L’ISCAE planche sur l’entrepreneuriat et le développement des PME

Institut supérieur de commerce et d’administration des entreprises (ISCAE) a abrité, les 9 et 10 décembre, la deuxième édition de son Colloque international de recherche sous le signe « L’Entrepreneuriat et le développement des PME dans le monde ».
« Le choix de ce thème de recherche s’inscrit dans la tendance générale des discours officiels et des stratégies des écoles de commerce, à développer un état d’esprit entrepreneurial, à étudier les spécificités des PME, les conditions de leur échec ou de leur développement, les problématique de financement, de transmission d’entreprises familiales et d’internationalisation », a indiqué dans son allocution d’ouverture Nada Biaz, directrice générale du Groupe ISCAE.
« Cet intérêt manifeste porté à l’entrepreneuriat et à la PME met aussi en avant l’importance de l’innovation et de l’évolution de l’état d’esprit et du leadership dans les PME», a précisé la DG.
Organisé par la Direction développement et recherche du Groupe ISCAE, sous la responsabilité de Tarik El Malki, en partenariat avec le Groupe ISM-Dakar et l’Association internationale de recherche en entrepreneuriat et PME, ce rendez-vous a pour objectifs de faire un état des lieux et valoriser la recherche sur l’entrepreneuriat et la PME au Maroc et dans le monde; établir un benchmark sur les modèles de gestion des PME à travers le monde ainsi qu’identifier les bonnes pratiques en matière de gestion des PME au Maroc et dans le monde.
Au cours de son intervention, Nada Biaz a précisé qu’il s’agit d’une rencontre entre professeurs et chercheurs marocains de l’ISCAE et d’autres établissements nationaux ainsi que leurs collègues professeurs et chercheurs venus de l’étranger pour assister à des présentations et, pour certains, présenter des communications de recherche en matière d’entrepreneuriat et de développement de la PME dans le monde.
A la tête d’une délégation de huit enseignants chercheurs, Abdul Alpha Dia, directeur de recherche du groupe ISM de Dakar a, pour sa part, déclaré que l’Institut supérieur du management qu’il représentait à ce colloque et l’ISCAE sont « deux institutions qui pensent que l’un des défis majeurs que doit relever l’Afrique, c’est celui de la formation des ressources humaines. Par conséquent, les écoles de formation ont un rôle important à jouer dans ce domaine. »
Dans sa communication, le chercheur sénégalais a indiqué que l’ISM réfléchit en interne « à la fois sur les recherches liées à l’entrepreneuriat-PME, mais également aux stratégies par lesquelles nous pourrons développer l’entrepreneuriat. C’est la raison pour laquelle, tous nos étudiants ont obligation à la fin du programme du cycle Bachelor de créer une entreprise, une façon pour notre institut de renforcer l’entrepreneuriat au Sénégal », a-t-il dit.
De son côté, Salah Koubaa, vice-président de l’AIREPME (Association internationale de recherche en entrepreneuriat et PME), a évoqué un certain nombre d’indicateurs attestant du rôle de la PME dans le développement économique et social aussi bien dans les pays développés qu’en voie de développement.
A ce titre, il a indiqué qu’« en Europe, les statistiques montrent que les PME sont responsables de plus des 2/3 des emplois et contribuent à plus de la moitié du chiffre d’affaires du secteur privé européen. Au Canada, ces entreprises représentent 45% du PIB et 60% des emplois. En Afrique du Sud, pays émergent, les PME contribuent aux alentours de 50% du PIB du pays, génèrent environ 40% de la production et accueille plus de 60% du total emploi ».
Citant le cas de la Tunisie, un pays qui a à peu près le même modèle de développement que le Maroc, il a indiqué que « les PME contribuent aussi à raison de 2/3 aux activités économiques, soit 65% des emplois » alors que « les PME turques comptent pour 77% d’emplois, 27% d’investissement et 38% de la valeur ajoutée ».
Le Maroc ne fait pas d’exception, a-t-il assuré. Selon Salah Koubaa, « la PME fait plus de 95% des entreprises et plus de 50% de main-d’œuvre ». Par rapport aux pays mentionnés, il note en revanche une exception en ce qui concerne le Maroc. Et pour cause, « la valeur ajoutée, la contribution au PIB reste en deçà des aspirations ». N’empêche, il a estimé que « la PME ne doit pas être considérée comme étant une grande entreprise en miniature ».
Tarik El Malki a, pour sa part, attiré l’attention de l’assistance sur un certain nombre d’indicateurs alarmants qui concernent le Maroc. Prenant le cas du chômage des jeunes qui a atteint aujourd’hui des niveaux alarmants, le président du Comité d’organisation du colloque et directeur du développement et de la recherche scientifique du Groupe ISCAE, a rappelé que « nous sommes à peu près à un taux de chômage à 40% pour des jeunes de 15 à 24 ans ».
Autres indicateurs relevés dans sa communication, « des taux de croissance qui s’amenuisent de manière structurelle, des indicateurs macroéconomiques qui virent au rouge de manière de plus en plus dramatique au Maroc et à l’étranger ». Un tableau peu idyllique qui l’a amené à insister sur la nécessité pour les pouvoirs publics de comprendre que « les vecteurs de création d’emploi de demain sont des TPME d’aujourd’hui » et que « les TMPE d’aujourd’hui seront les PME de demain ». Tout cela pour souligner également que « le secteur privé, à mon sens, de moins en moins sera un facteur d’absorption de dizaines de milliers de jeunes lauréats qui arrivent tous les ans sur le marché du travail».
Tarik El Malki assure toutefois que beaucoup de choses ont été faites depuis une quinzaine d’années en la matière. « Le Maroc a fait le choix très tôt du libéralisme économique avec tout ce que cela implique comme capacité pour les pouvoirs publics de mettre en place des écosystèmes entrepreneuriaux. Un certain nombre de choses ont été accélérées ces 15 dernières années à la faveur de mesures emblématiques », a-t-il rappelé. Avant de citer quelques exemples de réalisations, telles que la mise en place de la charte sur la PME, la mise en œuvre de politiques sectorielles en la matière, Emergence, le Plan d’accélération industrielle aujourd’hui. Dans d’autres secteurs d’activité, notamment l’agriculture, sur le plan institutionnel et réglementaire, le statut d’auto-entrepreneur.
Cependant, «force est de constater que sur le terrain, ces politiques extrêmement volontaristes, ambitieuses ne se sont malheureusement pas traduites par un impact sur le plan économique et social à la hauteur des ambitions du Maroc».
Outre le taux de croissance prévu pour 2016, le chômage des jeunes qui ne cesse d’augmenter, « notre compétitivité industrielle et la compétitivité à l’export ne s’améliorent pas, car le positionnement stratégique à l’international du Maroc n’est pas de nature à refléter les efforts publics qui sont faits ». Sans parler des indicateurs économiques et macroéconomiques traditionnels tels l’endettement et le déficit, entre autres.
Ainsi, malgré l’amélioration de la position du Maroc dans les classements internationaux comme Doing business, « toutes les études montrent qu’un certain nombre d’écueils demeurent et qui doivent être surmontés assez rapidement », a-t-il constaté.
Le premier étant le financement des jeunes porteurs de projets, le deuxième est lié à la problématique de la mal gouvernance des PME à travers une certaine forme d’opacité dans la gestion et le troisième élément, qui l’interpelle en tant qu’universitaire, c’est l’absence ou la faiblesse de la culture entrepreneuriale de étudiants.
Soulignons que plusieurs responsables des secteurs publics et privés concernés par la thématique de l’entrepreneuriat au Maroc ont pris part à cette rencontre. Parmi eux, les représentants du ministère de l’Industrie, du Commerce, de l’Investissement et de l’Economie numérique, de la CGEM, du secteur bancaire et de plusieurs universitaires dont des enseignants-chercheurs, doctorants ainsi que de nombreux étudiants.
Il est à souligner que ce colloque a vu l’organisation de plusieurs tables rondes thématiques portant sur « le financement de l’innovation au Maroc »; « le rôle de l’agence Maroc PME dans le développement et la promotion de l’entrepreneuriat au Maroc »; « l’importance du classement du Maroc dans le Doing Business et l’impact sur la compétitivité des PME ».
Pour rappel, l’ISCAE organise régulièrement des événements scientifiques, culturels et professionnels afin de faire de cet établissement un lieu privilégié de rencontres entre les mondes académique, professionnel, environnemental, économique et social.
Le mois dernier, le prestigieux établissement a organisé la 32ème édition du Carrefour du manager qui a été une excellente opportunité d’échange entre les étudiants et les entreprises.
nada-biaz-iscaeNada Biaz, DG du Groupe ISCAE
Etre également dans la création et la co-création de la connaissance

L’ISCAE a toujours été un lieu de rencontre entre les différents mondes académiques et professionnels, mais également, depuis la création de l’Ecole doctorale, par la convergence non seulement du monde académique de l’enseignement supérieur du management et du monde professionnel, mais aussi du monde de la recherche. Parce que notre rôle n’est pas simplement de partager la recherche, mais également d’être dans la création et la co-création de la connaissance.
Le choix de ce thème n’est donc pas fortuit parce qu’aujourd’hui dans les business cool il y a un certain nombre de tendances stratégiques; notamment tout ce qui est transition digitale, internationalisation, un certain nombre de paradigmes dont le développement, l’encouragement de l’entrepreneuriat, le développement de la culture PME et le développement durable.
Donc, les thématiques de grands événements phares du groupe ISCAE cette année ont tourné autour de celles-ci. Notamment le « Carrefour du manager » qui a eu lieu en novembre dernier qui s’est intéressé au volet du développement durable.
Pour la recherche, nous avons pensé justement à traiter une thématique également d’actualité et qui est aujourd’hui au cœur de l’enseignement supérieur du management à tel point qu’aujourd’hui, que ce soit dans les programmes grandes écoles ou dans les programmes licence, les matières de l’entrepreneuriat et de la transversalité de l’esprit entrepreneurial se trouvent au niveau des premières années de l’enseignement supérieur du management. C’est pourquoi nous avons invité un certain nombre de personnalités qui font partie de l’écosystème de l’entrepreneuriat et de la PME.

tarik-el-malki-iscaeTarik El Malki, Président du Comité d’organisation du colloque

Trouver les meilleures solutions pour
développer le tissu de nos TPME au Maroc Ce colloque a un certain nombre d’objectifs. D’abord faire un état des lieux de l’existant en matière de politique publique incitative à la promotion de l’entrepreneuriat au Maroc et dans le monde, connaissant donc l’importance du développement du tissu entrepreneurial composé de TPME (très petites et moyennes entreprises) en termes de génération de croissance, de PIB et de création d’emplois.
Donc l’idée, c’est d’étudier un peu les modèles qui marchent, notamment les modèles asiatiques qui ont basé leur développement économique sur des écosystèmes qui prennent en considération l’existence de grands groupes autour desquels se développe un écosystème des TPME en termes de co-traitance, de sous-traitance et de fournisseur.
Le deuxième aspect, c’est de voir dans quelle mesure les pouvoirs publics doivent redoubler d’efforts en matière de compétitivité de nos PME et de création de très petites entreprises dans des secteurs porteurs.
Le troisième et dernier objectif concerne la recherche, parce que c’est un colloque scientifique. L’idée c’est de faire un état large sur la recherche en matière entrepreneuriale, sachant que c’est un courant de pensée qui s’est développé relativement récemment sous l’égide d’un certain nombre de penseurs et d’économistes. Donc nous avons regroupé plus d’une centaine de chercheurs au Maroc et dans le monde pour justement contribuer à la réflexion sur ce nouveau courant de pensée qui ne cesse de prendre de l’ampleur.
A travers les trois tables rondes thématiques que nous organisons, l’idée c’est aussi de faire rencontrer l’ensemble des membres de l’écosystème entrepreneurial, des professionnels, des universitaires et banquiers afin de trouver les meilleures solutions pour voir dans quelle mesure nous pouvons développer le tissu de nos très petites et moyennes entreprises au Maroc.
Les sujets traités ont été principalement le financement de l’innovation, sachant que beaucoup de porteurs créateurs d’entreprise bloquent sur cette problématique structurelle. Le deuxième thème qui a été développé est lié aux politiques d’accompagnement des pouvoirs publics en matière de création d’entreprise et de développement de celle-ci. Le troisième et dernier niveau, c’est tout ce qui est lié à l’environnement des affaires et dans quelle mesure il peut contribuer à améliorer la compétitivité des TPME.
Sur le plan de la recherche, un certain nombre d’ateliers ont été organisés pour permettre aux chercheurs de débattre et de discuter d’un certain nombre de thématiques qui sont elles-mêmes liées aux thématiques que je viens de mentionner.
Propos recueillis par Alain Bouithy

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