S’il est une auteure qui a marqué et qui marque encore la littérature de jeunesse, c’est Adèle Caby-Livannah. Avec plusieurs titres à son compte chez l’Harmattan, aux éditions Oskar Jeunesse et à la Doxa Edition, elle vient de publier cette année son dernier opus intitulé Cissé Diallo et les écrans de la discorde aux éditions Chrysogone. Plongée dans ce livre où se manifeste le choc des cultures sur fond du numérique.
Profitant de ses congés, Cissé Diallo se propose d’aller rendre visite à la famille restée au pays. Et ce séjour en Afrique de quatre mois paraît long pour les enfants qui révèlent leur inquiétude. Quatre mois d’absence qui pourraient empiéter sur leurs activités extrascolaires comme le signifie la petite Haby : « Quatre mois ? C’est beaucoup trop long ! Et qui va me conduire aux séances d’entrainement de judo ? » (p.7). Mais Cissé Diallo, homme responsable et bon chef de famille, a tout prévu pour que les enfants passent de bons moments à son absence : « Voilà, vous avez un ordinateur flambant neuf, des Dvd, deux tablettes pour les jumeaux et des Smartphones » (p.10). De ce voyage de leur père pour l’Afrique, les enfants découvrent une réalité implicite des us et coutumes de leurs parents. Ils constatent moult visites amicales à leur domicile, particulièrement les vieux et jeunes originaires du village de leur père, transportant courriers et colis à remettre aux parents restés au Mali.
Mais quelle ne sera pas sa surprise quand, Cissé Diallo, de retour de son pays, va remarquer la déconfiture qui a gagné sa famille à son absence : l’ordinateur, les Smartphones et autres objets électroniques ayant pris le dessus sur la conduite des enfants, mettant mal à l’aise sa femme. L’harmonie d’avant son voyage s’est évaporée et il remarque que la conduite des enfants a changé : « Lorsqu’ils rentrent de l’école, ils se jettent sur les écrans et s’enferment dans leur chambre » (p.14). Et quand sa femme lui annonce le mauvais comportement de leurs enfants qui, sans cesse, se disputent à cause des écrans, car ayant été convoquée plusieurs fois à l’école de leur fille Fatou pour mauvaise conduite, Cissé Diallo décide se faire aider par sa cousine Kaloucha qi travaille dans le social au Havre.
Tout est bien, qui finit car l’harmonie reviendra au sein de la famille. Les parents vont fréquenter les ateliers sociolinguistiques pour l’apprentissage du français tout en s’inscrivant aux ateliers numériques pour se familiariser avec l’ordinateur. Fatou qui vient de quitter la maison à cause de l’intransigeance de son père, se voit « redressée » par son amie Myriam. Aussi grâce à une certaine Hélène Serbier, amie de Kaloucha qui a eu une discussion avec Fatou et son père Abdou, l’ambiance revient dans la famille et des règles sont établies : « Quelques mois plus tard le travail entrepris par Hélène Serbier avec la famille Diallo a commencé à porter ses fruits (…). Le climat est devenu plus serein. Les règles établies sont scrupuleusement respectées » (p.28).
Cissé Diallo et les écrans de la discorde, un texte simple et agréable à lire avec un récit qui semble créer un pont entre parents immigrés encore accrochés aux us et coutumes de l’Afrique et les et les enfants qui vivent en France sont plus tournés vers le numérique.
Du style, le texte accompagné de quelques illustrations se construit largement avec les temps du discours (présent, passé composé) pour être plus près du lecteur, pour être actuel, plus près des enfants. Avec ce livre, Adèle Caby-Livannnah confirme la place prépondérante qu’elle occupe dans la littérature de jeunesse, une littérature qui se veut pédagogique et didactique.
Noël Kodia-Ramata
Avec Afrique Education (n°466-467 de Juillet-Août 2018).