Mon ado fume des cigarettes, pas de paniquer !
PARLONS-EN. Un jour, les parents sentent accidentellement la cigarette sur leur ado, fille ou garçon, ou bien le surprennent avec une cigarette entre les doigts. Malgré le choc ressenti par les parents, ils ne doivent pas paniquer ni aborder le sujet tout de suite avec l’adolescent. Il n’y a pas d’urgence et les parents doivent se consulter et se préparer à discuter avec lui. Une discussion houleuse, menaçante et agressive ne fera qu’aggraver la situation, compliquer la qualité du dialogue et éloigner l’adolescent. Ce n’est pas la colère et les menaces qui convaincront un adolescent d’arrêter de fumer. Au contraire, l’adocontinuera à fumer en représailles aux violences parentales et au fait d’être traité comme un gamin. Les parents doivent savoir que l’adolescent se considère comme un « adulte », indépendant et maître de sa vie. D’ailleurs, les parents ont vécu la même expérience. La meilleure méthode de communication est d’accompagner et de canaliser l’adolescent, mais en lui laissant l’impression qu’il est maître de sa vie. Cette méthode permet à l’ado de ressentir le poids de ses responsabilités face à ses décisions. Cela le fait réfléchir et c’est exactement l’objectif que les parents devraient atteindre. Pour cette raison, les parents ne doivent en aucun cas agir comme des policiers qui enquêtent ou comme des juges qui punissent. Les parents doivent prendre le temps nécessaire pour se préparer avant d’aborder le sujet de la cigarette avec leur ado, et ils doivent se consulter, ainsi que consulter les parents qui ont vécu la même expérience avec leur adolescent, ou bien consulter un professionnel de la santé psychique. Aborder un adolescent au sujet de la cigarette dépend de deux facteurs : les parents fumeurs et non-fumeurs. 1- Parents qui fument Évidemment, si l’un ou les deux parents fument la cigarette, cela n’a aucun sens de dire à votre adolescent que la cigarette est mauvaise. Sinon, l’ado dira : « Pourquoi fumes-tu ? » et quelle réponse logique allez-vous lui donné ? Dans ce cas, le parent doit être un modèle pour être crédible. Il serait sage qu’un parent fumeur demande à son adolescent quand il peut lui parler d’un sujet important. Si l’ado dit qu’il n’est pas disponible pour le moment, son choix doit être respecté. Mais le parent lui demande quel momentlui convient. Ainsi, l’adolescent ressentira le respect des parents et suggérera clairement le jour et l’heure. Lors de la rencontre convenue, très calmement, le parent dit : « Je sais que tu essaies la cigarette et je ne te dirai pas qu’elle est mauvaise parce que je fume moi-même ». Cela permettra à l’ado de se sentir considéré et compris. Ensuite, le parent demande : « Que penses-tu que nous devrions faire? » Là, vous serez surpris car l’adolescent vous proposera « On devrait arrêter de fumer ensemble ». Ainsi la date sera fixée et l’adolescent est intègre il tiendra sa promesse à condition que le parent fumeur tienne également sa promesse. 2- Les parents non-fumeurs Dans ce cas, la situation est plus simple. Les parents suggèrent à l’adolescent lorsqu’il est disponible de lui parler d’un sujet important. Lors du rendez-vous, si l’un ou les deux parents ont essayé la cigarette pendant leur adolescence, ils doivent raconter à l’ado leur expérience et toute l’histoire ainsi que la réaction de leurs parents. Cela rassure l’adolescent car il verra que les parents ne sont pas parfaits et qu’ils sont comme lui. La vérité de l’histoire rendra l’adolescent heureux et il sentira qu’il a grandi et que les parents lui font confiance et se confessent à lui. De cette façon, nous gagnons la confiance de l’ado. Les parents lui demandent ensuite quelle est son expérience avec la cigarette : « comment te sens-tu, quel effet a-t-elle sur toi, quels avantages la cigarette t’apporte-t-elle ? ». Là, l’adolescent répondra honnêtement comme ses parents l’ont fait avec lui. Lorsqu’il raconte son expérience, les parents l’informent que c’est sa vie et qu’il est libre de faire ses choix, qu’il continue de fumer ou non, et que c’est lui qui prend la décision. Croyez-moi, avec cette façon de parler et d’échanger, l’ado décidera tout seul de ne pas continuer à fumer, car l’ado est sensible au respect et a un formidable sens de la justice, et le fait de dialoguer avec lui avec équité et respect, l’adolescentsera plus sage et capable de prendre une décision logique. Docteur Jaouad MABROUKI Psychiatre, psychanalyste de la société arabe.
Le suicide chez l’enfant et l’adolescent
TRIBUNE. J’ai remarqué ces dernières années, plusieurs publications médiatiques des cas de suicide chez les adolescents et plus particulièrement chez les enfants. Ceci suscite une douleur et une angoisse chez les lecteurs. Ainsi, j’ai vu qu’il est important de clarifier ce phénomène. 1- Quelques chiffres L’enfant ne peut pas concevoir la mort comme un phénomène irréversible avant 6 ans. En France un chiffre de 30 à 100 enfants se tuent chaque année mais on peut penser qu’un grand nombre d’accidents sont des analogues suicidaires et donc il est impossible de parler de suicide, car l’enfant ne peut en aucun cas avoir la même conception de suicide comme celle qu’on trouve chez l’adolescent et l’adulte. Par contre chez l’adolescent de -14 ans, le nombre de suicide, en France, est variable en fonction des années, par exemple en 2000 « 44 cas », en 2008 « 26 cas », en 2011 « 41 cas », en 2014 « 30 cas ». Donc il est difficile de dire que le nombre augmente, peut être c’est une impression suite à la quantité de publications des cas de suicide dans les médias! 2- Le suicide chez l’enfant Chez l’enfant on parle de « se donner la mort » et non de « suicide ». Il peut survenir suite à un passage à l’acte impulsivement sans aucune évaluation des véritables risques de perdre la vie. Ce passage à l’acte impulsivement peut être une solution à ses problématiques scolaires ou relationnelles ou familiales ou affectives. Il est difficile pour nous professionnels, d’imaginer que le suicide chez l’enfant est un acte réfléchi et prémédité. Aussi dans le même contexte, se donner la mort, peut être un accident en voulant imiter un héros ou un membre de la famille suicidé par exemple. Il peut survenir aussi dans un contexte dans lequel se confondent le jeu, l’aventure et l’insouciance. 3- le suicide chez l’adolescent Chez l’adolescent, se donner la mort peut être impulsif sans contrôle ou bien un passage à l’acte suite à une crise de colère, ou bien subir une grande injustice ou une rupture sentimentale ou encore une trahison. Chez l’adolescent, on peut parler de suicide prémédité et voulu et planifié face à une détresse affective, le plus souvent dans une relation pathologique avec ses parents 4- facteurs révélateurs du risque de suicide chez l’enfant Nous ne disposons pas de réelles études cliniques pour évaluer les risques de suicide chez l’enfant, du fait que l’enfant n’a pas encore une maturité intellectuelle et affective suffisantes pour exprimer sa douleur et sa dépression par exemple. Encore plus difficile, car l’enfant se donne la mort d’une manière impulsive et non réfléchie. 5- symptômes révélateurs de la probabilité de suicide chez l’adolescent Nous avons des signes cliniques suffisants pour évaluer le risque suicidaire réfléchi et impulsif. Raison pour laquelle nous restons toujours très vigilants sans aucune sous-estimation de ce risque au point où personnellement, je considère tout ado est exposé au risque de suicide et même devant des problématiques banales à nos yeux. Parmi ces facteurs révélateurs nous notons, l’isolement, la désocialisation, le désinvestissement scolaire, la négligence de son hygiène, la tristesse, l’amaigrissement ou la prise de poids, les crises de colères ou l’absence de l’autodéfense, l’effacement, trop ou peu de sommeil, les antécédents familiaux de suicide, difficultés scolaires et relationnelles, des idées de mort, une joie ou une tristesse excessive par exemple. Devant ces symptômes, il est impératif de consulter un spécialiste. 6- l’âge d’apparition de suicide L’enfant ne pense pas au suicide en tant que tel, mais plutôt au désir de mourir et il ne peut concevoir le suicide et le planifier qu’à partir de 10-12 ans à peu près. 7- parler du suicide avec les enfants et les ados Nous savons que les enfants, par le biais des réseaux sociaux, s’intéressent à ce phénomène qui reste mystérieux pour eux, sachant que l’enfant est attiré par le mystère de toute chose. Les parents doivent parler du suicide comme une disparition définitive qui provoque du chagrin pour eux, car ils aiment fort leurs enfants. Ils doivent leurs expliquer, que quelques soient les raisons, ils sont là et ils sont capables de les résoudre afin de continuer de vivre ensemble, car les gens qui nous aiment ont besoin de nous. Insister aussi sur le fait que s’ils parlent aux proches, au médecin de famille et à la maitresse de leurs difficultés et souffrances, ils pourront être aidés par eux et rester en vie à coté de ceux qui les aiment. Les parents doivent être très proches de leurs enfants, présents, passer du temps avec eux et jouer beaucoup avec eux. Nous devons leur exprimer notre amour sans réserve et être réellement présents dans leur vie en s’intéressant à leur monde, à leurs amis, à leurs problèmes avec leurs camarades et ne pas considérer ceux-ci sans aucun intérêt « trucs d’enfants ». Leurs expliquer que chacun de nous a ses problèmes selon son âge et nous les vivons tous avec douleur. Les parents doivent être prudents de ne pas considérer le chagrin de l’enfant suite à une dispute avec ses amis par exemple, n’est rien devant le chagrin de la perte d’emploi chez l’adulte, il s’agit toujours du chagrin. Le fait de s’intéresser à l’enfant de cette manière, consolide les liens d’amour et imbibe l’enfant d’affection. C’est le fait d’être aimé qui donne un sens à la vie. Docteur Jaouad MABROUKI Expert en psychanalyse de la société marocaine et arabe