La France, « le bac section covid-19 », une génération castrée!

La France, « le bac section covid-19 », une génération castrée!

Le bac n’est pas uniquement un examen national permettant d’accéder aux universités. Il a une notion beaucoup plus symbolique, marquant le rite social de la transition de l’adolescence à l’adulte. Le bac est un pèlerinage à accomplir pour en finir avec une époque passée. L’annulation par le gouvernement français de cet examen, ou plutôt de ce rite de passage, est une grave erreur. Il aurait été préférable de décaler cet examen en septembre ou octobre, voire même d’imposer une année blanche, afin d’éviter la naissance d’une génération frustrée et traumatisée à tout jamais. Depuis son admission scolaire, l’élève est destiné à passer le bac,à obtenir  « Son Propre Bac » après avoir prouvé ses capacités à travers des épreuves qui marqueraient sa vie, son histoire et celle de sa famille. Depuis son enfance, il s’imprègne detoutes les histoires possibles et légendaires de ce rite de passage, par ses parents, ses frères et sœurs, ses cousins, ses oncles et ses professeurs. De même, il regarde des films et des séries télévisées, drôles ou dramatiques, soulignant tous le phénomène et le mythe du passage du bac. L’élève monte dans le train de son cursus scolaire, en sachant tout du long qu’il ne pourra le quitter qu’à condition de réussir les épreuves du bac « le grand saut dans la gare des adultes » ! Ce saut pour lequel il a été destiné et mis en condition durant tout son trajet par ses professeurs et ses parents. Chaque année de sa vie scolaire, l’élève est impressionné par les médias qui accordent autant d’importance au bac, envers les  conditions des épreuves, le nombre de candidats, la visite des officiels du gouvernement dans les salles des examens, sans oublier le fameux sujet de philosophie discuté à la radio et à la télévision. Et le plus marquant pour lui, est que les médias n’annoncent que les résultats du bac en laissant de côté ceux du collège, du lycée ou même des doctorats. Pour lui, aux yeux de la société, le bac est plus important que tout le reste des diplômes. Durant ces 12 années scolaires, l’élève ne cesse de se projeter dans une salle d’examen de bac, puis devant les résultats affichés dans son établissement, ressentant la joie de la réussite. Le bac est une partie de l’histoire de l’élève, de sa famille, de son avenir et de ses enfants plus tard. Le bac est l’organe essentiel que l’élève doit acquérir afin de couronner la fin de son adolescence, de l’incorporer dans son identité et l’intégrer dans son corps. Hélas, la France vient de castrer cette génération en amputant cet élément tant désiré depuis le CP. Cette castration va frustrer violemment à vie cette génération de bacheliers section covid-19. Un passage facile, sans incorporation de ce qui était attendu et désiré, sans véritable douleur d’accouchement, autrement dit un bac par césarienne sous l’anesthésie du confinement. J’espère que le Maroc ne commettra pas la même erreur que la France ! Docteur Jaouad MABROUKI Psychiatre, Chercheur, Expert en psychanalyse de la société marocaine et arabe.