient les seules à atteindre certains villages car les autorités sanitaires locales n’ont pas les équipements, l’essence ou les moyens humains requis pour s’y rendre. » Pour les parents qui souhaitent faire vacciner leurs enfants, la distance pour atteindre un centre de santé fonctionnel, les frais de transport et parfois de consultations peuvent être décourageants. « Les soins coûtent cher et nos moyens sont limités », déplore Anne Epalu, originaire du village de Bangabola, où MSF est intervenue en urgence pour répondre à une épidémie de rougeole en 2022. « Certains enfants meurent juste parce que les parents n’ont pas d’argent pour payer les soins… » Renforcer la vaccination s’impose au plus vite En 2022, les équipes de MSF en RDC ont vacciné plus de 2 millions d’enfants dans 14 provinces et pris en charge pas moins de 37 000 patients souffrant de la rougeole. MSF se déploie en soutien au Ministère de la Santé pour organiser des campagnes de vaccination et mettre en place des unités de traitement quand une augmentation rapide des cas de rougeole est observée dans une zone et que les capacités de réponse locale sont limitées ou que l’accès est difficile. Outre les interventions d’urgence lors de flambée de cas dans une zone, MSF fournit également, dans plusieurs provinces, un soutien logistique aux activités de vaccination de routine dans les structures sanitaires où ses équipes sont présentes tout au long de l’année. Mais des efforts et investissements bien plus importants sont requis de la part des autorités sanitaires et de leurs partenaires pour augmenter la couverture vaccinale en RDC et mettre fin aux cycles sans fin d’épidémies. « Il y a notamment lieu d’accélérer l’introduction de la deuxième dose dans les activités de vaccination de routine contre la rougeole »,
Burkina Faso: MSF annonce la suspension de l’ensemble de ses activités dans le pays

À la suite de l’attaque au cours de laquelle deux employés MSF ont été tués le 8 février dernier dans la région de la Boucle du Mouhoun, l’organisation Médecins Sans Frontières/MSF annonce qu’elle suspend l’ensemble de ses activités dans le pays. « Cette mesure, nécessaire au temps du deuil, est essentielle pour analyser les risques auxquels sont actuellement exposées nos équipes », indique l’organisation dans un communiqué. « Il s’agit aussi de réaffirmer la nature inacceptable de cette attaque contre des collègues circulant dans un véhicule MSF clairement identifié dans le cadre de leur mission médicale », poursuit MSF de même source. médecins sans frontières précise toutefois que dans toutes les localités où elle appuie et fournit de l’aide médicale et humanitaire, « seules les urgences vitales seront assurées pour une durée indéterminée ». Adrien Thyg
MSF condamne l’assassinat brutal et délibéré de deux de ses employés au Burkina Faso

Médecins Sans Frontières (MSF) condamne avec la plus grande fermeté l’assassinat de deux de ses employés dans la région de la Boucle du Mouhoun, dans le nord-ouest du Burkina Faso. Dans la matinée du mercredi 8 février, un véhicule MSF clairement identifié transportant une équipe médicale de quatre personnes sur la route entre Dédougou et Tougan, a été pris pour cible par des hommes armés qui ont fait feu sur l’équipage. Deux employés ont été tués, tandis que deux autres ont réussi à prendre la fuite. Les deux victimes, de nationalité burkinabè, étaient employées par MSF en tant que chauffeur, depuis juillet 2021, et superviseur logistique, depuis juin 2020. Ils étaient âgés de 39 et 34 ans, respectivement. “Nous sommes bouleversés et indignés par cet assassinat. Il s’agit d’une attaque délibérée et intentionnelle sur une équipe humanitaire clairement identifiée, dans le cadre de sa mission médicale, explique le Dr Isabelle Defourny, présidente de MSF. Notre priorité est d’apporter notre soutien aux deux collègues qui ont survécu à l’attaque, et de soutenir les familles et proches de nos collègues disparus. Mais nous allons également devoir rapidement échanger avec toutes les parties au conflit pour comprendre ce qu’il s’est passé”. En attendant d’avoir développé une meilleure compréhension de cet événement tragique, MSF a suspendu les activités qu’elle menait dans la région de la Boucle du Mouhoun. Le Burkina Faso est confronté à une crise politique, sécuritaire et humanitaire sans précédent, entraînant le déplacement de près de deux millions de personnes suite aux violences et combats opposant groupes armés et forces gouvernementales. Entre juillet et décembre 2022, les équipes MSF au Burkina Faso, présentes dans quatre régions du pays, ont fourni près de 400 000 consultations de santé primaire et aidé à l’accouchement de près de 4 300 femmes.