Les Congolais ont peur. Un pays gouverné par la peur : en avant vers le suicide collectif

Les Congolais ont peur. Un pays gouverné par la peur : en avant vers le suicide collectif

TRIBUNE. La peur est le moteur le plus puissant pour conduire les hommes ou pour gouverner une population. Equitablement partagée, la peur est dans le regard de chaque congolais. Le peuple congolais a peur, les autorités ont peur, le gouvernement a peur, les gouvernés ont peur, même le Président de la république a peur. Tout le monde a peur dans le pays et pour se donner bonne figure, ils nomment cela la trêve sociale, la paix ou encore la stabilité. Cette peur se manifeste de différentes manières selon qu’on soit d’un bord politique ou de l’autre bord politique, d’une communauté ethnique ou d’une autre, d’une classe sociale ou d’une autre. Dans les faits, plus personne n’ose plus quoi que ce soit, la société est paralysée, aucun projet fédérateur en cours dans le pays, personne ne croit plus aux promesses, tout tourne dans le vide. Les médias, thermomètres de la société montrent tous les jours des autorités qui travaillent d’arrache-pied sur des réformes sans résultats. Malgré les annonces tonitruantes des uns et des autres, malgré le travail acharné des uns et des autres, aucun projet n’aboutit, le pays tout entier est toujours biberonné par la communauté internationale, les tentes du HCR et des ONG fleurissent dans les régions et même dans les villes. Même les églises de réveil n’ont plus rien à proposer de concret. Rien ne bouge dans le pays comme si Dieu lui-même avait abandonné le Congo. Tout le monde sait pourtant ce qu’il faudrait faire pour débarrasser le pays de cette peur paralysante qui terrasse tout le monde sans distinction. Les partis politiques, les associations, les journalistes, les professeurs des universités, les personnalités de tous bords ont proposés et proposent toujours des solutions pour sortir le pays de cette crise paralysante. Les meilleurs experts du monde se sont penchés sur le scandale congolais pour esquisser des solutions de sortie de crises mais, rien n’y fait. La peur est toujours plus forte que tout. Chacun souffre en silence à l’abri des regards indiscrets pour préserver une certaine dignité, avec son destin contrarié, ses projets en attente, enterrés ou entre parenthèses. Les retraités sans pensions se terrent chez eux, les étudiants sans bourses rasent les murs, les enseignants et les hospitaliers menacent toujours d’aller en grève sans jamais franchir le pas (les innombrables promesses faites à eux ne sont jamais tenues), les fonctionnaires qui perçoivent encore leurs maigres salaires avec retard sont à bout de force, quant aux opérateurs économiques en attentent de percevoir leurs créances de l’Etat, ils vivotent, gérant tant bien que mal leurs familles, leurs employés et leurs dettes. Les agents de la force publique et les militaires, pourtant régulièrement payés avec retard, boudent tête baissées en regardant leurs chaussures. Chaque corps de métier regarde les autres corps de métier en espérant qu’il va se passer quelque chose sans trop savoir quoi. La peur est une émotion ressentie généralement en présence d’un danger ou d’une menace. La peur est aussi la capacité de reconnaître le danger et de la fuir ou de la combattre. Les congolais ont peur, peur de celui qui est censé les protéger (le père de la Nation) et qui les maltraite pourtant, comme cet enfant battu par son père et qui a pourtant besoin de ce même père pour le protéger, le soigner et le faire manger. C’est le syndrome de Stockholm à l’échelle de tout un pays. Les congolais transpirent la peur, ces grandes gueules qui ont des stratégies à revendre s’égosillent à l’abri des oreilles indiscrètes ou calfeutrés dans leurs chambres à couché, ces théoriciens du dimanche qui ont réponse à tout, ne pensent qu’à se planquer dès que ça sent un peut le souffre. Tous les congolais ont peur, ils se souviennent encore de la sauvagerie de la guerre du 5 juin 1997. Tous les Brazzavillois se souviennent encore de la capture du Colonel Marcel Ntsourou le 16 décembre 2013 en pleine journée avec des armes lourdes et des hélicoptères de combat au centre-ville. Un véritable délire, une explosion, un déchainement de violence inouïe destinée à faire un carnage mais surtout à faire peur aux populations, à ceux qui veulent faire valoir leurs Droits de vivre libre. Cette peur indicible, tétanisante et quasi maladive, rend les congolais incapables de changer leurs conditions de vie. Tous les congolais veulent vivre libre et en paix. La vie est le bien le plus précieux qui vous reste quand vous n’avez plus rien car rien ne vaut la vie. « Le monde appartient à ceux qui osent » disait l’autre, et de renchérir, la peur de l’échec est paralysante à tel point qu’elle peut devenir pathologique. Il faut donc oser, oser toujours et oser encore quelque soit les difficultés. A les regarder vaquer à leurs occupations, s’habiller comme des cracks avec leurs sapeurs on pourrait penser que les congolais sont heureux, derrière leurs chaussures biens cirés, leurs cravates en soi et leurs costumes huileux. En dessous du vernis de leurs ongles manucurés, de leurs coiffures soignés il y a encore et toujours la peur et donc l’impuissance. De quoi ont peur les congolais ?Les notables du Congo vivent dans des demeures bunkérisées, hyper sécurisées avec vidéo surveillance et gardiens munis de chiens méchants ou d’artillerie de guerre, comme des personnes qui ont quelque chose à se reprocher, ceux ou celles qui se croient éternels ont dans des gros véhicules blindés aux vitres fumées avec leurs chauffeurs qui font office de body guard. Il est rare de les voir trainer dans les rues, on les aperçoit à peine dans des clubs très sélects où il faut montrer patte blanche ; ils chuchotent plus qu’ils ne parlent, l’œil alerte, les oreilles à l’affut comme si on pouvait les entendre (les murs ont des oreilles au Congo).Ils ont peut. Régulièrement les forces de l’ordre à bord des engins de guerre sillonnent les artères des quartiers pour faire des exercices. La ville et tout le pays est quasiment une zone guerre permanente, impossible de circuler dans la