Congo. De cette logique du  rapport des forces

TRIBUNE. Des milieux congolais soulèvent qu’en raison du rapport des forces dont bénéficie le pouvoir du Président Sassou Nguesso, les Plateformes de l’Opposition congolaise n’auront jamais les moyens de leur politique active. Une logique qui revient, en boucle. Je m’insurge contre ce raisonnement, y exprimant mon désaccord.

Ne pas écouter le camp d’en face, au non d’un rapport des forces qui, en apparence, vous est favorable, pourrait être interprété comme la démonstration éclatante, voire un signe de faiblesse ou une volonté affichée de laisser pourrir des situations, au nom d’agendas cachés.

Est-il normal que des autorités nationales, avouant être au service de leurs populations, puissent être, si longtemps, indifférentes à des problématiques majeures, devenues récurrentes, soulevées, majoritairement, dans le pays?

Le rapport des forces est une chose.

En est une autre, alors, bien patriotique, celle de s’ouvrir, dans un élan de vérité et d’espérance, aux conditions objectives d’un sursaut collectif que propose l’Opposition, dans un contexte où la situation d’ensemble, déjà non brillante, depuis les événements de 2015 et ceux qui se sont succédés, avec la crise postélectorale de 2016, s’est fortement dégradée, à l’arrivée de la pandémie du coronavirus.

Le Gouvernement Congolais ne parvient plus à être compris et à susciter la confiance, tant les souffrances s’accumulent dans le pays.

Des personnalités, connues pour leur pondération, n’hésitent plus à qualifier le contexte dans lequel se trouve le pays, de « négation de la République ».

La persistance, dans le déni, la fuite en avant, est l’équivalent du serpent qui se mort la queue, donc s’autodétruit, dès lors que les proies ne sont plus accessibles.

Les attentes populaires sont immenses au Congo. Et, c’est un truisme que d’affirmer que le peuple congolais, dans sa grande majorité, va mal.

Si le sentiment d’appartenance à la nation reste fort, de nombreux facteurs témoignent, cependant, d’un délitement de la cohésion, au sein de la communauté nationale.

Les Congolais constatent un écart important entre les valeurs affichées par la République et qu’eux mêmes vivent au quotidien. Les quelques efforts du Gouvernement pour consolider cette cohésion sont insuffisants.

Dans ces temps où le Congo fait face à d’énormes défis socio économiques, le sursaut national collectif, avec le pendant des mesures fortes qui en résulteraient, est le remède classique à ces défis.

On peut bénéficier d’un rapport de force et ne pas avoir les moyens légitimes de dénouer les maux.

Dans tous les Etats du monde, les crises sont, pour les dirigeants, en place, l’occasion d’en appeler aux forces vives de la nation pour une solution de sortie qui concourt, parallèlement, à consolider la cohésion et l’unité nationales.

L’histoire abonde de cas semblables.

Le 15 août prochain, par tradition, le Président Sassou Nguesso, prononcera son allocution de circonstance, à la nation, pour les 60 ans de l’indépendance du pays. Symbole de la victoire de la liberté des Congolais sur l’arbitraire coloniale. Tout autant, symbole de la légitimité congolaise sur la légitimité française.

Les Congolais vivront, dans l’angoisse, la fête, campés sur plusieurs postures. Inquiets du présent et de l’avenir de leur pays. Toujours, en attente de cette amnistie générale, réclamée. Mécanisme prévu par la constitution, un peu oublié, l’amnistie devrait retrouver, ce 15 août 2020, tout son sens originel de régulateur social puissant.

Les Congolais voudraient, par ailleurs, ardemment, que les prochaines élections présidentielles soient transparentes, justes, démocratiques et crédibles, au terme d’une refonte du système électorale, en vigueur, non paritaire, et non réellement indépendant, aux fins d’en faire un réel outil national, non partisan et paritaire, au service du progrès. Ils en brûlent.

Si, pour ces 60 ans de l’indépendance du Congo, le Président Sassou Nguesso voulait être à la hauteur de ses obligations, vis à vis de ses concitoyens et de l’image d’homme d’Etat qu’il entend projeter dans l’opinion internationale, sa grandeur viendra de ce qu’il écoute, cette fois, la nation.

Les Congolais trouveront- ils leur compte, au soir du message présidentiel du 15 août? C’est la question.

Paris le 7 août 2020

Ouabari Mariotti (Membre de l’UPADS)

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