Le chômage continue de gagner du terrain
L’année 2023 s’est achevée sur une nouvelle progression du chômage, selon les données publiées par le Haut-commissariat au plan (HCP). Une nouvelle déception pour les jeunes, les diplômés et les femmes (18,3%) qui en sont les premières victimes. Les politiques publiques mises en place pour l’enrayer n’ayant pas eu l’effet escompté, le taux de chômage s’est emballé au terme de l’année écoulée, passant de 11,8% à 13% (+1,2 point) au niveau national, de 15,8% à 16,8% (+1 point) en milieu urbain et de 5,2% à 6,3% (+1,1 point) en milieu rural. Ce bond porte le nombre de chômeurs à 1.580.000 Ainsi, « entre 2022 et 2023, le nombre de chômeurs a augmenté de 138.000 personnes, passant de 1.442.000 à 1.580.000 chômeurs, ce qui correspond à une hausse de 10% », consécutive à l’accroissement de 98.000 chômeurs en milieu urbain et de 40.000 en milieu rural, selon le Haut-commissariat. L’évolution du taux du chômage met clairement en évidence l’échec des différents programmes mis en place par les pouvoirs publics en vue de dynamiser le marché du travail et par ricochet enrayer le chômage. En effet, selon les statistiques de l’organisme public, dirigé par Ahmed Lahlimi Alami, le taux de chômage « reste plus élevé parmi les jeunes de 15 à 24 ans (35,8%), les diplômés (19,7%) et les femmes (18,3%) » qui, rappelons-le, constituent pourtant les cibles privilégiées des programmes publics d’emploi. Il est à noter que le taux de chômage a augmenté de 1,2 point parmi les hommes, passant de 10,3% à 11,5% et de 1,1 point parmi les femmes, de 17,2% à 18,3%, comme l’indique le HCP dans sa note d’information relative à la situation du marché de travail en 2023. « Selon le diplôme, le taux de chômage a enregistré une hausse de 1,1 point parmi les diplômés, passant de 18,6% à 19,7%, et de 0,7 point parmi les personnes n’ayant aucun diplôme, passant de 4,2% à 4,9% », poursuit le document. Cette hausse a concerné l’ensemble des catégories d’âge L’institution chargée de la production, de l’analyse et de la publication des statistiques officielles au Maroc, précise que cette hausse a concerné l’ensemble des catégories d’âge. En effet, « le taux de chômage est passé de 32,7% à 35,8% (+3,1 points) parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans, de 19,2% à 20,6% (+1,4 point) pour les personnes âgées de 25 à 34 ans, de 6,4% à 7,4% (1 point) pour celles de 35 à 44 ans, et de 3,3% à 3,7% pour celles de 45 ans et plus (+0,4 point) », apprend-on. Par ailleurs, il est important de noter que « le chômage a été marqué par la hausse de la proportion des personnes récemment en chômage » au cours de cette période et que « la part des personnes en situation de chômage depuis moins d’un an s’est élevée de 31,3% à 33,3% », comme le relève le Haut-commissariat dans sa note estimant ainsi que la durée moyenne de chômage est passée de 33 mois à 32 mois. La même source précise, de l’autre côté, que 27,8% des chômeurs se sont retrouvés dans cette situation suite à l’achèvement ou l’arrêt des études et 27% suite au licenciement ou à l’arrêt de l’activité de l’établissement. L’économie nationale a perdu 157.000 postes d’emploi entre 2022 et 2023 HCP Selon la note du HCP, « entre l’année 2022 et 2023, l’économie nationale a perdu 157.000 postes d’emploi, résultat d’une diminution de 198.000 postes en milieu rural et d’une augmentation de 41.000 en milieu urbain, après avoir perdu 24.000 postes une année auparavant. L’autre enseignement : le secteur des BTP a contribué à la création de 19.000 postes d’emploi, celui des services 15.000 postes, celui de l’ »industrie y compris l’artisanat » 7.000 postes, alors que l’ »agriculture, forêt et pêche » a perdu 202.000 postes. Avec une hausse de 138.000, dont 98.000 en milieu urbain et 40.000 en milieu rural, le volume du chômage a atteint 1.580.000 personnes au niveau national. En ce qui concerne le sous-emploi, les données montrent que son volume est passé, durant la même période, de 972.000 à 1.043.000 personnes au niveau national, de 520.000 à 560.000 en milieu urbain et de 452.000 à 483.000 en milieu rural. Quant à son taux, il a augmenté de 9% à 9,8% au niveau national, de 8,1% à 8,7% en milieu urbain et de 10,4% à 11,6% en milieu rural, fait savoir l’institution. Alain Bouithy
Maroc. A 12,3%, le chômage continue de narguer les politiques publiques
Alors que le programme «Awrach» venait d’être mis en route, les chiffres publiés par le Haut-commissariat au plan (HCP) viennent rappeler une affligeante réalité : la situation du marché du travail au Maroc continue de se détériorer et la lutte contre le chômage est loin d’être une mince affaire. Arrivé depuis peu à un stade opérationnel, comme l’a déclaré dernièrement le ministre de l’Intégration économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences, Younes Sekkouri, le programme «Awrach» entend notamment améliorer l’employabilité et accroître les chances d’insertion professionnelle. Mais en attendant les premiers résultats qui permettront d’apprécier l’impact réel de cette initiative chez les jeunes, notamment, les données du Haut-commissariat montrent que le chômage a grimpé au terme de l’année 2021. Dans une note d’information relative à la situation du marché du travail en 2021, l’’institution publique annonce qu’il est passé de 11,9% à 12,3% au niveau national, de 15,8% à 16,9% en milieu urbain et de 5,9% à 5% en milieu rural. En effet, « entre 2020 et 2021, le nombre de chômeurs a augmenté de 79.000 personnes, passant de 1.429.000 à 1.508.000 chômeurs, ce qui correspond à une augmentation de 5,5% », a indiqué le Haut-commissariat précisant que cette hausse est la conséquence d’une augmentation de 120.000 chômeurs en milieu urbain et d’une baisse de 41.000 en milieu rural. Comme c’est souvent le cas depuis des lustres, « il est plus élevé parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans (31,8%), les diplômés (19,6%) et les femmes (16,8%) », a-t-il fait savoir. Des disparités observées au niveau de l’ensemble des catégories de la population montrent que « le taux de chômage s’est accru respectivement de 0,6 point pour les femmes, passant de 16,2% à 16,8% alors que ce taux a quasiment stagné pour les hommes (de 10,7% à 10,9%) », a poursuivi le HCP. Selon la note du Haut-commissariat et la répartition par diplôme, le taux de chômage a enregistré une hausse de 1,1 point parmi les diplômés, passant de 18,5% à 19,6%, et une baisse de 5,6% à 4,6% parmi les personnes sans aucun diplôme. « Selon l’âge, le taux de chômage a augmenté de 0,6 point pour les jeunes âgés de 15 à 24 ans, passant de 31,2% à 31,8% et de 1,1 point pour les personnes âgées de 25 à 34 ans, passant de 18,5% à 19,6% », a-t-il ajouté. Il est à noter que le volume du sous-emploi est de son côté passé de 1.127.000 à 1.003.000 personnes, de 619.000 à 550.000 dans les villes et de 508.000 à 453.000 à la campagne. C’est ainsi que « le taux de sous-emploi est passé, au niveau national, de 10,7% à 9,3%, de 10,1% à 8,8% en milieu urbain et de 11,6% à 10% en milieu rural », a souligné le HCP dans sa note. La même source relève, par ailleurs, qu’entre 2020 et 2021, l’économie nationale a créé 230.000 postes d’emploi, correspondant à une hausse de 2% et résultant d’une création de 130.000 postes en milieu rural et de 100.000 postes en milieu urbain, A titre de rappel, 432.000 postes d’emploi avaient été perdus une année auparavant. « Par type d’emploi, 197.000 postes d’emplois rémunérés ont été créés, 112.000 en milieu urbain et 85.000 en milieu rural », a indiqué le HCP dans sa note d’information du HCP précisant que l’emploi non rémunéré a augmenté de 33.000 postes, création de 45.000 en zones rurales et perte de 12.000 en zones urbaines. Selon les statistiques du HCP, cinq régions abritent 72% de l’ensemble des actifs âgés de 15 ans et plus : la région de Casablanca-Settat vient en première position avec 22,2% d’actifs, suivie de Rabat-Salé-Kénitra (13,4%), de Marrakech-Safi (13,3%), de Tanger-Tétouan-Al Hoceima (11,6%) et de Fès-Meknès (11,4%). Ces mêmes données montrent que trois régions enregistrent des taux d’activité supérieurs à la moyenne nationale (45,3%). Selon le Haut-commissariat, « il s’agit des régions de Tanger-Tétouan-Al Hoceima (49,8%), de Casablanca-Settat (47,7%) et de Marrakech-Safi (46,8%) ». Soulignons, en revanche, que les taux les plus bas sont enregistrés dans les régions de Souss-Massa (41,3%) et de Fès-Meknès (42,3%) et de l’Oriental (42,5%). Alain Bouithy
Appel à propositions: Une opportunité de financement pour des équipes de recherche pour révolutionner les politiques publiques et stratégies sur l’Intelligence Artificielle en Afrique francophone
Bonne nouvelle pour les chercheurs et les institutions travaillant sur les questions de droits humains, les politiques publiques et les nouvelles technologies. Dans le cadre de son Initiative pour le Développement de l’Intelligence Artificielle (IDIA), NIYEL lance un appel à propositions visant à financer et accompagner les projets de recherche de cinq (5) équipes de recherche d’Afrique francophone, et les invite à soumettre leurs candidatures dès aujourd’hui ! Les pratiques dans le domaine de l’Intelligence Artificielle (IA) ont ouvert le champ des possibles et contribuent chaque jour au progrès de la société et à la réalisation des Objectifs de Développement Durable (ODD). Comme souligne le Dr Ibrahima Hathié, Chercheur émérite, Docteur en économie agricole et membre du Think Tank IPAR : « Ce projet présente une opportunité pour propulser l’Afrique dans son développement. ». Matthew Smith, Spécialiste de programme principal pour le Centre de Recherches pour le Développement International (CRDI), souligne pour sa part : « Il ne fait aucun doute que l’intelligence artificielle aura un impact important au cours de la prochaine décennie en Afrique subsaharienne. Mais ce qui reste moins clair, c’est comment cette intelligence artificielle sera exploitée pour servir les intérêts et priorités des communautés locales, et dans quelle mesure les risques connus et inconnus seront abordés. ». En effet, le continent africain enregistre des progrès exponentiels en matière d’innovation et de développement dans le domaine de l’intelligence artificielle. Or, les politiques actuelles ne prennent pas en considération les implications de l’IA et n’adressent pas les enjeux tels que la gouvernance, l’éthique ou l’équité. Valérie Traoré, Directrice Exécutive de NIYEL, d’indiquer : « Ce programme vise à combler un besoin criard de recherche et d’analyse des politiques publiques actuelles sur l’intelligence artificielle afin de proposer des solutions pour le développement de stratégies nationales et régionales inclusives sur l’IA.» C’est donc une nouvelle avenue qui s’ouvre pour la recherche politique. Cet appel à propositions constitue une occasion offerte aux 5 équipes de recherche qui seront sélectionnées de bénéficier d’un soutien direct afin de fournir des pistes concrètes pour le développement de politiques publiques et stratégies inclusives sur l’IA en Afrique francophone avec la contribution de décideurs politiques. Matthew Smith, de préciser : « Il y a une communauté croissante de chercheurs et d’innovateurs impliqués dans l’IA dans la région. Ce projet s’associe aux communautés scientifiques et politiques d’Afrique afin de s’engager, à leurs côtés, dans des projets de recherche contextualisés pour éclairer l’élaboration de stratégies et de politiques en matière d’IA qui contribuent à créer un écosystème de développement et de déploiement responsable de l’IA en Afrique pour le bien-être des populations. ». Informations de soumission La période de soumission est ouverte jusqu’au Dimanche 11 Juillet 2021 à 23h59 (GMT) Le document d’appel à propositions ainsi que toutes les directives de soumission sont accessibles : bit.ly/3v2mYZT L’appel à propositions est ouvert aux institutions établies dans les pays admissibles de l’ensemble de l’Afrique francophone (cf. liste sur l’appel à propositions). Les équipes de recherche devront soumettre leurs propositions, comprenant une lettre de soumission, une proposition technique et une proposition financière, par voie électronique. Un jury convoqué par Niyel, comprenant des experts et partenaires, sera chargé d’évaluer les propositions complètes. Les équipes de recherche sélectionnées seront contactées à partir du Lundi 2 Août 2021. L’appel permettra d’allouer 5 subventions d’un montant global de 615 000 $ Canadiens pour mettre en œuvre cinq projets de recherche d’une durée de 24 mois.
La crise actuelle offre l’opportunité de corriger les politiques publiques
Repenser l’action publique peut contribuer à instaurer une reprise plus équitable, selon l’OCDE La crise due à la pandémie de Covid-19 offre aux gouvernements du monde l’opportunité de mettre leurs économies sur une trajectoire de croissance plus durable et inclusive, a souligné récemment l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Bien qu’elle ait provoqué des perturbations sociales et économiques importantes dans plusieurs pays, la pandémie de Covid-19 offre également l’occasion de s’attaquer aux problèmes sous-jacents, a expliqué l’organisation internationale d’études économiques dans un rapport intitulé «Objectif croissance 2021 : pour une reprise dynamique». Comme l’a fait remarquer le secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurría, «la pandémie est venue nous rappeler douloureusement que notre croissance passée était souvent, par nature, non durable, et qu’elle a laissé beaucoup de monde en chemin». Pour lui, «la reprise nous donne l’occasion de corriger nos politiques publiques pour asseoir une croissance plus forte, plus équitable, plus résiliente et durable», a-t-il soutenu estimant que c’est dès maintenant que les gouvernements doivent agir. Ainsi que l’a expliqué l’organisation dans son rapport, qui analyse les défaillances qui préexistaient avant la pandémie ainsi que celles qu’elle a provoquées, «repenser l’action publique peut contribuer à instaurer une reprise plus forte, plus résiliente, plus équitable et plus durable après la pandémie». Soulignons que ce document, qui offre aussi aux responsables de l’action publique des conseils ciblés par pays leur permettant de profiter de l’occasion qui leur est donnée d’une refonte complète de leurs politiques, formule une série de recommandations. Celles-ci servent de cadre aux discussions engagées au sein du G20 sur les stratégies à mettre en œuvre pour favoriser une reprise économique dynamique et promouvoir une croissance de meilleure qualité, a précisé l’organisation. Lancé peu après la deuxième réunion des ministres des Finances et des gouverneurs de banque centrale des pays du G20 tenue sous la présidence italienne, qui a eu lieu le 7 avril courant, le rapport propose ainsi un cadre de réforme de l’action publique qui s’articule autour de trois axes. Le premier axe incite à œuvrer en faveur de la résilience et de la durabilité à travers des politiques structurelles permettant de renforcer la première ligne de défense face aux chocs. A savoir : les soins de santé et filets de protection sociale, les infrastructures essentielles. Il s’agit aussi d’améliorer la gouvernance publique et de multiplier les incitations à mieux prendre en compte les considérations de viabilité à long terme offertes aux entreprises. Le deuxième axe vise à faciliter la réaffectation des ressources et à stimuler la croissance de la productivité. Pour l’organisation, «placer la croissance sur une trajectoire plus durable, plus résiliente et plus inclusive suppose, de la part des pouvoirs publics, des mesures structurelles visant à renforcer la dynamique de l’emploi et à encourager les entreprises à se montrer plus dynamiques, plus innovantes et plus vertes». Le troisième axe prône le soutien des populations pendant les phases de transition. L’OCDE estime que les politiques publiques devraient avoir pour objectif de ne laisser personne en chemin pendant les phases de transition, de façon à garantir une réaffectation socialement productive et à assurer la résilience. Ainsi, explique-t-elle, «il est nécessaire d’investir dans les compétences et la formation et de prendre des mesures vigoureuses en faveur d’un accès à des emplois de qualité, particulièrement parmi les catégories les plus vulnérables, ainsi que d’instaurer des filets de protection sociale généralisés, et de développer l’apprentissage et les aides à l’accès au marché du travail». Selon le rapport, qui plaide pour une action concertée, en particulier face aux enjeux qui dépassent les frontières, la santé, la lutte contre le changement climatique, les échanges mondiaux et la fiscalité des entreprises multinationales constituent «les domaines dans lesquels une coopération internationale s’impose pour améliorer l’efficacité des politiques nationales et étayer la transition vers une mondialisation plus durable, plus résiliente et plus équitable». Alain Bouithy
Maroc : les politiques publiques pour éviter la trappe à revenu intermédiaire
La Direction des études et des prévisions financières (DEPF) a organisé, mardi 11 février à Rabat, une conférence sur le thème : « Croissance économique et perspectives d’emploi au Maroc : les politiques publiques pour éviter la trappe à revenu intermédiaire», objet du dernier ouvrage du directeur du Département des Economies-pays de la Banque africaine de développement (BAD), Emmanuel Pinto Moreira. Organisé en partenariat avec le Policy Center for the New South (PCNS), ce séminaire s’est déroulé à l’amphithéâtre du Ministère de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’Administration. Cette rencontre « a eu pour principal objectif d’explorer et discuter les conclusions de l’auteur sur les perspectives de croissance et d’emploi au Maroc dans un contexte international en rapide évolution », ont indiqué les organisateurs dans un communiqué. Un contexte « marqué par une concurrence accrue des économies à bas salaires et par une automatisation croissante des emplois peu qualifiés, et en particulier, à l’aune de l’engagement national d’édification d’un nouveau modèle de développement économique », ont-ils souligné. En ce sens, le séminaire a visé, dans une logique constructive, à animer et enrichir le débat sur les caractéristiques du modèle de croissance proposé et sur les effets à moyen terme des politiques suggérées sur la croissance, l’emploi et le chômage au Maroc, a-t-on relevé de même source. Soulignons que cette rencontre s’est enrichie de la participation de hauts responsables des différentes Directions du MEF, de la représentante de la Banque africaine de développement (BAD) au Maroc, des représentants d’organismes internationaux (la Banque mondiale, UE, UNICEF …) et de praticiens en provenance des départements ministériels et des institutions nationales (IRES, Banque Centrale, CESE, ONDH, ANDA,…). Martin Kam avec CM
DEPF: L’ancrage aux principes de la bonne gouvernance impulse durablement le développement économique
L’édification d’institutions fortes et l’ancrage aux principes de la bonne gouvernance constituent des paramètres importants pour impulser durablement le processus de développement économique d’un pays, affirme une étude de la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) relevant que la gouvernance des institutions figure parmi les clés d’entrée incontournables en matière de développement économique. L’étude, « Gouvernance, qualité institutionnelle et développement économique : Quels enseignements pour le Maroc ? », s’appuie sur des modèles économétriques, intégrant un échantillon de 94 pays dont le Maroc, pour mettre en évidence la relation entre la qualité institutionnelle et la performance économique. Dans le but de déceler l’effet différencié de la gouvernance sur leurs performances économiques respectives, la DEPF précise que l’étude a réparti en trois groupes les pays de l’échantillon étudié en les classant selon leur niveau de revenu (élevé, intermédiaire, faible). C’est ainsi que les analyses élaborées dans le cadre de cette étude, conduite par Ahlam ER-Rahmani et Mounia Bettah, « ont clairement montré que l’édification d’institutions fortes et l’ancrage aux principes de la bonne gouvernance constituent des paramètres clés pour impulser durablement le processus de développement économique d’un pays », a-t-on souligné. Analysant le contexte marocain, les auteurs de l’étude rappellent que les réformes multidimensionnelles menées par le Royaume au cours des deux dernières décennies, impulsées par la réforme constitutionnelle de 2011, lui ont permis d’enregistrer des avancées appréciables en la matière, l’érigeant en modèle pour sa région. Cependant, aussi encourageantes soient-elles, la DEPF estime que ces avancées ne devraient pas pour autant perdre de vue un certain nombre de défis importants à relever par le Maroc pour mobiliser pleinement le potentiel de son développement institutionnel. Parmi ces défis, l’étude cite la généralisation de la mise à niveau de l’administration publique, la coordination étroite entre acteurs, l’amélioration de la transparence de l’information sur la qualité des biens et des services au même titre que la promotion de l’innovation et le renforcement de la sécurité des transactions et des contrats. L’étude estime que pas moins de cinq leviers prioritaires devraient être déployés pour susciter une inflexion positive du développement institutionnel du Maroc et optimiser ses performances économiques et sociales. La DEPF, qui relève du ministère de l’Economie et des Finances, cite ainsi le parachèvement de l’édification du capital institutionnel et sa fructification ; l’accélération du processus d’accumulation du capital humain ; du renforcement de la cohérence des programmes publics et leur indexation systématique sur des mécanismes de suivi et d’évaluation ; la promotion de la territorialisation des politiques publiques ainsi que l’ancrage du système productif national sur une stratégie de modernisation compétitive rénovée. L’étude estime que « le relèvement de ces défis serait opportun pour élargir les perspectives du Maroc au titre de son développement et lui permettre de s’adjuger un positionnement favorable dans le concert des nations », a précisé la DEPF. A noter que cette nouvelle publication s’articule autour de trois sessions : « Evaluation empirique de la relation entre la gouvernance et le développement économique », « Facteurs de gouvernance requis pour un développement économique durable » et « Profil institutionnel du Maroc : positionnement et enseignements ». Si dans la première session, l’étude met en évidence la relation entre la gouvernance et le niveau de développement, la deuxième session identifie les variables d’ordre institutionnel qui constituent des leviers clés pour favoriser un développement économique soutenu et inclusif. Quant à la troisième session, elle revient sur les avancées réalisées par le Maroc sur les plans économique, social et institutionnel, cite certaines expériences d’autres pays et relève les principaux enseignements pour le Maroc. Alain Bouithy
La transformation numérique ne crée pas les mêmes opportunités pour tous
Les inégalités d’accès et d’utilisation pourraient brider le potentiel de l’économie numérique, a prévenu dernièrement l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans sa dernière étude en date sur ce sujet. Pour tirer le meilleur parti de la transformation numérique au service de l’économie et de la société et assurer qu’elle soit largement partagée, l’OCDE a estimé qu’il convenait d’élargir l’accès aux opportunités qu’offrent les technologies et d’aider les retardataires à combler leurs lacunes. Car, si les technologies numériques continuent de faire des avancées impressionnantes, l’infrastructure Internet s’améliore et l’utilisation des outils numériques gagne du terrain, force est de constater que les progrès restent inégaux selon les pays, les entreprises et au sein des sociétés, a indiqué l’organisation. En effet, comme l’a souligné Angel Gurría, secrétaire général de l’OCDE, «la transformation numérique n’est pas uniforme dans l’ensemble des pays, des entreprises et des foyers, et ne crée donc pas les mêmes opportunités pour tous». Il faut dire que les politiques publiques n’ont pas évolué au rythme de l’innovation numérique et de la transformation des économies et des sociétés, impulsées par les grands groupes technologiques, comme cela a été relevé dans l’édition 2017 des «Perspectives de l’économie numérique». Pour rendre la transition numérique plus productive et inclusive, l’étude a suggéré que les pays intensifient désormais leurs efforts, investissent davantage dans l’éducation et le développement des compétences, et encouragent l’utilisation croissante des technologies avancées comme l’analytique des données massives et l’infonuagique, en particulier au sein des petites entreprises. Les inégalités face au numérique ne sont pas les seuls points révélés dans cette étude qui «exhorte également les gouvernements à réexaminer leur droit du travail, leurs accords commerciaux et autres législations, à la lumière des destructions d’emplois, de l’émergence de nouvelles formes de travail et du remodelage des échanges commerciaux», a indiqué l’OCDE dans un communiqué. L’organisation a assuré, en outre, qu’«elle les encourage à travailler de concert pour s’attaquer aux risques de sécurité numérique et d’atteinte à la vie privée, afin de répondre aux préoccupations croissantes suscitées par les cas de violations de données et les incidents de sécurité, qui pourraient compromettre l’adoption des services numériques». Par ailleurs, si l’accès à Internet se généralise, les débits moyens s’accélèrent et les prix chutent, l’étude tend à montrer que l’utilisation des données mobiles connaît un essor beaucoup plus rapide dans certains pays que dans d’autres, la Finlande et la Lettonie se détachant nettement du lot. Ainsi, «en termes de diffusion de l’Internet, en 2016, 97% de la population ou plus y avaient accès au Danemark, en Islande, au Japon, au Luxembourg et en Norvège, contre 60% ou moins au Mexique et en Turquie. Les internautes représentaient plus de 95% des jeunes âgés de 16 à 24 ans, mais moins de 63% des 55-74 ans», peut-on lire sur le site officiel. Selon l’étude, en 2016, 95% des entreprises des pays de l’OCDE disposaient d’une connexion haut débit, contre 86% en 2010. Mais selon l’organisation, ces chiffres masquent de fortes disparités entre petites et grandes entreprises, en particulier au Mexique, en Grèce, en Pologne et en Turquie. «Les petites entreprises accusent en outre un retard en termes d’utilisation des outils avancés, tels l’analytique des données massives et l’infonuagique», a-t-on constaté. Quoi qu’il en soit, pour le secrétaire général de l’OCDE «il nous incombe d’aider les citoyens et les entreprises à franchir le cap du numérique en offrant au plus grand nombre la possibilité d’accéder à moindre frais aux outils numériques et de se doter des compétences pour en tirer pleinement parti». A noter que ce dernier s’est ainsi exprimé à l’occasion de la présentation de la publication lors d’une réunion du Réseau parlementaire mondial de l’OCDE, à Paris.
Mise en lumière du rôle des femmes dans la création de la richesse nationale
Publication d’une étude sur l’égalité de genre, les politiques publiques et la croissance économique au Maroc Dans l’objectif d’enrichir les réflexions en cours à l’échelle nationale et internationale sur la reconnaissance du rôle des femmes dans la création de la richesse nationale, la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) et l’OCP Policy Center (un think tank marocain) ont scellé leur partenariat par l’élaboration d’une étude portant sur l’égalité de genre, les politiques publiques et la croissance économique au Maroc. L’étude, menée sous la coordination de Rim Berahab et Zineb Bouba avec l’appui technique de Pierre-Richard Agénor, professeur à l’Université de Manchester et Senior Fellow à OCP Policy Center, offre un diagnostic exhaustif de l’évolution des inégalités de genre au Maroc en termes d’accès à l’emploi, à l’éducation, à la santé et à l’infrastructure, ainsi qu’une analyse économétrique des contraintes qui pèsent sur la participation des femmes au marché du travail, a précisé la DEPF, relevant du ministère de l’Economie et des Finances. « Cette étude s’est donnée pour ambition, non seulement, de faire l’état des lieux sur la problématique factuelle des relations entre inégalités et croissance mais s’est surtout focalisée sur la rénovation des outils d’analyse, y compris en termes de modélisation, pour franchir le pas de la quantification de l’apport des femmes à la richesse nationale dans le cas propre du Maroc », ont expliqué les auteurs dans l’avant-propos. Riche en enseignements, l’ouvrage relève que la participation des femmes marocaines à la vie active demeure limitée, indiquant que le taux d’activité pour les femmes est de 25,3% en 2014 (après 30% en 1999) contre 72,4% pour les hommes, soit un écart de plus de 47 points. Outre le fait qu’elles sont essentiellement embauchées dans les secteurs à faible productivité, pour occuper des emplois peu qualifiés et faiblement rémunérés, l’étude souligne aussi l’écart entre l’activité des femmes et des hommes qui est davantage significatif en milieu urbain et où le taux d’activité des hommes est plus de trois fois supérieur à celui des femmes, contre un écart de plus du double en milieu rural. « Les femmes urbaines, notamment, celles diplômées de niveau supérieur, sont plus concernées par le chômage, avec un taux de chômage moyen de 22,8% entre 1999 et 2014 contre 14,9% pour les hommes, soit un écart de près de 8 points », relève l’enquête soulignant qu’en milieu rural, les femmes souffrent plutôt d’une discrimination en termes d’accès à un travail rémunéré (73,6% en 2013 des femmes rurales actives occupées ont le statut d’aide familial et d’apprenti sans rémunération). Autre enseignement, malgré le recul des disparités salariales entre hommes et femmes, à niveaux académiques et expériences professionnelles égaux, des écarts persistent toujours. Les femmes gagnent, ainsi, environ 17% de moins que les hommes. Bien que des avancées aient été enregistrées dans l’accès à l’éducation, des défis importants sont à relever eu égard aux taux de déperdition et d’analphabétisme qui demeurent élevés surtout chez les filles rurales, selon l’étude qui appelle, par ailleurs, à réduire davantage les taux de mortalité infantile et maternelle qui restent importants dans le milieu rural. L’étude note également que les femmes consacrent sept fois plus de temps aux activités domestiques que les hommes et fait apparaître la faible participation féminine à la vie professionnelle en comparaison avec celle des hommes qui consacrent quatre fois plus de temps aux activités professionnelles. Parallèlement, le regroupement du travail domestique et du travail professionnel attribue à la femme active une charge de travail plus lourde que la femme au foyer (9h03mn contre 6h02mn). Ainsi, la valorisation du travail domestique des femmes âgées de 15 ans et plus a fait ressortir une contribution des femmes à la richesse nationale (PIB en 2012) de 39,7% en valorisant les heures du travail au SMIG et de 49,3%, en valorisant les heures du travail à la rémunération salariale moyenne dégagée par la comptabilité nationale. Notons que l’étude s’est aussi intéressée aux déterminants du taux de participation des femmes au marché du travail. Par ailleurs, elle présente une évaluation genre des politiques publiques mises en place par le Maroc et propose un modèle à générations imbriquées et différencié par sexe pour quantifier l’impact des décisions publiques sur l’égalité de genre et sur la croissance économique au Maroc.