TCHAD. ENTERREMENT

TRIBUNE. Quand j’ai lu le courrier, insensé et comportant des fautes, du Bureau de l’AN signé par le président du parlement tchadien Haroun Kabadi, inscrivant en lettres de honte son renoncement à exiger l’application de la constitution, prenant acte de la dissolution du parlement et exprimant son soutien au Conseil militaire de transition et à ses décisions, cela m’a rappelé cette anecdote peu connue que je viens de partager avec vous.

Cinq leçons s’imposent à nous, valables aussi bien en 2005 qu’en 2021.

1) En Afrique, les constitutions ont moins de valeur que le papier avec lequel on emballe nos légumes au marché.

2) Les viols de la constitution se paient cash et durablement: de la même façon que Faure est toujours en poste 16 ans après son accession frauduleuse au fauteuil présidentiel au Togo, il est utopique de penser que le fils Deby dégagera volontairement du pouvoir avant longtemps, sauf s’il meurt de façon aussi impromptue et nébuleuse que son père.

3) On ne peut pas se plaindre de l’ingérence des puissances extérieures dans nos affaires et dans notre quotidien, si nous sommes nous mêmes les premiers à accepter promptement, silencieusement et docilement les violations de nos textes. Le lézard entre dans la case là où elle est fissurée.

4) Pour être respecté, il faut agir. Pour agir, il faut penser. Pour penser, il faut être contre. Contre l’état de fait, contre la violation permanente des règles, contre le systeme qui nous avilit, nous appauvrit et nous étouffe.

5) La lâcheté de ceux qui nous gouvernent est symptomatique de celle des peuples qu’ils représentent. Si le peuple tchadien accepte sans broncher ce que la communauté internationale veut lui imposer comme étant la “normalité africaine”, alors nous ne devons pas perdre une seconde à le plaindre. Si par contre il se soulève contre ce passage en force outrageux, alors nous devons le soutenir, comme nous avons soutenu les Burkinabè quand ils ont éjecté le tripatouilleur de constitution et assassin Blaise Compaoré en 2014, ou les Sénégalais au mois de mars dernier.

Sinon, ce qui sera enterré aujourd’hui, ce n’est pas seulement la dépouille de Idriss Deby Itno, mais également le cadavre des espoirs de vie apaisée et meilleure de millions de Tchadiens et de Tchadiennes. Et nous le savons tous: à force de regarder ailleurs quand le feu fait des ravages chez le voisin, l’incendie finit par détruire notre propre case.

Bon week-end.

Par Nathalie Yamb 

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