TRIBUNE. La scène de violents incidents qui se passent présentement au Capitole américain est tout simplement surréaliste. A l’issue du vote en Giorgie qui a donné la victoire à deux démocrates Raphaël Warnock et Jon Ossof, vote qui a fait basculer la Chambre des représentants et le Sénat américains à la majorité démocrate, les partisans de Trump ont carrément envahi le siège de la loi états-unien. Ils ont brisé des fenêtres et pénétré par effraction à l’intérieur du bâtiment du Capitole qui était pourtant verrouillé.
Joe Biden qui dispose désormais d’une majorité nécessaire et au congrès et au sénat pour faire passer ses réformes importantes de son gouvernement est confronté, avant son investiture du 20 janvier prochain, à l’impératif de gérer l’imprévisibilité extra- constitutionnelle de Trump et de ses troupes.
Ce qui lui reste de faire, c’est d’éviter de tomber dans les pièges de provocation de Donald Trump qui joue au piromane et pompier à la fois. Pendant qu’il fait semblant d’appeler ses partisans à la raison dans un message Twitter : “Vous devez rentrer chez vous, en paix. Vous devez respecter nos forces de l’ordre. Nous voulons que personne ne soit blessé », Trump en profite quand même pour jeter deux barils d’huile au feu : « Je sais votre peine, écrit-il à ses partisans, je sais votre douleur. Cette élection nous a été volée et tout le monde le sait ».
Après être revenu de sa décision imminente de décréter la loi martiale pour renverser les résultats électoraux, il a changé de stratégie de victimisation. En optant pour cette rhétorique de l’élection présidentielle frauduleuse, il sait sciemment qu’il ravive davantage les tensions sociales qui peuvent déboucher à des émeutes ou carrément à une guerre civile.
Comme le reconnaît lui-même Joe Biden : « Notre démocratie fait l’objet d’une d’agression sans précédent », comme président élu, il doit éviter de faire à Trump ce dangereux cadeau d’en faire une victime. Trump est entré dans une stratégie de provocation et une moindre violence verbale du camp démocrate ou une éventuelle bavure policière sur les partisans pro-Trump ne fera que faire prévaloir la thèse idéologique du « pauvre petit blanc » maltraité par la diversité culturelle qui a confisqué la majorité élective des blancs et est venue casser le rêve américain de leurs pionniers américains.
Beaucoup d’imprévu pourra se produire dans les deux semaines qui nous séparent de l’investiture du nouveau président démocrate. Et cette prise du Capitole n’est peut-être qu’un premier test de la part de Trump pour jauger la réaction du peuple. Dans les jours à venir, l’on pourra s’attendre à d’autres surprises plus désagréables.
L”Amérique sort très divisée de ce scrutin présidentiel et, à l’heure actuelle, tous les ingrédients d’une fracture sociale semblent donc réunis. Dans pareil contexte, une quelconque moindre erreur de la part de démocrates agira comme une étincelle qui peut allumer le feu d’une guerre civile capable d’embraser tout le pays. Pour un pays où le port d’armes est autorisé, personne ne leur souhaite un pareil scénario du pire!
Par Germain Nzinga (Chercheur indépendant)