Maroc: Un monde de travail peu organisé et faiblement protégé

En dépit des effets d’annonce, le marché du travail n’est toujours pas inclusif, si l’on en croit les chiffres du Haut-commissariat au plan (HCP) résultant de son enquête relative aux principales caractéristiques de la population active occupée en 2018.

Selon les résultats de l’enquête, qui suggèrent d’intensifier les efforts pour améliorer la situation, la population âgée de 15 ans et plus a atteint 25.950.000 personnes l’année dernière.

Si le nombre d’actifs sur le marché de travail s’est établi à 11.979.000 dont 10.811.000 pourvues d’un emploi et 1.168.000 en chômage, l’’enquête a révélé que 13.970.000 personnes étaient en dehors du marché de travail en 2018.

«Le taux d’activité a atteint 46,2%, 41,8% en milieu urbain et 53,9% en milieu rural, 70,9% parmi les hommes et 22,2% parmi les femmes. Ce taux passe de 45,7% parmi les actifs n’ayant aucun diplôme à 42,9% parmi ceux ayant un diplôme de niveau moyen, pour atteindre 55,9% parmi les actifs ayant un diplôme de niveau supérieur», a indiqué l’institution gouvernementale.

Soulignons que sur les 10.811.000 personnes actives occupées, 44,8% sont des ruraux et 23,2% sont de sexe féminin.

Des données recueillies par le HCP, il ressort aussi que le taux d’emploi a atteint 41,7% au niveau national (35,9% en milieu urbain et 52% en milieu rural), 65% parmi les hommes et 19% parmi les femmes. Elles révèlent également que les taux d’emploi les plus élevés sont observés dans les régions d’Eddakhla-Oued Eddahab (64,3%), de Marrakech-Safi (45,2%) et de Casablanca-Settat (44,5%).

En revanche, les chiffres suggèrent des taux plus bas quand il s’agit de Guelmim-Oued Noun (34,4%), de Laâyoune-Sakia El Hamra (35,9%) et de l’Oriental (36,9%).

Par ailleurs, tout en indiquant que le secteur des services emploie près de la moitié (42,4%) des actifs occupés, suivi de l’ »agriculture, forêt et pêche » (35%), de l’industrie y compris l’artisanat (11,7%) et des BTP (10,8%), le HCP a relevé la prédominance du salariat et de l’emploi individuel.

Ainsi, «près de la moitié (48,8%) des actifs occupés âgés de 15 ans et plus sont des salariés, 30,3% des indépendants, 16% des aides familiales et 2,4% des employeurs», a-t-il noté.

A propos de la qualification des actifs occupés qu’il juge de faible, le HCP a relevé que «près de 6 actifs occupés sur 10 (57,8%) n’ont aucun diplôme (6.248.000 personnes), 28,6% ont un diplôme de niveau moyen (3.091.000) et 13,6% de niveau supérieur (1.469.000)».

L’enquête qui s’est également intéressée au mode d’insertion dans le marché du travail qualifié de précaire, montre que près d’un actif occupé sur six (16,4%) exerce un emploi non rémunéré (33% en milieu rural et 3% en zones urbaines) et que près de 39,3% des femmes actives occupées travaillent sans rémunération contre seulement 9,5% des hommes. Une part qui atteint 70,5% pour les femmes rurales.

«Avec une part de 45,5%, les jeunes de moins de 25 ans sont plus touchés par le travail non rémunéré. Cette proportion est de 11,2% pour les adultes âgés de 45 ans et plus. Les non diplômés demeurent également les plus concernés par l’emploi non rémunéré avec une part de 21,2% contre 9,9% pour les diplômés», a constaté l’organisme public.

Soulignant la faible protection de l’emploi, le HCP a noté qu’un peu plus d’un actif occupé sur 4 (26,1%) bénéficie d’une couverture médicale liée à l’emploi (38% dans les villes et 11,4% dans la campagne).

Jugeant le monde de travail peu organisé et faiblement protégé, l’enquête indique que près de 6 salariés sur 10 (59,4%) ne disposent pas de contrat qui formalise leur relation avec l’employeur. Aussi, seuls 7,1% des salariés disposent d’un contrat verbal, 8% d’un contrat à durée déterminé et 24% d’un contrat à durée indéterminée.

« La part des salariés ne disposant pas de contrat s’élève à 79,7% en milieu rural contre 52,1% en milieu urbain et que cette part passe de 48,8% parmi les femmes à 62,1% parmi les hommes », selon le HCP.

Le marché de travail a également révélé que les jeunes et les non diplômés restent les catégories les plus touchées par la précarité de l’emploi, les premiers étant les plus concernés par le travail sans contrat avec un taux de contractualisation de 21,2% contre 20,8% pour les seconds.

L’autre préoccupation : les affiliations syndicales ou professionnelles. A ce propos, il apparaît que « la majorité des actifs occupés (95,7%) ne sont affiliés à aucune organisation syndicale ou professionnelle, 92,9% en milieu urbain et 99,2% en milieu rural; 95,7% parmi les hommes et 95,9% parmi les femmes », a indiqué le HCP. Et d’ajouter que 92,8% des salariés ne sont affiliés à aucune organisation syndicale ou professionnelle (91% en milieu urbain et 98,2% en milieu rural).

Enfin, le phénomène de sous-emploi touche en particulier les actifs occupés hommes, ceux n’ayant aucun diplôme et ceux exerçant dans le secteur des BTP, a noté le HCP.

Alain Bouithy

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *