TRIBUNE. À égrener les crises de toutes sortes qui frappent le Congo sans compter les tribulations et l’impatience des successibles au trône, on n’est pas en tort de dire que ce pays est réduit en peau de chagrin tant ses ressources naturelles sont bradées, ses terres vendues, ses deniers détournés, sa population martyrisée, sa jeunesse subissant le martyre pavlovien.
Toutes les promesses d’un lendemain meilleur ne sont que chimères. Il faut être naïf pour croire à une manne au profit de cette jeunesse qui suffoque et agonise à force d’attendre. On n’a pas besoin de porter à son oreille un amplificateur de bruit pour ne pas entendre celui de la colère qui fuse de partout. La rue gronde, elle n’est pas en paix. Le gouvernement peine à la lui apporter.
L’insécurité a atteint un record inimaginable, le panier de la ménagère n’est guère amélioré, les hôpitaux sont sous-équipés. Les Congolais ne méritent pas de subir toute cette humiliation, cette extrême souffrance lorsque l’on sait que le pays est immensément riche avec des revenus pétroliers, gaziers, forestiers et autres à vous couper le souffle. Faute de bonne gouvernance, le Congo s’enfonce dans l’abîme s’il n’y est pas déjà.
Les services spéciaux, la justice et la présidence de la République, derniers remparts du pouvoir, se désagrègent et vont vau-l’eau. Le mois de mars est lourd en péripéties, entre la polémique provoquée par Florent Ntsiba et Hydevert Moigny et la villégiature de M. Sassou dans le Kouilou suivie de la parade à Kinkala.
Décryptage
Karl Marx disait, tout système porte en son sein, les germes de sa destruction. Dans la même optique, Hegel parle de la fin de cycle de dictature tous les quarante ans. 1977-2024, quarante ans déjà et le peuple congolais continue de vivre dans une incroyable précarité. Cette situation ne peut permettre une vie paisible, contrairement aux assertions de l’intellectuel – évangéliste – syncrétiste Anatole Collinet Makosso (ACM) et Cie qui parlent du Congo comme un pays en paix et où il fait bon vivre. Ajouter Florent Tsiba. Et, pourtant, les scandales y sont légion. Les services stratégiques sont infiltrés. Le citoyen lambda ne se doutait de rien jusqu’au moment où Florent Ntsiba, directeur de cabinet du président du Congo a pondu une note pour encenser une rwandaise parachutée au cœur de la vie présidentielle avec des prérogatives de ministre. Le centre névralgique du Congo est ainsi touché lorsque toutes les manettes du pouvoir sont confiées à une étrangère en lieu et place des cadres congolais dont la compétence est avérée. C’est un pied de nez que la Présidence fait à l’élite pourtant formée dans des grandes écoles et ayant fait leurs preuves dans des milieux professionnels. Cette Françoise Joly semble avoir la science infuse, à en croire M. Ntsiba qui menace tout congolais qui fera valoir ses droits de s’interroger sur l’intrusion d’un étranger dans la plus haute sphère de l’État.
Les révélations faites en toute conscience par H. Moigny, sont choquantes. Si l’incompétence du gouvernement n’étonne personne aujourd’hui. Mais dire comment le pouvoir a ourdi un complot contre le peuple en entretenant la peur et en semant la mort, c’est un aveu de crime. Si tous les citoyens sont égaux devant la loi, et que la justice est rendue au nom du peuple congolais comme stipulé dans la loi fondamentale en son article 167, l’immunité de H. Moigny devrait-être levée pour outrage à magistrat dans la triste affaire d’Ornano et il devrait expliquer clairement, le phénomène des violences dans lequel il est comptable. Cela fera jurisprudence sur le cas du capitaine Oumouangué qui croupit en prison.
Insécurité et pillage au Congo Brazzaville
H. Moigny a protégé indirectement l’axe Gamboma – Ollombo lorsqu’il encense Pierre Oba qui pille copieusement le Congo en octroyant les permis d’exploitation à ses rejetons. C’est la forme la plus moderne du pillage des richesses naturelles. Pillage rime avec insécurité. Les deux participent à la détresse des Congolais. H.Moigny qui a dit comment il a tué des Congolais devrait proposer des pistes sérieuses pour éradiquer le phénomène kuluna et autres. C’est l’assassin-chef de gang qui n’a pas déposé son tablier qui a parlé. Il attend, tapi dans l’ombre et prêt à bondir et dégainer à la moindre occasion.
Les initiés savent que, depuis quelque temps, les recrutements, les marchés, les formations au sein de la police ne sont pas l’affaire de Jean François Ndengué mais plutôt de Zéphyrin Mboulou. Personne ne va croire par exemple que le centre de formation d’Obouya et la boulangerie qui l’approvisionne sont sous la coupe du sinistre Mboulou. André Obami Itou Fils qui a fait ses preuves à la présidence de la République et çà et là, doit jouer des coudes et durcir les bras et les mollets pour remplir sa mission.
Le voyage de M.Sassou dans le Kouilou laisse interrogateur plus d’un. L’absence des hauts cadres qui ont œuvré à la matérialisation des projets qui semblent justifier le déplacement du Président rend perplexes les congolais. L’absence remarquée de Yves Castanou et du ministre Nguonimba chargé de l’urbanisme donne à réfléchir. (nous y reviendrons). Par contre, le 8 mars à Kinkala, le président de l’assemblée nationale, Isidore Mvouba, troisième personnalité du Congo et parrain des activités de ladite journée dans le Pool a été humilié. Son arrivée n’a pas été mentionnée dans le programme officiel du protocole national, il a été ignoré par la ministre Nicefer Ingani, etc.
La paix?
Puisque, le pouvoir ôte la qualité d’intellectuel à ACM au point de se confondre au comédien Isidore Mvouba et au pantin Pierre Ngolo, nous le renvoyons à l’ouvrage « Parler vrai pour l’Afrique » où M. Sassou définit la paix : «… La paix, que les peuples du monde entier appellent de leurs vœux, ne saurait se limiter à l’absence de guerre, ni au seul dialogue entre les grands. En effet, la paix signifie aussi la possibilité et la capacité pour nos sociétés et nos économies d’assurer pour chaque être humain la satisfaction sans cesse accrue de ses besoins fondamentaux. Il s’ensuit que l’humanité ne pourra connaître une paix globale et durable que lorsque l’ensemble de la planète pourra jouir des bienfaits du développement économique et social, lorsque tous les peuples pourront disposer librement de leur destin, lorsque, dans chacune de nos nations, nous aurons brisé les barrières artificielles liées à la race, à la religion ou à toute autre forme de discrimination ».
Au regard de cette définition, ACM et Cie peuvent-ils nous dire si les congolais sont réellement en paix quand-ils ne peuvent se soigner, manger, se loger, se déplacer et quand le verrouillage ethnique est scellé depuis les hautes sphères ?
Ghys Fortune BEMBA DOMBE