« Rwanda classified » : la réponse de Kagame

« Rwanda classified » : la réponse de Kagame

TRIBUNE. Le documentaire « Rwanda classified » du consortium «Forbidden Stories» continue de faire réagir. Le magazine «Jeune Afrique», relai médiatique du Front patriotique rwandais (FPR), le parti au pouvoir au Rwanda, publie ce jour une charge en règle contre cette enquête qui met en lumière les pratiques criminelles de Paul Kagame en dehors des frontières rwandaises. Au cœur de la manœuvre, un groupe d’universitaires, de soi-disant militants des droits de l’homme et de journalistes appartenant au réseau européen de Paul Kagame. Ces individus et leur modus operandi sont analysés dans « Rwanda : Malheur aux vaincus ». Ils appartiennent à ce que j’ai appelé le «Complexe FPRo-intellectuels». Profitant de la légitimité qu’ils ont acquise dans leur champ professionnel et dont ils tirent leur force d’intervention dans le champ public, ils font la promotion de la version officielle du génocide sans distance critique. L’historien Vincent Duclert, spécialiste non pas du Rwanda mais de l’affaire Dreyfus, et l’un des auteurs de la tribune attaquant le travail des journalistes de « Forbidden Stories », est devenu depuis peu l’un des propagandistes attitrés de Paul Kagame en France. Son rapport politiquement chargé sur le rôle de la France au Rwanda et son ouvrage en sont les plus belles illustrations. La tribune publiée dans le magazine « Jeune Afrique » est en réalité la réponse de Paul Kagame et du FPR au documentaire «Rwanda classified». Comme je l’ai expliqué dans une interview récente, le Rwanda a des relais un peu partout en Occident, notamment en Belgique et surtout en France, où son réseau est très actif. Pendant que les autorités congolaises se querellent autour des postes ministériels et autres banalités du genre, l’adversaire, lui, manœuvre pour faire entendre sa version des faits mensongère des événements qui ensanglantent le Kivu. On aurait pu, à Kinshasa, tirer profit du documentaire pour exercer davantage de pression sur le régime de Kigali, mais il n’en a rien été. On préfère les débats inutiles. Là où les Congolais ont tendance à voir, à juste titre faut-il le dire, la main et la responsabilité du Rwanda et de l’Occident dans leur malheur, il faut y voir aussi l’incompétence et la médiocrité de la classe politique congolaise, à commencer par le sommet de l’État. Patrick Mbeko