Musiciens congolais : entre l’ancien et le nouveau…
TRIBUNE. Un regard panoramique sur les professionnels de l’art d’Orphée en RDC nous met en présence de trois prototypes de musiciens congolais, notamment: – Ceux qui, en 2006, 2011 et 2018 et présentement en 2023, se métamorphosent en griots du président sortant, chantant à sa gloire pour sa réélection en énumérant dans leurs chansons les hauts faits “ imaginaires “ du dirigeant, avec l’objectif d’obtenir bien évidemment en échange, des espèces sonnantes et trébuchantes. – Ceux qui ne prononcent pas expressément le nom du puissant mécène mais lui rendent autrement service en multipliant, surtout en période électorale, des concerts grandeur nature avec l’objectif politique (avoué ou non) de détourner l’attention du peuple et de l’opinion internationale en vue de masquer l’échec du quinquennat passé. – Enfin ceux, très minoritaires, qui contre vents et marées, se rangent du côté du peuple et s’érigent en des porte-parole de son profond désarroi. C’est dans cette dernière catégorie qu’il faudra ranger la 6 e génération de musiciens congolais au nom desquels il faudra classer des opus qui font tâche d’huile, notamment: “Pays des prisonniers” de Delphin Alias Delcat Idengo; “ Politiciens esrocs” Delcat Idengo; “ Pas de président “ du rappeur Muyisa Nzanzu; “Kosa Kaka » de Gally Garvey; « Mpiaka » de Innoss’B et « Keba » du Groupe MPR. Une nouvelle génération musicale de la RDC est en train de voir le jour, porteuse d’une musique engagée en faveur du peuple et non plus des gouvernants. Encore très jeunes ( la trentaine sonnée pour la majorité), ils ont une forte personnalité, assumant une position idéologique subversive et grâce à laquelle ils sont prêts à prendre de grands risques contre leur propre sécurité. Ils ne sont guère poussés ni à gauche ni à droite au gré des intérêts égoïstes. Issus pour la plupart des quartiers des banlieues pauvres et des cités déchirées par la guerre d’invasion des troupes étrangères, leurs chants deviennent un cri de révolte contre ce système mis en place en RDC et qui les empêche de vivre décemment comme des jeunes d’autres pays. Pourtant ils refusent de pleurnicher ou de devenir fatalistes. Ils se servent de leur chanson comme arme de combat contre un ordre politique inique. Pour cette raison, ils refusent de chanter à la gloire de l’autocrate. Ils n’ont pas froid aux yeux pour dénoncer sa mauvaise gouvernance ou les divers méfaits de la société. Il y en a, comme à Béni ou à Butembo : Idengo et Muyisa qui ont été traînés devant les tribunaux et condamnés à trois ans de prison pour offense au chef de l’Etat. Face à la mendicité de leurs aînés de la première catégorie qui ont choisi de vivre aux mamelles du pouvoir corrompu et corrompant ou encore face au mutisme calculé des musiciens de la deuxième catégorie, ces jeunes gens ont choisi, eux, de dénoncer le mal et de se comporter en éveilleurs de conscience. Bravo à cette jeunesse montante! Tout n’est pas pourri dans ce pays! Par Germain Ndinga
RD Congo. Il y eut aussi une Union sacrée en 1991
RETRO. La chute du mur de Berlin et la perestroïka constituent deux événements fondateurs du grand bouleversement géopolitique mondial des années 90 et du grand tournant que prendra l’histoire de l’humanité et plus particulièrement de la République du Zaïre où elles eurent des répercussions considérables sur la stabilité du régime Mobutu devenu inutile à un Occident qui n’avait plus besoin d’un bouclier africain contre le communisme. Les tensions internes entre l’opposition et la mouvance présidentielle ne firent que s’exacerber au plus haut point. Et c’est donc à contrecœur que le Maréchal Mobutu posera deux actes qui vont précipiter l’effondrement de son régime. Le 24 avril 1990, il prononcera un discours historique à N’sele pour prendre congé de la direction du MPR Parti-Etat et ouvrir le pays à l’expérience du multipartisme. Ce qui va entraîner la création d’une multitude de partis politiques divisés deux blocs : en Mouvance présidentielle et en une Opposition radicale réclamant, elle, l’ouverture d’un forum national pour faire un bilan de la santé politique du pays. Le 6 mai 1991, Mobutu va signer l’Ordonnance-Loi n° 91-070 portant création et composition d’une conférence dite constitutionnelle appelée Conférence Nationale Souveraine (CNS), chargée d’aborder toutes les questions d’intérêt général en vue de jeter les bases de la Troisième République. C’est dans la foulée de la CNS que va naitre la plateforme de l’Union Sacrée de l’Opposition Radicale (USOR) dont le protocole d’accord fut signé le 17 juin 1991 par l’UDPS, l’UFERI et le PDSC et quelques temps plus tard deviendra l’Union Sacrée de l’opposition radicale et alliés (USORAL) ouvert à d’autres partis. A y regarder de très près, l’UNION SACREE de 1991 ne fut rien d’autre qu’un panier à crabes, une opération de transfert des dinosaures, des vautours et des hiboux de la Mouvance présidentielle vers l’Opposition. Une transhumance étrange et basée sur le seul critère de critiquer ou d’injurier Mobutu pour se voir dédouané de tous ses crimes passés et pour pouvoir se donner une nouvelle virginité politique. Tout se passa comme si une grande partie des mobutistes se déversa dans l’opposition au point de faire de l’USORAL la mouvance présidentielle NEW LOOK. Et cela se fera sentir dans la suite des événements. Toutes les stratégies de la CNS pour sortir le pays de l’impasse seront sabordées de l’intérieur même de cette fameuse union sacrée. Pour revenir à l’essence même de cette UNION SACRÉE , il sied de rappeler à la mémoire collective qu’entre les Mouvanciers et l’Union sacrée, existait une plate-forme sans nom constituée de TAUPES, à entendre par là des faux opposants que dans une étude collective en 2012, je nommais des « opposants fabriqués ». Ce fut la cinquième colonne de Mobutu pour torpiller l’opposition de l’intérieur. Tenez ! Etienne Tshisekedi déjà nommé Premier ministre par Mobutu le 22 juillet 1991 va refuser cette offre à l’époque jusqu’à son élection par la Conférence nationale le 1er octobre de la même année. Mobutu y opposera son refus catégorique et ce sera le début d’un bras de fer impitoyable. Le 23 octobre 1991, Mobutu ira justement pêcher dans l’USORAL même, deux de ses taupes, en nommant Premier ministre Mungul Diaka auquel succèda rapidement Nguz Karl I Bond. Curieusement c’est le même Nguz Karl I Bond de l’Uferi et membre fondateur de l’Union Sacrée de l’opposition qui réclamait à cor et à cri l’instauration de la CNS et qui, le 22 janvier 1992, invoquera une tentative de coup d’État pour mettre fin à la Conférence nationale souveraine (CNS), pour ordonner le massacre des chrétiens le 16 février 1992 et pour lancer en aout 1992 les jeunes des milices de l’Uferi dans une chasse à l’homme contre les balubas du Shaba. La crise ira s’exacerbant jusqu’à l’arrivée d’un troisième acteur non prévu, le pseudo-libérateur AFDL en mai 1997 qui amènera dans ses valises, des tueurs de nationalité étrangère qui jusqu’à ce jour continuent à mettre le Congo à feu et à sang. Vous avez dit Union Sacrée de la Nation? Consultez bien l’histoire congolaise pour en tirer des leçons utiles aux générations actuelles ? Par Germain Nzinga
RD Congo. Pourquoi cherchons nous le vivant parmi les morts?
TRIBUNE. En marge du dernier match retour entre les Léopards du Zaïre et les Lions de l’Atlas au Maroc, des compatriotes étaient partis se recueillir à la tombe du Maréchal Mobutu pour solliciter ses bénédictions en faveur des fauves zaïrois. Qui avaient dit à ces neomobutistes inavoués ou qui s’ignorent que Mobutu se trouvait dans une tombe au Maroc? Non! Mobutu n’est plus sous terre. Les grands esprits ne meurent jamais dès lors qu’ils se font toujours revenir à la vie à travers leurs idées. Maintenant que le kabilisme et le tshisekedisme ont fait ce qu’ils pouvaient faire jusqu’à ne plus avoir des solutions crédibles pour nos équations de la pacification de l’Est et de redressement de notre économie nationale, la nature ayant horreur du vide, des esprits clairvoyants ont déjà compris que la seule approche qui nous reste pour la pacification de l’Est, le redressement de notre économie nationale et la reprise du processus de notre développement national naïvement interrompu en 1990 par une dynamique populiste anti-mobutiste reste le recours à la même recette de l’éveil du patriotisme, de la lutte contre le tribalisme, de l’implémentation de notre puissance militaire, de la pratique de la méritocratie et de la promotion de notre grandeur nationale en Afrique et dans le monde que Mobutu avait appliquée de 1965 à 1966 pour pacifier l’Est et redresser notre économie au point qu’1 Zaire valut 2 dollars pendant cinq ans. Les musiciens ont l’art de sentir venir de loin de grandes mutations politiques. C’est comme Adou Elenga qui avait vu venir de loin les indépendances africaines hier et les Fally, Koffi, Youssoupha, Poison Mobutu, MPR et autres qui sentent aujourd’hui le prochain avènement d’un Nouveau Grand Zaire. C’est autant dire qu’il ne faille pas aller chercher Mobutu dans une tombe au Maroc car il est déjà parmi nous à travers ses héritiers politiques pour des fins utiles. Bonne réflexion. A suivre ! Par Faustin Bosenge