L’ONU a exprimé sa vive inquiétude jeudi concernant les informations lesquelles les forces israéliennes ont attaqué le complexe médical Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, moins d’une semaine après avoir attaqué l’hôpital Al Amal, à l’ouest de Khan Younis.
L’armée israélienne a confirmé jeudi dans un message sur X que ses forces spéciales avaient mené ce qu’elles ont appelé une « opération précise et limitée » à l’intérieur de l’hôpital Nasser, le plus grand établissement de santé fonctionnel de la région.
Dans un message sur X mercredi, Tedros Adhanom Ghebreyesus, chef de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a exprimé son inquiétude face à la situation de plus en plus désastreuse à l’hôpital. « L’accès à l’hôpital reste bloqué – il n’existe aucun couloir sûr pour ceux qui en ont besoin. Deux missions de l’OMS ont été refusées au cours des quatre derniers jours et nous avons perdu le contact avec le personnel de l’hôpital », a déclaré le chef de l’OMS.
Il a appelé à l’accès humanitaire et à la protection des hôpitaux par tous les combattants, soulignant qu’ils doivent rester sûrs pour les civils.
Série d’attaques
Jeudi, une porte-parole du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), Ravina Shamdasani, a également exprimé sa profonde préoccupation.
« Ce raid intervient après un siège d’une semaine qui a interrompu l’approvisionnement en médicaments, en nourriture et en carburant », a dit Mme Shamdasani, dans une note à la presse. « Les forces israéliennes auraient ordonné le transfert de tous les patients, y compris ceux des unités de soins intensifs et des crèches, vers un autre bâtiment, exposant les patients à de graves risques, notamment un risque de décès pour les plus vulnérables. Il existe des informations non confirmées faisant état de détentions et de mesures prises contre ceux qui tentent de quitter l’hôpital ».
La porte-parole a observé que le raid semble faire partie d’une série d’attaques menées par les forces israéliennes contre des infrastructures civiles essentielles à la survie de Gaza, en particulier des hôpitaux. « Notre Bureau a documenté des raids similaires dans la ville de Gaza, au nord de Gaza, au centre de Gaza et à Khan Younis, avec de graves conséquences pour la sécurité des patients et du personnel médical, ainsi que des civils hébergés dans ces installations », a-t-elle dit.
« Avec près de 70.000 personnes blessées au cours de ce conflit et un système de santé presque effondré en raison des attaques contre les installations et des restrictions imposées aux fournitures humanitaires essentielles, l’impact sur les civils est épouvantable », a-t-elle ajouté, précisant que les installations médicales sont des infrastructures protégées par le droit international humanitaire.
« Elles ont droit à une protection particulière et ne doivent pas faire l’objet d’attaques ni être utilisées en dehors de leur fonction humanitaire pour des actes préjudiciables à l’ennemi. Même si Israël prétend qu’un établissement médical a perdu sa protection parce qu’il a été utilisé pour des actes préjudiciables aux forces israéliennes, il doit néanmoins respecter les principes de précaution et de proportionnalité. En outre, Israël, en tant que puissance occupante, a le devoir d’assurer et de maintenir des installations et des services médicaux dans tout le territoire occupé, y compris la bande de Gaza », a encore dit la porte-parole du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.
Plus du tiers des écoles directement touchées
Alors que l’armée israélienne poursuit ses attaques sur Gaza et menace de mener une offensive dans la ville de Rafah, les Nations Unies ont indiqué jeudi que plus de 30% des bâtiments scolaires ont été directement visés par des frappes aériennes israéliennes dans l’enclave palestinienne.
Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU, près de 400 écoles (80% de l’ensemble des bâtiments scolaires de Gaza) ont été endommagées, dont plus de 140 ont subi des dégâts importants ou ont été détruites. Dans ce lot, plus d’une vingtaine d’écoles ont été complètement détruites.
Cette alerte d’OCHA intervient alors que « des dommages aux infrastructures civiles continuent d’être signalés dans la bande de Gaza, notamment aux bâtiments résidentiels, aux écoles, aux hôpitaux, aux routes, aux cimetières, ainsi qu’aux installations d’approvisionnement en eau et d’assainissement ».
Les gouvernorats du Nord, de Gaza et de Khan Younis visés
Les gouvernorats du Nord, de Gaza et de Khan Younis ont été particulièrement touchés, représentant 75% de toutes les écoles endommagées. Au total, ces écoles accueillaient auparavant quelque 460.000 enfants et plus de 17.000 enseignants, a précisé l’ONU relevant que plus de la moitié des écoles de Gaza nécessiteront une reconstruction complète ou une réhabilitation majeure.
Face à ces destructions, plus de 625.000 élèves et près de 23.000 enseignants de la bande de Gaza ont été touchés par les fermetures d’écoles et les attaques contre l’éducation, les privant ainsi d’un accès à l’éducation ou d’un lieu sûr.
« Selon le ministère de l’Education, au 6 février, plus de 4.851 élèves et 239 membres du personnel éducatif ont été tués et plus de 8.227 élèves et 836 enseignants ont été blessés dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre », a détaillé l’OCHA dans son dernier rapport de situation.
Une évaluation des dommages dérivée de satellites, avait révélé qu’au moins 55% des 563 bâtiments scolaires ont été soit directement touchés, soit confirmés comme endommagés, selon un décompte effectué le 10 février dernier par le volet éducation. Environ 90% de tous les bâtiments scolaires de Gaza sont utilisés comme abris pour les personnes déplacées et/ou ont subi des dommages plus ou moins importants.
L’ONU fait tout son possible pour aider les civils
En réponse à cette situation, les partenaires humanitaires ont apporté depuis octobre dernier, un soutien psychosocial et un apprentissage d’urgence à plus de 135.000 élèves et enseignants. L’aide porte aussi sur des fournitures, des activités récréatives et des sessions de sensibilisation dans les gouvernorats de Deir al Balah, Khan Younis et Rafah. La plupart des réponses en la matière sont fournies par des partenaires locaux.
Outre des activités d’éducation non formelle avec les enfants déplacés menées par l’UNICEF, les groupes sectoriels de l’éducation et des abris mènent conjointement des activités de plaidoyer pour mettre en évidence les effets dévastateurs de la situation actuelle à Gaza sur les enfants et les liens inextricables entre les abris et la scolarisation.
Au total, l’ONU continue à faire tout son possible pour aider plus d’un million de civils dans le sud de Rafah et dans tout Gaza.
Plus largement, les dernières données du Centre satellitaire des Nations Unies (Unosat), 30% des structures de la bande de Gaza ont été détruites ou ont subi des dommages sévères à modérés, les gouvernorats de Gaza et de Khan Younis ayant connu la plus forte augmentation des dommages en janvier 2024 par rapport à novembre 2023.
Plus d’un million de déplacés entassés à Rafah
En décembre 2023, l’UNICEF a signalé qu’au moins la moitié des installations d’eau, d’assainissement et d’hygiène ont été endommagées ou détruites à Gaza. L’UNRWA signalait pour sa part que 152 de ses installations ont été endommagées dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre, y compris des locaux fournissant des abris aux personnes déplacées.
Ces raids sur les infrastructures interviennent alors que les frappes aériennes sur Rafah, la ville la plus méridionale de Gaza, et les déclarations des responsables israéliens ont renforcé les craintes d’une éventuelle invasion terrestre à Rafah, où plus d’un million de personnes sont entassées dans un climat d’insécurité et de grave pénurie d’abris, de nourriture, d’eau potable et de soins médicaux.
A ce sujet, l’OCHA rappelle que des mouvements de population de Rafah vers Deir al Balah et le camp de réfugiés d’An Nuseirat ont été signalés, suite à l’intensification des frappes aériennes sur Rafah.
Mardi après-midi, Martin Griffiths, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, a prévenu que plus de la moitié de la population de Gaza, soit plus d’un million de personnes, est entassée à Rafah, regardant la mort dans les yeux, avec très peu de nourriture, presque pas d’accès aux soins médicaux et sans endroit où dormir ni aller en toute sécurité.