L’ouvrage Côte-d’ivoire. De l’impasse au chaos : quelle issue ? a été publié aux éditions l’Harmattan-Congo en 2011 par Géo-Ecostrapol (géoéconomique, géostratégique et géopolitique), un cabinet d’analyse basé à Pointe-Noire en République du Congo. Cet essai d’analyse pratique et d’un sujet très actuel, a été dirigé par le Ministre Anatole Collinet Makosso, et a connu la participation de MM. Roger Yenga, Francky Loemba, Michel Mongo, Méthode Goma, Sydney Adona et Eddie Tambwe. Il s’agit précisément d’une réflexion multidimensionnelle et multiforme sur la crise qu’a connue la Côte-d’ivoire à la sortie des élections de 2010. L’ouvrage tente de retracer les faits et les causes de ce conflit postélectoral tout en proposant des pistes de solution.
- La crise ivoirienne : des causes lointaines aux causes immédiates
Dès l’introduction de l’ouvrage, l’auteur fait remarquer la particularité de ce conflit. De manière générale, les élections en Afrique subsaharienne sont le moment d’un déchirement entre les peuples et conduisent très souvent aux conflits enter-ethniques, interreligieux, interraciaux, voire interrégionaux. Les conflits qui suivent la proclamation des résultats, attestent de ce balbutiement démocratique qui maintient à jamais l’Afrique dans l’impasse et le chaos. Dans le contexte de la Côte-d’ivoire, l’auteur montre à quel point les instances de légitimation ont, par leur nonchalance et désordre sur le plan décisionnel, conduit le pays au trouble. Deux instances s’opposent ici, mais dont l’une est sur le plan juridictionnel l’organe habilité : la commission électorale indépendante, la première à donner les résultats présidentiels en faveur d’Alassane Ouattara ; et la cour constitutionnelle – organe de validation ou de légitimation des résultats après vérification – qui par contre, proclame les résultats en faveur du président sortant, Laurent Gbagbo. Cette indécision a conduit à l’implication des forces extérieures, tant les puissances d’observation et de régulation ont eu à faire de choix particuliers sur tel ou tel candidat. En réalité, constitutionnellement, c’est à la cour constitutionnelle de proclamer les résultats finals. Malheureusement c’est le désordre qui s’impose, voilà comment s’instaure une crise d’abord ethnique puis politique et militaire. A ce niveau, les auteurs analysent minutieusement les raisons de cette ambivalence et de désaccord, mais en reconnaissant quelque peu l’hasardeuse volonté de la commission électorale indépendante (CEI) à s’autoproclamer en se basant sur des résultats illusoires puisque non légitimés par l’instance habilitée. Au-delà de ce mic mac, l’auteur condamne plus l’implication de la communauté internationale. Et là, il rappelle les grandes prérogatives du droit international en se focalisant sur la question de la « non- ingérence » entre pays. En réalité, cette force subsidiaire au candidat Alassane Ouattara, aurait franchi les limites du Droit, en méconnaissant la souveraineté juridique de la Côte-D’ivoire. Mais en fin de compte, jusqu’à quand les pays africains seront-ils réellement dépendants des puissances extérieures?
Par ailleurs, ce « chaos » démocratique est la conséquence d’une longue période de crise politique et militaire. L’auteur, retrace tant soit peu les étapes de ce déchirement, les différentes rivalités entre les figures politiques pendant deux décennies au moins jusqu’à l’organisation des élections en 2010, grâce à l’implication justement de la communauté internationale. En vue de trouver une issue, l’auteur propose quelques pistes :
- Quelques pistes de sortie de crise
La troisième partie de l’ouvrage porte sur « l’approche de solution et de sortie de crises », il s’agit des propositions inhérentes à la fois à la sortie de crise et à l’instauration d’un système démocratique efficient. L’ouvrage étant publié alors que la crise battait ses ailes, l’auteur en marge de cette recherche de la paix, articula sa proposition en des axes suivant : « la mise en œuvre de la diplomatie civile et humanitaire dans la résolution du conflit ivoirien », « plaidoyer pour de nouvelles réformes institutionnelles en Afrique. »
Le premier axe s’appuie sur la prise de conscience personnelle et collective devant les enjeux de la nation ivoirienne. L’auteur revisite « le pouvoir moral ou les dynamiques sociales ». Ce point trouve sa signification dans le rôle que doit jouer les églises dans la résolution de différents conflits et le maintien de la paix. Aussi l’auteur revalorise-t-il le système du dialogue en Afrique : la place du dialogue (l’arbre à palabre) dans la quête de la cohésion sociale. Ce qui revient à dire que, les ivoiriens dans un élan de tolérance, devaient ou doivent avoir des dialogues inclusifs afin de trouver un terrain d’entente nationale. La « dynamique genre », avec l’implication des femmes, tel est le cas de la Mipreda, un organe de réflexion des premières dames d’Afrique.
Le deuxième axe, porte sur « l’institutionnalisation du partage par la structuration de la fonction de la présidence » comme moyen d’instaurer un équilibre sur tous les plans, d’éviter des suspicions et réguler le statut présidentiel pendant ou après les fonctions. Cette mesure prône la responsabilité politique de chacun, en se fixant sur les intérêts nationaux en premier. L’autre solution serait « l’institutionnalisation du statut particulier des anciens chefs d’Etat ». Et enfin, « l’institutionnalisation du dialogue par la réhabilitation du pouvoir moral ».
- Conclusion
Il y a dans ce livre des sujets évoqués qui concernent certains pays d’Afrique. L’investigation du cabinet « Géo-Ecostrapol » sur l’organisation des élections apparaît noble et encourageant. Ainsi, ce livre en s’appuyant sur le cas de la Côte-d’ivoire, révèle les problématiques liées à l’imperméabilité des systèmes électoraux en Afrique, et la place ou l’implication de certains pays de la communauté internationale dans la résolution des conflits internes des pays africains. Il pose avant tout le problème des relations entre Etats, l’imprégnation des enjeux de la démocratie et de l’organisation des électeurs, à la suivie des résultats.