Peinture : Danièle Bokino ; «Pas de projet pour le Congo par manque de contacts»

Née le 12 Septembre 1967 à Pointe Noire au Congo et titulaire du baccalauréat, Danielle Bokino a fait des études à l’Ecole Départementale d’Arts Appliqués de la Gironde ; à l’Ecole d’Architecture de Bordeaux et l’Ecole des Beaux-Arts de Bordeaux. Elle prend part, du 15 mai au 2 juin 2017 à Bordeaux en France aux côtés de Dalila Dalléas Bouzar, Agnès Torres, Diako, Mohamed Thara et Paulin Zoffoun, à une exposition représentant une diaspora qui essaime le monde entier, en mouvement entre plusieurs continents. Elle a accepté de répondre aux questions de pagesafrik.info. Elle déplore à cet effet, le manque de contact au pays, ce qui ne lui permet pas d’y envisager une quelconque activité artistique.

Pagesafrik : Pouvez-vous nous informer sur la nature de l’événement en perspective à Bordeaux ?

Danièle Bokino : Cet évènement a pour but de mettre en lumière la scène artistique africaine, de promouvoir la richesse et la diversité de la création contemporaine d’une Afrique plurielle et accessible au monde, à travers une sélection d’artistes issus du continent africain de de sa diaspora. C’est un travail d’éclairage sur l’énergie et la fertilité créative du Continent Mère.

Pagesafrik : Quelle est votre audience au Congo et en France ?

Danièle Bokino : Je n’ai aucune audience dans mon pays, le Congo, encore moins en Afrique. Toutes mes tentatives sont restées lettres mortes… Comme vous le savez parfaitement, il faut user de courbettes et de diverses caresses dorsales toujours dans le sens…pour ouvrir certaines portes sur le continent. Je n’ai pas sacrifié à ces usages.

En France, intégrée dans des structures culturelles mixtes, j’ai été régulièrement sollicitée pour exposer dans le cadre de manifestations collectives et individuelles. Je travaille aussi en collaboration avec des artistes parisiens ainsi qu’en Allemagne.

Pagesafrik : Quel est votre ou vos thème (s) de prédilection ? A-t-on une idée de votre source d’inspiration des terres congolaises ?

Danièle Bokino : Notre Continent Mère est ma principale source d’inspiration mais aussi par les différents pays abritant les afro-descendants…Les pays, comme le Vietnam, ou le Venezuela m’inspirent beaucoup. Je suis admirative de leur auto détermination malgré la noirceur de l’actualité qu’on nous présente. Comme nous le savons, ces mouvements sont provoqués, orientés avec pour finalité leur destruction : l’onde de choc est censée servir d’exemple pour anéantir leur aspiration à la souveraineté. Bref, la lutte est aussi dans mon art. Les problèmes économiques, sociaux et financiers, tels que l’immigration de masse, les différents traités de libre échange, les fonds vautours, les massacres au Kivu, Boko haram, le Soudan scindé, l’esclavage…animent mon inspiration. Mes toiles sont souvent perçues comme des supports d’investigation ; elles interrogent, inquiètent, poussent la réflexion, dérangent et déstabilisent parfois. Et c’est le but recherché !

Pagesafrik : Envisagez-vous une exposition de vos œuvres dans l’une des villes du Congo ?

Danièle Bokino : Je n’ai pour l’instant aucun projet par manque de contacts.

Pagesafrik : Quels rapports entretenez-vous avec la peinture et depuis combien de temps y êtes-vous ?

Danièle Bokino : La peinture habite ma vie depuis ma plus tendre enfance. Ma maman m’y a toujours encouragé

Pagesafrik : Peut-on avoir une idée de l’accord qui vous lie à la structure organisatrice de l’événement ?

Danièle Bokino : Je fais partie du Collectif Annexe B de MC2A (Migrations Culturelles) sous la responsabilité de Guy Lenoir, homme de culture, metteur en scène, africain de cœur

Pagesafrik : Peignez-vous pour faire passer un message ou juste pour vous défouler ?

Danièle Bokino : Actuellement mon travail s’oriente plus sur l’immigration et l’esclavage.

Le spectacle de mes frères désespérés fuyant l’instabilité, la répression militaire et bravant les océans me révolte au plus haut point. Quant à l’esclavage, nous n’en sommes toujours pas sortis. Toute la fierté et la dignité d’un continent sont à reconquérir.

Pagesafrik : Comment pressentez-vous l’avenir de ce que vous faites ?

Danièle Bokino : J’espère aider à l’éveil des consciences pour une nouvelle Afrique, que nos enfants n’aient pas honte de leur origine et de leur couleur et surtout qu’ils puissent s’édifier avec des images positives de leur continent. Pour ce faire, je recommande l’enseignement des humanités classiques africaines dans les écoles.

Pagesafrik : Quelles actions menez-vous pour attirer des jeunes et particulièrement des jeunes filles vers ce métier que vous exercez ?

Danièle Bokino : J’ai participé à des animations en milieu scolaire pour sensibiliser les enfants à l’art. En ce qui concerne les jeunes filles je conseillerais plutôt vers les métiers scientifiques ou techniques, une formation solide est toujours nécessaire dans le milieu artistique. Ma participation à la vie associative notamment au sein de MC2A y contribue.

Propos recueillis par Florent Sogni Zaou

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