Cameroun : le théâtre des bouffons politiques
HAUT-ET-FORT. Le syndrome de Stockholm. Pour l’expliquer, inutile d’ouvrir un manuel de psychologie. Racontez seulement l’histoire de Célestin Djamen : tout y est.
En 2018, il brandissait fièrement son titre de responsable des droits de l’homme au MRC, principal parti d’opposition. Aux lendemains d’une élection volée, son parti criait au hold-up électoral. Les Camerounais descendaient dans la rue, pacifiquement, pour réclamer la vérité des urnes.
Le régime, fidèle à sa tradition répressive, sortit les armes. Premier rassemblement, première balle. Djamen s’écroule, le pied transpercé, traîné devant un tribunal militaire, jeté en prison. Un martyr, croyait-on.
Mais à sa sortie, tout s’effondre. Le MRC boycotte les législatives de 2020 : adieu les rêves de strapontins. Djamen se voyait député, maire, notable. Le réveil fut brutal. La frustration se transforma en rancune, la rancune en trahison. Il claque la porte, fonde son propre parti, réduit à une cellule familiale : lui et son cousin.
Puis, miracle ! L’ancien pourfendeur du régime découvre soudainement les charmes de Paul Biya. Son discours change : du fouet au baiser, du poing levé à la génuflexion. Hier, il accusait. Aujourd’hui, il rampe. Hier, il criait « hold-up électoral ! ». Aujourd’hui, il jure fidélité au bourreau qui a failli l’amputer.
Et voilà Djamen, fraîchement enrôlé dans le fameux G20, ce club de micro-partis ventriloques, conglomérat d’aplaventristes, satellites de la mangeoire.
Le plus grotesque ? Dans une interview, il ose déclarer que Paul Biya, 93 ans, fantôme épuisé par l’âge, serait le candidat idéal pour conduire le Cameroun. Le ridicule en costume trois-pièces.
Mais Djamen n’est pas seul dans ce cirque. Dans toutes les dictatures, la récompense n’est pas le mérite, mais la servilité. Jean de Dieu Momo en est l’illustration : ex-opposant enflammé, devenu griot officiel. Et que dire du ministre de l’Enseignement supérieur, qui s’est présenté comme « la créature de Paul Biya » ? Une bassesse innommable pour un homme qui prétend encore penser.
Ces hommes ravaleront leurs vomissures pour un strapontin. Ils sacrifieront leur honneur sur l’autel d’une nomination. Leur dignité vaut moins qu’une chaise bancale dans un gouvernement fantôme.
Voilà le drame du Cameroun : une élite qui trahit pour manger, une classe politique qui vend ses convictions au rabais.
Or la politique devrait être le domaine des valeurs, pas celui du ventre. Nous devons réapprendre, coûte que coûte, que la dignité et l’honneur surpassent mille fois tous les biens matériels. Sans cela, nous resterons un peuple enchaîné aux caprices d’un vieillard et aux trahisons de ses bouffons.
Par Teddy Patou
Journaliste et animateur radio

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