Une personnalité du Congo-Brazzaville : Gabriel OKOUNDJI, notre Mwènè !

Une personnalité du Congo-Brazzaville : Gabriel OKOUNDJI, notre Mwènè !

ZOOM. « OKOUNDJI Gabriel « Mwènè » ◊ Poète (Okondo, 9 avril 1962). Après ses études au Congo, il arrive à Bordeaux (France) en 1983 pour faire des études de médecine. En 1986, il s’oriente vers la psychologie clinique et fait la rencontre de l’anthropologue malinké Sory Camara. Profitant des conseils de ce dernier, il approfondit sa culture tégué. Au début des années 1990, il écrit des textes poétiques, rencontre des écrivains occitans (B. Manciet, C. Rapin, J-P. Tardiu), tout en participant à des mouvements de type associatif (Association culturelle des Congolais, GENEPI) et syndical (UNEF). Il est psychologue-clinicien des hôpitaux et enseignant à l’université (Bordeaux II et III). Il est également devenu « Mwènè », un chef tégué, garant de l’ordre traditionnel moral et judiciaire. Après avoir vu certains de ses poèmes traduits en Occitan et publiés dans la revue Oc, Gabriel Okoundji apparaît dans le champ littéraire africain en 1996 grâce à Cycle d’un ciel bleu (prix Pey de Garros, 1996). Ce premier texte porte déjà en lui la plupart des thèmes de son œuvre à venir. Dès le premier poème « souffle », il met l’accent sur la parole : « Moi/je poursuis les alentours/d’un verbe/en terre de l’immobilité des âmes. » ou « Étoiles, vous qui abritez mes aïeux dans le second horizon/élevez ma voix, élevez la famine de mon regard et que grandisse en moi l’espérance d’une vision/au-delà des vapeurs du ciel et des océans ». Cette parole, liée au monde des ancêtres, donc de la tradition orale, est source de sagesse pour le poète. Cela transparaît dans plusieurs vers en forme de sentence ou de proverbe : « Tout est lisible pour qui sait voir/que le chien a quatre pattes/, mais ne suit qu’une route à la fois » (« Clôture », p. 16) ou « La volonté d’un Homme n’arrête pas la pluie/une forêt sans rivière n’est que pouvoir éphémère/l’éclair est nécessaire à la nuit » (p. 12). C’est dans Second poème (1998) que le poète fixe définitivement les thèmes de son univers poétique. Il y revient sur le thème de la parole : « Le verbe est l’essence de l’Homme/c’est par la parole que s’immortalise/la chair de l’Homme ». Bien qu’ayant déjà salué les ancêtres (« Prière aux ancêtres ») et réservé un « Écho pour Ampili » dans Cycle d’un ciel bleu, le poète les célèbre de nouveau sans fard : « C’est à vous ancêtres que je me livre/mon âme est l’empreinte de votre volonté ». Puis, il évoque les éléments naturels (feu, terre, ciel, vent, etc.), parsème Second poème de sentences philosophiques et de souvenirs de son enfance en terre tégué (Okondo, Mpana, etc.). L’œuvre poétique de Gabriel Okoundji poursuivie avec Gnia ma moni mè (2001) jusqu’à Ne rien perdre, ne rien oublier (2017) est devenue abondante. Elle se déploie autour des thématiques susindiquées, c’est-à-dire sur la parole (Gnia ma moni mè ; Vent fou me frappe, 2003), le chant (Ne rien perdre, ne rien oublier, 2017), le symbolisme du vent (L’âme blessée d’un éléphant noir, 2002), sur les maîtres inspirateurs du poète, sa tante-mère Ampili et son conseiller Pampou (Prières aux ancêtres, 2008, Prix PoésYvelines, 2008 ; Stèles du point du jour, 2011) et sur la cosmogonie tégué (Souffle de l’horizon tégué, destinée d’une parole humaine, Prix Coup de cœur 2008, Académie Charles Cros). Parce qu’elle est ancrée dans le pays tégué et défie la rationalité du monde (« la terre vient du ciel/la lune vient du soleil », « Derrière une montagne il y a une montagne »), parce qu’elle transmet le savoir ancestral et assume ses traits nostalgiques, parce qu’elle s’ordonne autour d’une « parole dans ce qu’elle révèle de souffle » (J.-P. Tardiu), la poésie d’Okoundji occupe une place particulière dans le paysage littéraire congolais (B. *Mongo-Mboussa, Africultures, fév. 2004, n° 3264). Bien qu’esseulée entre une poésie minoritairement méditative ou intimiste (J-B. *Tati Loutard, D. *Ngoïe-Ngalla, etc.) et une poésie majoritairement engagée (M. *N’Debeka, H. *Malanda, etc.), elle a toutefois une consonance universelle. Accueillie avec enthousiasme dès 1991 par des écrivains occitans, elle est traduite dans plusieurs langues (occitan, finnois, basque, anglais, espagnol, italien, etc.). Depuis 2010, « Mwènè » Okoundji est devenu une grande voix de la poésie contemporaine (Grand prix littéraire d’Afrique noire, 2010, Paris ; Grand prix des Arts et des Lettres, Congo, 2015 ; Prix international de poésie Antonio Viccaro, Canada, 2015 ; Prix International de poésie Benjamin Fondane, 2016, Paris, etc.). En avril 2018, est sortie aux Éditions Acoria l’anthologie de nouvelles, poésie et contes réunissant une vingtaine d’écrivains de *Pointe-Noire qu’il a codirigée avec l’écrivain-éditeur *Caya Makhélé. Il est l’un des rares écrivains talentueux du pays à raviver la flamme de la « phratrie », chère à Sylvain *Bemba. □ Biblio.- J. Chevrier, Gabriel Okoundji, poète des deux fleuves, La Cheminante, 2014. Ses principaux textes poétiques : Ne rien perdre, ne rien oublier, Fédérop, 2017. Comme une soif d’être homme, encore, Fédérop, 2015. Chants de la graine semée, Fédérop, 2014. Apprendre à donner, apprendre à recevoir, lettre à Jacques Chevrier, William Blake & Co, 2013. Terres d’Afrique, anthologie de poésie contemporaine, Ndzé, 2011. Stèles du point du jour ; Dialogues d’Ampili et Pampou, William Blake & Co, 2011. La mort ne pren-dra pas le nom d’Haïti, Ndzé, 2010. Au matin de la parole, Fédérop, 2009, rééd, Apic, Alger, 2013. Prière aux Ancêtres, texte bi-lingue français/occitan, traduit par J. P. Tardiu, Fédérop, 2008. Souffle de l’horizon tégué, destinée d’une parole humaine, poèmes audio sur CD, AFAC, 2008. Bono, le guetteur de signes, Elytis, 2005. Vent fou me frappe, Fédérop, 2003, 2e éd. 2010. L’Âme blessée d’un éléphant noir, William Blake & Co, 1re éd., 2002, 2e éd. 2010. Gnia, (ma moni mè), texte bilingue français/occitan, traduit par J. P. Tardiu, Cahiers de Poésie Verte, 2001. Palabres autour des paroles de Sory Camara, Presses universitaires de Bordeaux, 1999. Second poème, L’Harmattan, 1998. Cycle d’un ciel bleu, L’Harmattan, 1996. » in Ph. MOUKOKO, DICTIONNAIRE GENERAL DU CONGO-BRAZZAVILLE, L’Harmattan, 2019, 2 è édition). Par

Brazzaville: Rencontre autour de l’œuvre de Gabriel Okoundji à l’Institut français du Congo

Brazzaville: Rencontre autour de l’œuvre de Gabriel Okoundji à l’Institut français du Congo

L’Institut français du Congo – Brazzaville (IFC) organise, vendredi 24 juillet, à partir de 15h (médiathèque), une séance d’échange et de partage autour de l’œuvre de Gabriel Okoundji. Considéré comme une figure marquante de la poésie de langue française, Gabriel Okoundji est l’auteur de plusieurs œuvres saluées par la critique. Le poète d’origine congolaise a notamment signé « Chants de la graine semée » publié en 2014 aux éditions Fédérop, « Apprendre à donner, apprendre à recevoir; lettre à Jacques Chevrier » (éd. William Blake & Co, 2013), « Terres d’Afrique, anthologie de poésie contemporaine » (éd. Ndzé, 2011), « Stèles du point du jour; Dialogues d’Ampili et Pampou » (éd. William Blake and C0 édit, 2011), « La mort ne prendra pas le nom d’Haïti » (éd. Ndzé, 2010) et plus récemment de « Comme une soif d’être homme, encore » publié aux éditions Fédérop en 2015. On lui doit aussi « Prière aux Ancêtres » (texte bilingue français/occitan, traduit par Joan Peire tardiu, éd. Fédérop, 2008), « Souffle de l’horizon tégué, destinée d’une parole humaine » (poèmes audio sur CD, AFAC, 2008) et « Cycle d’un ciel bleu » (éd. L’Harmattan, 1996) qui lui ont valu respectivement les Prix Poésyvelines (2008) du Conseil général des Yvelines, « Coup de Cœur 2008 » de l’Académie Charles Cros et Pey de Garros 1996. Lauréat 2010 du Grand prix littéraire d’Afrique noire pour l’ensemble de son œuvre, Gabriel Okoundji a reçu plusieurs autres récompenses saluant le talent et la qualité de l’œuvre du poète dont « la quête singulière se situe à mi-chemin entre la poésie onirique, cosmique et la pensée philosophique », note-t-on. Il a en effet reçu, pour l’ensemble de son œuvre, les Prix Mokanda 2014, Léopold Sédar Senghor de poésie 2014 du Cénacle Européen Francophone, le Prix spécial Poésie de l’Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Bordeaux 2011. Patricia Engali