Portrait: Djette Jamyness, le mixage d’abord

Dans le deejaying au Maroc, la représentation des femmes reste minimes. L’accès à la scène plus difficile pour elles que pour les hommes. Parmi ces rares passionnées du domaine, Djette Jamyness. Du haut de ses 31 berges, cette Casablancaise de souche s’est forgée une expérience artistique considérable et une renommée nationale doublée de ses performances scéniques généreuses et bien travaillées. Djette Jamyness, de son vrai nom Jamila El Fad, a baigné dans la musique dès son plus jeune âge grâce notamment à son père passionné de blues, jazz et des légendaires Nass El Ghiwane, un groupe mythique que le célébre cinéaste américain Martin Scorsese aimait à appeler Les Rolling Stones du Maroc. L’influence de son papa l’a amené à découvrir les différentes rythmiques des musiques de la diaspora. Peu de temps après, elle s’intéresse à la danse et commence une nouvelle aventure dans son parcorus artistique. De la Lock au Hip Hop en passant par différentes chorégraphies ….son engouement pour la danse l’a conduit à une série de performances dans plusieurs hôtels et pubs à Agadir de luxe dont on citera l’English Pub, Sofitel, Dreams, Tan Tan Club, Beach Club et Sahara, entre 2006-2007 où elle se chargeait également de l’animation. En 2008, Jamila se penche vers ses premières amours: le deejaying. Influencée en cela par les fameux inséparables DJ Cut Killer et DJ Abdel, qui ont brillé de mille feux dans le monde, ou encore de DJ Key, le numéro un du Maroc, elle a beaucoup appris de son compère DJ ID. Dès lors, elle tente dur comme fer à approfondir la narration de ses sets.  C’est la découverte des rave parties et des clubs.  « J’ai décidé de commencer le deejaying, plutôt côté des classiques des années 80 et 90, attirée vers l’époque funky, avec un goût prononcé pour l’old school. Mais aussi le mélange électronique et acoustique me parlait », indique-t-elle.   En parfaite autodidacte, Djette Jamyness signe ses premiers contrats professionnels. Et son futur s’annonce au beau fixe. Les dates ne manquent pas non plus. Entre 2009 et 2017, la star du deejaying made in Morocco a animé plusieurs soirées privées dans plusieurs villes dont Marrakech, Casablanca et Ifrane, entre autres. Elle enchaîne les soirées dans bon nombre d’hôtels et de pubs de la métropole en qualité de résidente  dont on retient notamment le Six PM de Hayat Regency, Sky 28 de Kenzi Tower, le Rencard, le Bazar, VIP Capitol, Picasso, le Petit Rocher, pour ne citer que ceux-là.  Aujourd’hui, et depuis 2017, elle est l’officielle djette résidente d’Al Forno de Casablanca!  Cotés platines,  comme une femme à plusieurs têtes, un clin d’œil aux mélanges de styles comme la salsa, le latino, chillout, hip hop, reggaeton, etc … Le tout en poésie. «J’aime incorporer différents styles dans un seul set pour surprendre le public, je vais vers des narrations plus osées, jamais statiques, cela fonctionne plutôt bien, à moi de savoir relever les défis. J’essaie de faire en sorte qu’il y en ait pour tous les goûts. La communion transgénérationnelle y est toujours de mise! », ajoute Jamila.   L’autre visage du métier Dans le domaine du Deejaying, la concurrence est souvent rude surtout que ses rivaux sont majoritairement des hommes. Et comme le métier est dominé par l’ossature masculine, on n’a pas l’habitude de voir une femme derrière les platines. Il y a aussi l’ombre de la société conservatrice qui plane au dessus de sa tête. Jamila le sait.  Et elle avance à pas sûrs et continue de vivre pleinement sa passion. Comme de nombreuses femmes artistes, elle doit redoubler d’énergie pour vivre de sa passion : recherches de dates qui parfois s’annulent, faire face à la concurrence de ses confrères hommes, faire valoir la vraie valeur de son travail à travers des cachets parfois difficiles à obtenir, organiser des soirées parfois… « La persévérance doit être une des pièces maitresses de ce parcours de vie. Et c’est souvent dans « l’obligation », lorsqu’on est poussé dans ses retranchements, que l’on fait le plus preuve d’inventivité. Ce qui motive bien sûr c’est la réaction du public, on est forcément baignée dans les émotions assez particulières et intenses de la prestation, entre l’euphorie, la satisfaction, le trac… et toute l’énergie que l’on reçoit. Inexorablement c’est motivant, inexorablement, on a cette petite voix qui nous dit: ne lâche jamais! », conclut-elle.  Ayoub Akil