Quand la femme est bien portante, qu’elle est digne, considérablement respectée et elle-même respectueuse, c’est la société elle-même qui se met en marche pourrait-on dire dans la Coutume africaine, en l’occurrence dans les sociétés bantoues de type Koôngo.
Telle est la grande interrogation de Theodulos KOUNKOU pour qui, par exemple, la femme Congolaise vivrait de nos jours par procuration.
« Elle porte des cheveux d’emprunt, comme son âme sœur qui se complet à ce qui est emprunté, du langage à l’habit qui fait sa fierté (la sape). Devenir une femme n’était aucunement une improvisation personnelle ou familiale. Dès le sein maternel, nos mères qui ne connaissaient guère l’existence de l’échographie avaient l’intuition maternelle sublime qui leur donnait des signes de probabilité qu’elles portaient un enfant de sexe féminin ou de sexe masculin. Dès lors, la future mère était préparée ou du moins, elle se préparait à accueillir son enfant, à travers un mode de vie ( les interdits, biina), de façon que l’enfant qui viendra au monde naisse avec des atouts comme la facilité du langage (ludede), etc.
Ces temps s’éloignant de notre époque tumultueuse où la femme noire (dans sa plus large majorité) semble avoir opté pour l’intra-racisme de ce qui ressemble à l’authenticité africaine. Comment supporter en effet les autres qui ressemblent à ce dont on ne veut pas être ? Une femme africaine qui se déteste elle-même et ne trouve apparemment aucune bonne raison d’avoir de l’estime pour sa personne biologique, pourrait-elle bien apprécier ou tolérer une autre, qui, comme elle, noire de peau se complait à assumer ce qu’elleest, sa noirceur ? » (P.136.)
L’auteur se veut être un justicier honnête, impartial, équitable en relevant, entre autres, et ce, à juste titre que : « Cet intra-racisme des nègres n’est pas exclusive que chez les femmes africaines qui sont mal dans leur peau. Il estsurtout pratiqué par les africains qui ont un grand faible pour les femmes au teint moins foncé, comme les métisses et un penchant fantasmatique envers les femmes blanches…. ».
Fervent partisan d’une identité digne et respectueuse de la femme africaine, Theodulos KOUNKOU, dénonce un monde et une époque des femmes postiches ?
« Des femmes qui n’ont rien à elles : cheveux d’emprunt, ongles d’emprunt, fesses et seins en silicones, dentier en or, cils de porc, lentilles de vue faire ex-femme noire aux yeux verts ou bleus. Une transmutation absurde qui dépossède, observe-t-il, la personne humaine de son être originaire. Les filles imitant leurs mères désorientées dont d’autres, inspirées par les icones de la télé réalité ou s’identifiant aux modes les plus loufoques, pour attirer le regard sur soi, incité au voyeurisme, à la séduction, etc. » (P.139.).
Cela dit, dans son remarquable ouvrage qui est d’une limpidité intellectuelle remarquée tant dans la forme que dans le fond, Theodulos KOUNKOU refuse de n’être qu’un observateur des faits ou comportements absurdes qui nuisent véritablement à la bonne image de la femme ou Mu-Kento.
Bien au contraire et ce, avec courage et sagesse, Theodulos KOUNKOU nous invite, comme le firent autrefois les Ndona-kento ou les femmes-chefs du Mont « KABA » de Mbaànza Koôngo à retrouver :
« le vrai sens de l’identité féminine dans nos sociétés et tout ira mieux. La vie, la vraie vie jaillira et l’humanité renaitra de son bourbier de déshumanisation, pour que la femme libérée du carcan de toutes les idéologies rétrogrades dans lesquelles les politiques et les religions s’acharnent à l’enfermer.
Bu Kento retentit comme un appel, un cri pour la restauration ou pour la réhabilitation, afin d’assainir la rivière de vie (Buka nto, ngatu bu kento bua fusumuka), ceci veut dire : l’humanité a tout intérêt de réhabiliter la femme dans son rôle intrinsèque de mater genitrix, la mère génitrice du « bu muntu » – d’humanisation, pour que les hommes sachent s’orienter et les doctrines et mieux orienter leurs politiques et les doctrines religieuses, dans le respect des valeurs et de l’altérité.
La maternité n’est pas exclusivement dans l’engendrement biologique, elle fait partie de la présence effective et affective de toute femme. C’est là que se trouve la raison qui fait de toute femme une maman, même si elle n’est mère ! » ( P.28.)
Ainsi, pour Theodulos KOUNKOU, la maternité est principe de vie et n’est accessible que, lorsqu’elle répond à certaines normes qui ne sont pas forcément naturelles.
Autrement dit, on ne naît pas femme tout comme on ne naît pas mère ou maman. On le devient, à la suite d’un long processus d’humanisation et de socialisation auquel autrefois, la société ancestrale mettait l’accent pour le bien et le respect de la femme. Au-delà pour le bien de la société elle-même.
C’est l’expression même du muntuïsme en matière de féminité maternelle.
C’est dire que la femme ou le Mu-Kento tout comme l’homme ou Ba-Kala est un rendez-vous de l’histoire qui s’opère par une sorte de voyage éducatif de l’être ou du mu-ntu socialement organisé et ce, en se situant inexorablement dans une dynamique en perpétuel devenir.
D’où, entre autres, dans la culture Koôngo, la signification même du nom de Ngudi qu’on attribue à la femme quand elle accède dans l’univers de la maternité. Elle est Ngudi non pas forcément par le fait qu’elle ait donné biologiquement la vie à un petit être mais encore et surtout par son répondant aux principes humains et sociaux qui devront en toute sécurité contribuer sainement tant à son évolution qu’à son épanouissement.
C’est aussi là un des aspects fondamentaux de « Bu-Kento » auquel s’est attelé remarquablement bien Theodulos KOUNKOU dans son propos.
Il s’agit là d’un joli morceau du muntuïsme sagement examiné par l’auteur qu’il est conseillé à tout lecteur de découvrir lui-même pour en apprécier la quintessence.
En somme, quand la petite rivière est bien entretenue, c’est-à-dire le Mu Kento ou la femme, c’est la société elle-même qui se valorise, s’organise, se développe, s’harmonise et ce, par la réunion et l’accomplissement, entre autres, de toutes les normes socio-humaines qui fondent sa raison même.
Rudy MBEMBA-Dya-Bô-BENAZO-MBANZULU ( Taàta N’DWENGA)
Avocat à la Cour
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