Littérature : « Congo rêve solidaire, ce que dit la vision des poètes », nouvelle publication de Jean Blaise Bilombo Samba et Huppert Laurent Malanda
LIVRE. « Un grand chant de liberté s’entend dans la respiration des fleuves et des forêts, ainsi que dans les questions, les révoltes et l’espérance d’une humanité de vie et de combat. Une forte diversité a permis à ce grenier bantou de mutualiser les imaginaires des plus jeunes, des plus authentiquement féminins et féministes et des plus expérimentés pour œuvrer à une symphonie majeure autour de l’idée de nation ouverte à un universel latéral », peut-on lire sur la quatrième de couverture de cette anthologie publiée aux éditions+ en France. Quarante et huit créateurs congolais locaux et de la diaspora se sont en effet investis dans ce travail de toute beauté où la liberté, la diversité et la paix sont les maitres mots. Dans son introduction critique, Boniface Mongo-Mboussa salue Bilombo Samba avant de le présenter comme cet homme qui aurait pu passer sa vie en lamentations, mais qui a décidé de tourner le dos à la fatalité pour vivre sa destinée comme une épreuve que lui soumet la Providence pour mieux tester sa capacité de résilience. L’auteur de cette introduction précise que cette anthologie est une offrande de Bilombo Samba à ses sœurs et frères de plume, mais surtout un don précieux à sa terre natale. Pour lui, cette anthologie prolonge le travail initié par Jean Baptiste Tati-Loutard, poursuivi en 1983 par Léopold Pindi Mamonsono, puis Marie Léontine Tsibinda en 2000, avant d’être réactualisé plus tard en 2003 par le même Tati-Loutard et Philippe Makita. « Entre mémoire et horizon espéré, les poètes vont s’investir pour l’An 60 de la République du Congo, en donnant à lire les créations libres, authentiques et personnelles qui rendent compte de notre réelle existence dans toute sa complexité », fait remarquer Mongo-Mboussa citant Bilombo Samba et Malanda. Pour eux, ces réactions pourraient également témoigner de la fermentation sociale et culturelle profondément désireuse d’une maison commune de justice, de paix et de démocratie durable. Pour Mongo-Mboussa, cette anthologie à l’instar de la célèbre chanson de Jacques Loubélo « Congo » est un plaidoyer pour un Congo fraternel et prospère. Le premier poème qui est un hymne à l’An 60 est intitulé « Nous sommes le Congo ». Dans cette anthologie, les peintres de l’école de peinture de Poto-Poto ont joué un rôle important. Ils y ont placé des tableaux accompagnant des citations des poètes Tchicaya U’Tam’si, Kamb’Ikounga, Sony Labou Tansi, Amélia Néné Tati-Loutard, Mam Kandet Bourra, Philippe Makita, Jean Baptiste Tati-Loutard, Léopold Congo Mbemba et Dominique Ngoï Ngalla. Il faut également avoir un coup d’œil sur l’excellent texte d’André Patient Bokiba avec l’hymne du centenaire en musique et en parole et terre d’Afrique en musique et en parole. Dans la postface, Jean Blaise Bilombo-Samba parle du cinquantième anniversaire du Congo qui lui est apparu marquant son entrée dans le temps adulte à l’instar de toutes personnes humaines, même si pour la durée d’existence d’un territoire, cela peut paraitre anecdotique. Ainsi, pour lui, de manière opportune, soixante ans d’indépendance, cela peut paraitre de gestion postcoloniale par ses propres citoyens, cela constitue pour le Congo, un marqueur qui exige une halte d’évaluation, au regard du projet porté par la promesse des discours primordiaux d’août 1960. Il estime qu’à l’issue du déploiement communicationnel et du partage du plaidoyer au bénéfice du projet d’anthologie « Congo An 60 », 48 manières de percevoir le pays ont répondu présents. Dans « Sur le chemin de l’Appel », Bilombo Samba dit clairement que pour ordinaire et simple que cela puisse paraitre, obtenir l’adhésion des 48 créateurs pour participer au projet « Congo An 60 » a exigé patience et persévérance. Le plaidoyer de ce projet a amorcé sa circulation au mois d’avril 2020 mais ce n’est qu’à partir d’août et septembre de la même année que les contributions ont commencé à arriver. « Construire une altérité » est une des parties de cette postface de Bilombo Samba dans laquelle il dit que dans la poésie, souvent, un mot s’impose dans l’esprit d’un poète et va, en appeler un autre, un verbe, un complément et ainsi s’amorce un vers, une phrase, un poème. A son tour, un poème conduit vers un autre poème de soi-même ou d’un autre. « Congo, le rêve en commun » parle de l’esquisse d’un rêve partagé qui rend implicite l’idée selon laquelle la source et sa construction sont multiples et variées, parfois même antagoniques, car porteuses de fragments d’univers différents. Dans « Nous sommes le Congo et au-delà », plus que l’âme des poètes, c’est au-delà du cœur leur claire conscience qui s’est chargée d’accueillir les échos du réel du Congo, ses expressions culturelles et sociales autant que la dimension écologique et magique de son univers. Et une question se pose. Celle de savoir comment sortir du chemin à raccords de cette palabre. Et malgré le fait que les poètes de la présente anthologie relèvent de plusieurs générations d’âges et d’expérience, il est de bon sens de les entendre et de percevoir comme des voix d’une présence immanente et solidaire poursuivant avec des forces diverses, un idéal inclusif : le Congo comme source et rêve solidaire. Florent Sogni Zaou