Livre-témoignage : L’homme de Dieu Martin Essomba vient de publier « Va et raconte ce que j’ai fait pour toi »
Martin Tsala Essomba, né dans la région du Centre au Cameroun, est leader de l’église « Temple des Nations » à Asnières-sur-Seine (France). C’est sur instruction divine qu’il a rédigé son témoignage dans le livre Va et raconte ce que j’ai fait pour toi. En tant que docteur de la parole de Dieu, il relate ses années passées au service de Satan par la pratique de la magie, puis sa délivrance des ténèbres par Jésus-Christ. La genèse de cet ouvrage, à l’écriture impeccable et facile à lire, fait état des origines familiales de l’homme de Dieu avant d’introduire le lecteur dans le vif du sujet. Le jeune Martin n’a pas 17 ans lorsque ses parents sont tués par la sorcellerie familiale, alors que son père était un chrétien pratiquant. Pour venger la mort précoce des siens, il signe depuis le Cameroun un pacte avec le diable par le canal de la représentation à Grenoble en France de la secte satanique « Sakia mouni ». Chemin faisant, il devient un proche collaborateur de Lucifer, représentant de Satan au Cameroun, haut dignitaire du temple satanique situé sous la Grande-Bretagne et responsable d’un projet de destruction de l’Afrique avec une base au Soudan. Le récit est précis et la vérité saute aux yeux du lecteur. L’auteur ne cache rien de tous ses actes démoniaques de l’époque : assassinats mystiques, sorcellerie, organisation d’accidents, voyages astraux, consommation de chairs et de sang humains liés à des sacrifices… C’est avec connaissance et rigueur qu’il nous parle du satanisme, du péché, des envoûtements et malédictions, de l’ignorance des hommes (« mon peuple est détruit parce qu’il lui manque la connaissance ») et de sa délivrance suivie de sa nouvelle naissance. L’expérience racontée est soutenue par la parole de Dieu… Du reste, en dépit de ses activités maléfiques, on s’aperçoit que celui qui est devenu serviteur de Dieu à travers le monde était en réalité destiné à faire le bien. Car Dieu avait semble-t-il commencé une œuvre en lui. Le jeune homme qu’il était alors a su ainsi résister au diable en refusant catégoriquement, au péril de sa vie, de livrer en sacrifices humains ses cousins au nombre de douze, réclamés par son supérieur. Et lorsqu’il tombe gravement malade, la médecine, l’animisme et la magie n’ayant pu le sauver, c’est Jésus-Christ en personne qui viendra le rencontrer et le guérir le 22 février 1992. À la suite de ce secours divin, il lui dit « Va et raconte ce que j’ai fait pour toi ». « Va et raconte ce que j’ai fait pour toi », témoignage de Martin Essomba, Éditions Cana, 177 pages, 10 euros. (www.vimdv.org/ tsalaes@yahoo.fr). Mito revista cultural n°42 du mois d’avril 2017.
LIVRE: Anguios Nganguia Engambe publie le mémento politique « aujourd’hui prépare demain »
Après des études supérieures en Économie et Douanes, Anguios Nganguia Engambe aura été consultant auprès des institutions monétaires internationales et commerciales puis inspecteur principal des Douanes. Dans ce condensé de son projet de société intitulé « Aujourd’hui prépare demain », il nous livre sa vision pour un Congo prospère à la richesse équitablement répartie. Militant politique depuis 1974, président du Parti pour l’Action de la République Mâ, en sigle PAR, il fut candidat aux élections présidentielles de 2009 et 2016 au Congo Brazzaville. Si sa candidature à la prochaine élection présidentielle ne fait l’ombre d’aucun doute, il estime que quatre millions de femmes et d’hommes congolais, ayant des convictions politiques différentes et de tous horizons, doivent réfléchir ensemble et en toute liberté, aux différents moyens permettant la libération de l’énergie de chacun pour le développement du pays. « Aujourd’hui prépare demain », d’Anguios Nganguia Engambe, essai, éditions Cana, 114 pages, 10 euros / 5.000 Francs CFA.
LIVRE : Franck Cana et Obambe Gakosso sonnent l’alerte en publiant « Manifeste pour une Afrique du bon sens »
Les auteurs de ce nouvel opus, Franck Cana et Obambe Gakosso, attirent l’attention de quiconque sur la situation actuelle du continent africain. Ils estiment qu’une société qui s’arrête de penser est vouée à mourir ; alors ses ennemis peuvent ranger leurs armes de guerre, car elles n’ont plus aucune utilité. Parce que l’Afrique souffre 666 maux, ils soumettent quelques pistes de réflexion aux lecteurs sensibles à son devenir. Cet ouvrage est le fruit du discernement de deux Africains nés sur le continent, qui sont allés observer ailleurs comment les choses se conçoivent. Mais, dira-t-on, l’Afrique ce ne sont pas seulement les guerres, il y a d’indéniables succès et réussites. Certes. Certaines plaies, cependant, méritent d’être étudiées comme il se doit afin que puisse être proposé le traitement adéquat. C’est ce qu’ils ont tenté de faire dans ce livre que l’on peut lire en sirotant un bon molengé (vin de palme) d’Ollombo, dans un train en Occident, à l’ombre d’un baobab dans le Sahel, debout dans le métro, sous un arbre à Sibiti ou encore sur le chemin de son champ de coton. « Manifeste pour une Afrique du bon sens », de Franck Cana et Obambe Gakosso, essai, éditions Cana, 112 pages, 10 euros.
La littérature: la fratrie congolaise en question
A ses origines, la fratrie congolaise était marquée par une confraternité entre les écrivains congolais des décennies 70-80-90 aimant échanger entre eux. Elle était charpentée par Sylvain Bemba, Sony Labou Tansi, Henri Lopès, Guy Menga ou encore Jean-Baptiste Tati Loutard. Mis à part les liens amicaux, ces auteurs avaient pour habitude d’échanger leurs manuscrits pour relecture, critique et correction. Malgré les années et les différents soubresauts politiques que le Congo a connus, ces aînés ont continué à honorer la littérature congolaise. A partir des années 90, des écrivains d’une nouvelle génération vont venir enrichir le patrimoine littéraire congolais. Il y eut entre autres Henri Djombo avec son ouvrage « Sur la braise » publié en 1990. Les liens entre les écrivains Néanmoins, le développement de l’industrie du livre, les migrations, la multiplication des maisons d’éditions et les multiples possibilités de publication qui s’offrent désormais aux écrivains à partir de l’an 2000, ont distendu les liens entre les auteurs congolais. Les frères n’ont plus systématiquement besoin les uns des autres dans le processus de publication de leurs manuscrits. L’entraide entre les auteurs de l’intérieur et ceux de la diaspora ne s’impose plus comme jadis pour voir les œuvres de ceux qui vivent au Congo être publiées. Il y a désormais l’établissement des maisons d’éditions sur place. L’éloignement a également freiné l’élan fraternel qui animait la fratrie congolaise. D’autre part, l’enracinement de la violence politique armée au Congo à partir de 1992 causera du tort au livre congolais. Les agissements rétrogrades ont donné naissance à un tribalisme et un régionalisme excessifs dans la société congolaise. Des maux qui n’ont pas, bien entendu, épargné la communauté des Gens de Lettres. Ainsi, le début des années 2000 sera caractérisé par une méfiance entre les auteurs. Toutefois, un certain nombre d’entre eux ont tissé des liens qui laissent penser que malgré les vents, la violence et les rancœurs, le cœur de la fratrie battait encore. En témoignent, par exemple, les fréquentes retrouvailles entre Henri Lopès, Alain Mabanckou ou encore Emmanuel Dongala. Une nouvelle impulsion fraternelle Au milieu des années 2000, comme « le térébinthe et le chêne qui conservent leur tronc lorsqu’ils sont abattus », une nouvelle génération est venue revigorer la fratrie congolaise. Ses acteurs sont nombreux et se situent aussi bien parmi ceux qui sont à la maison que parmi ceux de la diaspora. Raymond Loko, Alima Madina, Marie-Françoise Moulady-Ibovi, Pierre Ntsémou, Hugues Eta, Jessy Loemba, Fresnel Bongolo, Huguette Nganga Massamba, Paul Évariste Okouri et bien d’autres sont désormais au nombre des écrivains de l’intérieur. Sorel Incari au Québec, Ralphanie Mwana Kongo, Assia-Printemps Gibirila, Milie Théodora Miéré, Liss Kihindou, Isaac Djoumali Sengha, Itoua Ndinga, Berthrand Nguyen-Matoko, Virginie Mouanda, Adèle Caby-Livannah, Marien Fauney Ngombé, Jean-Aimé Dibakana, Marius Nguié, Obambe Gakosso en France, Emilie-Flore Faignond et Éveline Mankou en Belgique ainsi que Wilfried Nsonde en Allemagne font partie du contingent extérieur de la famille. Enfin, contrairement à l’époque de ses pionniers, la fratrie est actuellement caractérisée par une production littéraire féminine dense et de qualité. Les bonnes relations que les écrivaines congolaises entretiennent entre elles sont évidentes. Au point que cette harmonie sera prochainement à l’honneur à travers une anthologie que préparent une dizaine d’entre elles autour de Marie-Léontine Tsibinda, installée au Canada. Les auteurs congolais font honneur à leur patrie par la qualité de leurs écrits dont les thématiques sont riches et variées. Leurs œuvres se distinguent encore à travers le monde. Et le poète Aimé Eyengué, membre de ce corpus encourage ce dernier à persévérer dans cette voie pour que la fratrie et le Congo vivent à jamais. « Comme la force du baobab est dans ses racines, exprimons notre amour pour le Congo, nos racines pour entretenir le baobab de notre mémoire collective », soutient ce poète.
Papy Maurice Mbwiti fait son spectacle
Dans sa famille l’art de la parole est une tradition. Le grand-père de Papy Maurice Mbwiti fût un modérateur des palabres et son père excelle dans cet exercice bien connu chez les Kongo. « Mon père fût enseignant, professeur d’anglais. Il a également été interprète à la présidence de la république et traducteur lors du combat de boxe qui opposa Mohamed Ali à Georges Foreman, en 1974 à Kinshasa », affirme l’intéressé. Très jeune, ce congolais de Kinshasa écrit des textes lorsqu’il n’a pas cours et à douze ans sa première pièce de théâtre, « Le secret de la vie ». Ensuite, c’est par la tenue de journaux intimes pleins de poèmes qu’il développe son côté comédien. Il intègre la compagnie théâtrale Étendard de Ngaliéma puis crée à l’âge de quinze ans sa première troupe dénommée les Jat, Jeunes amis du théâtre. Spectacle autour de la constitution Sensible à la condition humaine, il a pour modèles Jean Shaka Tshipamba et Mutombo Bwiti. En 1997, Ally Ntumba Bea, directeur de la compagnie les Béjarts, lui demande de mettre sur pied un spectacle autour de la nouvelle constitution de la République Démocratique du Congo, qui répondrait aux nouvelles aspirations des populations. Celui-ci s’appellera « Le village des bananiers ». Tout en poursuivant la comédie, Papy Maurice Mbwiti obtient son baccalauréat et décroche une licence en relations internationales en 2004. « Mes spectacles se veulent être une éducation civique et les messages qu’ils véhiculent sont liés à la démocratie, aux droits de l’homme ainsi qu’à la condition de la femme ». Sur scène son regard est toujours porté par l’espérance et la vie. Contacté en 2000 par l’écurie Maloba pour travailler sur la pièce « Je plaide coupable », d’Astrid Mamina, il part en tournée africaine. Devenu professionnel en 2004, il repart en 2005, cette fois-ci, pour une tournée ouest africaine qui passe par le Bénin, le Burkina Faso, le Togo…et joue « Cadavre mon bel amant » du béninois Ousmane Aledji. Polyvalent et très créatif, Papy Maurice est sollicité par de nombreux metteurs en scène. Il en profite pour participer à des ateliers d’écriture de mise en scène. L’envie d’aller travailler en Afrique australe le conduit à répondre à une proposition du directeur du centre culturel franco-mozambicain à Maputo. « C’est là-bas que je vais connaître ma première expérience de metteur en scène avec le spectacle « Qui suis-je ? » tiré du texte « Au-delà du voile », de l’algérien Slimane Benaissa ». Collabore avec Jonathan Kombe et crée « Et si on te disait indépendant ? » avec Bibish Mumbu En août 2006, le danseur et chorégraphe Faustin Linyekula lui demande de préparer quelque chose à l’occasion du 250eme anniversaire de la mort de Mozart. Il part alors pour Kisangani en RDC avant sa première prestation européenne en novembre 2006 à Vienne en Autriche, où il se produira dans « Dinozord ». Viendra ensuite le festival d’Avignon en 2008 puis les Francophonies en Limousin en 2010. Dès lors, il n’arrêtera plus de tourner à travers les continents. Il assiste Faustin Linyekula en 2009 à la Comédie française dans « Bérénice ». Entre-temps, ce surdoué qui a collaboré avec Jonathan Kombe unira sa science à celles des comédiens Fiston Nasser Mwanza Mujila et Marie-Louise Bibish Mumbu. Ils font le spectacle un peu partout avant de trouver la solution à la difficulté de la distance qui les éloignera en créant le concept des Ponts littéraires en 2011. Ces courtes lectures thématiques appelées Moziki littéraires sont un succès. Elles donnent lieu à la publication d’un recueil du même nom. L’objectif est de : « distribuer les recueils et donner le goût de la lecture aux jeunes, briser le mythe de l’auteur absent et créer un imaginaire congolais éloigné de Blanche neige » , précise-t-il. L’écriture de cet homme marié, père de trois enfants, est marquée par la sagesse africaine, la politique et la philosophie. Le travail autour de la création de « Dire et Écrire » à Kinshasa au théâtre des Verdures à Mont-Ngaliema durant deux jours devant environ 8000 personnes à chaque représentation, est déjà amorcé. Le théâtre n’est pas soutenu comme il le mériterait Lorsqu’on évoque l’état des arts du spectacle aujourd’hui, l’auteur, comédien et metteur en scène est amère. « Parmi les multiples freins au développement du théâtre je peux citer la barrière de la langue, la crise économique, la régression du niveau de l’enseignement, l’inexistence de subventions étatiques, l’insuffisance de librairies, le défaut de vulgarisation des ouvrages valorisant la culture, les arts et les lettres, le manque de liberté d’expression…Ainsi, les gens préfèrent suivre les spectacles à la télévision ». Qu’à cela ne tienne, cet intermittent du spectacle engagé dans diverses troupes théâtrales et qui joue actuellement sa nouvelle pièce « To lata » en Allemagne, reste optimiste. « Il y a quand même une dynamique des jeunes pour réinventer ce qui n’existe plus ».
Littérature : à tous ceux qui sont nés d’une femme
C’est depuis belle lurette que les femmes se battent pour l’amélioration de leur condition humaine. Et, pas de doute, l’inspiration du roman d’Assia-Printemps Gibirila intitulé Elles, publié aux éditions les plumes d’Ocris, est tirée et traverse cette longue lutte séculaire. Cet ouvrage à l’écriture simple est un véritable hommage à celles qui accouchent la vie. Celles qui à ce jour, dans certaines régions de la planète, continuent d’obtenir le droit de vivre au prix de leur sang. Dès le début, l’auteure nous rafraîchit la mémoire à travers le souvenir sombre de la période où en 1857 aux États-Unis, la Cour suprême déclarait « qu’un noir même libre ne peut être citoyen des États-Unis ». Un moment de l’histoire de ce pays où « être femme et noire est de toute évidence, une double-peine ». Puis vient le mouvement des petites femmes aux godillots. Ces dernières qui, lassées d’être sous payées et reléguées « au rang de rien », entre en grève, allant même jusqu’à celle du sexe, pour espérer se faire entendre. Les hommes boudent car « les lits ne sont plus réchauffés par l’ardeur et la chaleur de leurs étreintes nocturnes ». Face aux magnats de l’industrie qui se gaussent, se disant que la faim aura raison de ce mouvement de révolte féminine, les femmes tiennent bon et payent un lourd tribut pour obtenir certaines avancées. Plus loin, Johanna, jeune fille adolescente, est obligée, au décès de son père qui était mineur, d’aller travailler à la mine pour aider sa mère à subvenir aux besoins de ses enfants. Étant l’aînée d’une famille de six filles, qui pourrait bien être lorraine, la mineure devient « une jeune fille responsable, du moins co-responsable d’une famille écorchée par la mort ». Le courage de descendre à la mine à son âge et bosser dur lui vient de l’idée de ramener du pain à la maison et aider sa mère. Elle devient contremaître en second et progresse à la force du poignet. Avec Elles, Assia-Printemps Gibirila signe un texte prégnant qui non seulement parle de la femme, mais surtout des femmes de tous les continents. Khîo est une bourgeoise japonaise dont la vie est toute tracée. Pourtant, elle a suffisamment de recul pour percevoir la misère des autres de son palais, allant jusqu’à avouer : « je m’ennuie dans cette prison dorée ». Comme les autres principaux personnages, cette unique fille de la richissime famille Kyoto-Gosho aime son prochain et est prête à se battre pour l’amélioration du sort de celles pour qui « vivre doit être synonyme de combat ». Dans cette œuvre encourageante et parfois utopiste, Diawara l’africaine est celle qui lutte contre la pratique de l’excision. « En me sectionnant un bout de mon intimité, on me faisait entrer, avec souffrance dans, le monde des presque femmes ». Difficile pour cette jeune fille lorsque l’espace d’expression de la femme dans cette société traditionaliste est quasi inexistant. « Où est donc ma place dans cette société, qui, au nom des traditions est prête à sacrifier la vie, en faisant couler le sang de ces jeunes filles ? » Comme toutes les héroïnes, elle s’extirpe de la rigidité sociétale et adhère à une organisation de lutte contre ces traditions d’un autre âge. A travers « les femmes-lionnes », Diawara va expliquer aux autres que l’avenir de la femme est dans le combat. Du coté de l’Inde, Shanka va se dresser contre l’horreur de la condition de la femme indienne. Attendue garçon, elle a le tort d’être née fille. C’est synonyme de malédiction pour cette société castée. A 14 ans, elle se retrouve dans un lieu exclusivement féminin, « le village sombre ». Dans cet endroit résurrectionnel, chaque femme est une blessure. Devenue infirmière, Shanka va avec « le mouvement des Saris roses » s’impliquer pour cicatriser chacune d’elle. Un mouvement qui les éloigne définitivement de la souffrance, de la martyrisation, des viols, des violences, des immolations et du silence. L’écrivaine afro-asiatique, qui a fait de la femme son matériau exclusif pour son cinquième ouvrage, nous a produit un roman à la narration alternée et itinérante. Sa force est d’avoir su redonner du sens à la journée du 8 mars qui célèbre mondialement les droits des femmes. Mais également, d’avoir montré que toutes les traditions ne sont pas forcément à mettre à la poubelle. Si Diawara l’africaine et Shanka l’indienne aspirent à se défaire des chaînes ancestrales, Kikukuana, l’inuite du nord du Canada, tient à la préservation de la tradition. Avec le mouvement « la nature a ses droits…Respectons les, respectons nous », Kikukuana et les autres femmes se battent contre les méfaits du modernisme, pour préserver leur cadre de vie. Disons que dans ce livre, Gibirila met en mouvement des militantes qui se battent pour le droit d’avoir une vie normale. Il s’achève par une chronologie des moments importants qui ont marqué la longue marche vers l’égalité. Du reste, il y a fort à parier que l’auteure a de vrais motifs d’indignation que l’écriture lui a permis de contenir, afin d’offrir une œuvre destinée à tous ceux qui sont nés d’une femme. Elles, d’Assia-Printemps Gibirila, éditions les plumes d’Ocris, 136 pages, 14 euros.
Littérature : Un procès bien étrange
« Je plaide non coupable » est le titre du huitième livre de l’écrivain Benoît Moundélé-Ngollo. Tout au long de ses 285 pages rédigées par l’auteur dans le style littéraire dont il est le père et qu’il a, provisoirement, dénommé Snoprac, signifiant Style qui N’Obéît Pas Aux Recommandations Académiques Classiques, l’ouvrage est meublé dans un tribunal. L’auteur y est jugé pour les faits d’attaques ad hominem, de diffamation, d’atteinte à la vie privée d’autrui et d’utilisation permanente d’un style littéraire non courant. La vraie victime ici c’est moi Une fois la cour en place, dès sa première prise de parole à la barre, l’accusé qui pourfend les anti valeurs et à qui certains reprochent de s’en prendre à des personnes dans ses écrits, rejette ces accusations. Il prétend que ce sont ses accusateurs qui prennent des visages de certaines personnes et les imposent aux personnages fictifs de ses ouvrages. « Lorsque des lecteurs et des lectrices, En lisant mes livres, Y débusquent souvent, sinon toujours, d’après eux, Des personnes connues de moi ou d’eux dans la cité, Tout en les citant nommément avec des convictions obstinées, -voire inébranlables- Donnant ainsi un sens étriqué, fantaisiste et trop orienté, Ne correspondant pas à ma vision des choses et du monde : Je plaide non coupable ».Dans les pensées du jour, après avoir cité Erik Orsenna et Beaumarchais, par le biais de Paul Aron et ses collègues, le prévenu Moundélé-Ngollo déclare : « On n’est pas intellectuel parce que, On est docteur en Sorbonne, d’Oxford ou de Harvard, -Mais- On est intellectuel parce que, Appartenant à une société des gens de lettres, On combat les préjugés et on agit en faveur du progrès, En prenant le risque de refuser l’intolérable ». Concernant sont style d’écriture, il précise : « Dans ma manière d’écrire, je me préoccupe -Beaucoup plus- Des problèmes que je soulève, Que de la manière qui conviendrait Pour les exposer par écrit. En réalité, pour tout dire, Je me préoccupe beaucoup plus du fond Que de la forme qui convient Pour s’exprimer par écrit ». Droit dans ses bottes, ce général de division enfonce le clou. Parlant des Caractériels-Psychorigides, il lâche : « Sans le Pouvoir et l’Argent, on les dit « invivables ». –A cause de leur Ego trop prononcé– Détenant le Pouvoir et l’Argent, la plupart du temps, –De manière illégale– Ils deviennent « vivables » comme par enchantement, –Très vivables même, aux yeux de certains– Parce que abusant de leurs nouveaux atouts, Ils n’ont plus d’oreilles que pour entendre des louanges. Les Caractériels-Psychorigides ne savent pas Que beaucoup de leurs adeptes, Femmes comme hommes, …s’arrangent toujours auprès des tailleurs, Pour coudre lesdits pagnes, en mettant au moins, –Une image d’eux, en face des fesses– » Ceux qui estent en justice maintiennent leurs accusations Le mis en examen risque une condamnation ainsi que la révocation de la société des gens de lettres. Il joue son va-tout dans une salle comble. Puis vient le tour des avocats qu’il a sollicité. Parmi ses défenseurs, des gens d’églises, des écrivains, des femmes distinguées comme Josiane Cointet et Chara Agneboult et un frère d’armes. Tout ce beau monde, réunit dans une longue plaidoirie, va peindre un tableau élogieux du mis en cause. Et lorsque l’un des magistrats leur fait remarquer que Moundélé-Ngollo a parfois des écrits qui dérangent, certains répondent que c’est un mal pour un bien. Prenant la parole à son tour, Patrick Migisho de Kisantou en République démocratique du Congo, se tournant vers son client atteste : « Le style à la fois simple et attrayant, Que vous utilisez, laisse toujours le lecteur, Sur sa soif de lecture… –Ensuite– L’abord des réalités de la vie quotidienne, Les thématiques de vos livres sont aussi fascinants Que les mots qui les traduisent. En vous lisant, je suis en contact direct Avec la réalité et en plein Dans la scène qui est racontée ». Les auteurs de l’action en justice ne sont pas cités L’on est en droit de se demander si les griefs portant sur le Snoprac ont vraiment lieu d’être lorsqu’on pense au spiralisme de l’écrivain haïtien Franketienne. Une manière d’écrire qui associe le roman, la poésie, les contes, les proverbes et le théâtre. L’haitien pense que « né dans le contexte de l’épanouissement de la société bourgeoise, le roman est inapte à rendre compte des bouleversements de tous genres qui affectent le monde actuel. Les métamorphoses que subit notre époque ne peuvent être appréhendées que par une écriture en perpétuel éclatement ». Soutenant même son légalisme, son conseil Éveline Mankou rappelle au tribunal ce que l’auteur avait dit qu’il ferait s’il était « président de République », dans son précédent ouvrage « Fantasmons ensemble un instant dans un Snoprac ». « … Je chercherais à me faire élire démocratiquement, -Sans aucune tricherie- Pour une période définie d’avance, -5 ans par exemple- Passée cette période, je me retirerais, Sans chercher à briguer d’autres mandats ». Pour sa part, avant de terminer son propos en le regardant dans les yeux, Marie Grace Bagouma l’encourage : « Soyez sans crainte, votre blé a assez de force Pour grandir sans être étouffé par l’ivraie Le doute n’est parfois qu’un revers de la foi –Disent les Écritures– » En attendant que le doute profite à l’accusé, comme on le dit couramment, au fur et à mesure que les pages défilent, on a tout de même l’impression d’être dans un procès bien étrange. Les victimes et les défenseurs des parties civiles n’ont pas été entendus. Et au moment où le procès de l’écrivain Benoît Moundélé-Ngollo tire à sa fin, au bout de ces pages d’audiences, alors que nous sommes en attente du verdict à l’issue du délibéré, nous ignorons toujours les identités des plaignants. « Je plaide non coupable » de Benoît Moundélé-Ngollo, essai, éditions l’Harmattan, 285 pages, 21 euros. L’auteur présentera son ouvrage au public le samedi 26 avril à 15h30 dans la salle des conférences de l’hôtel Marriott Rive Gauche à Paris 14eme.
L’épopée de la production musicale de Cyriaque BASSOKA
Il apprenait aux filles à chanter la rumba lorsqu’il était à Niamey au Niger avant de venir poursuivre ses études universitaires à Paris, à la fin des années 1980. Diplômé en sciences juridiques et diplomatiques, il rencontre de manière fortuite l’artiste congolais Pamelo Mounk’a. C’est le déclic de la production musicale. Son premier fait sera la réalisation et la production exécutive en 1989 de l’album « D’ici l’an 2000 » , de cette icône de la musique africaine. C’est un grand succès. Il devient manager et éditeur de Pamelo Mounk’a qui le missionne en Angleterre pour la négociation de ses contrats. La route est tracée. La star le présente à ses amis. Le nouveau manager fait la « une » et reçoit le « Prix de la rumba » au Timis club à Paris. Le partage des « Trophées de la musique rumba » avec les vedettes Jean-Serge Essous, Master Mwana Congo et Loko Massengo, confirme son talent et l’introduit définitivement chez « les grands ». Parmi ses attentes, l’élaboration de véritables politiques d’industrialisation musicale dans les pays africains. « Notre ensemble de métiers est important mais négligé. Il comprend pourtant une longue chaîne professionnelle constituée de la production, l’arrangement, la réalisation, l’ingenieurie du son, l’infographisme, l’impression des pochettes en usine, le transport, la location des lieux de stockage, l’affichage, la presse musicale…En Afrique du Sud, l’industrie musicale créée plus de 5000 emplois par an. Ailleurs, ça laisse encore à désirer, malheureusement », maugrée le producteur de 53 ans. Les premières récompenses ont un tel impact qu’il crée dans la foulée son label « Arts Productions Loisirs », APL en sigle. Par la suite, il produit la chanteuse canadienne Manouchka puis Damien Aziwa. Son enseigne assure la production, la distribution, le management ou encore la production de spectacles. Ce travailleur perspicace surfe sur la vague soukouss puis celle du ndombolo avant d’exporter la musique africaine aux Antilles. Le décès de Pamelo Mounk’a en 1996 l’affecte énormément. « Sa disparition a été un énorme choc pour moi. J’ai vraiment eu du mal à poursuivre le travail ». La consolation viendra en 1998 avec le succès planétaire de l’album salsa de José Missamou et son titre phare « Moutouno ya Congo ». Cette chanson sera même insérée par des promoteurs musicaux américains dans une compilation qui connaîtra un immense succès en Espagne, en Amérique Latine, en Angleterre, en Afrique de l’Ouest, et qui se vendra aux États-Unis à plus de 800.000 exemplaires. Paradoxalement, l’un des regrets de cet originaire du Congo Brazzaville date de cette époque. « En 1998, José Missamou est nominé aux Kora dans la catégorie « Meilleur album africain », mais il ne fait pas le déplacement de Johannesburg et ne peut donc, de ce fait, être primé ». Bassoka fait un break en 2002 avant de reprendre ses activités en 2004. A son palmarès, la primo production des deux albums des « Bantous monument » et la participation en 2007 à la tournée internationale des « Bantous de la capitale ». Alors que Don Farel se charge de la réalisation, il co-produit l’album « Bakolo mboka » avec la société Afrisson et la participation d’artistes cubains. Pour ce connaisseur, « la piraterie empêche de nos jours les artistes de vivre de leur métier et le secteur de la production a du mal à suivre. Il faut s’adapter et se mettre immédiatement à l’heure du numérique. Tout passe aujourd’hui par internet qui a aussi ses contraintes et une rémunération en deçà de celle de la production classique des années passées ». A son actif également, une tournée des « Bantous de la capitale » en France, en Belgique et en Hollande, à l’occasion des 50 ans de cette formation. Lors de cet événement, ils reçoivent la récompense du « Meilleur groupe du Babel-Med » à Marseille et raflent le Prix de la région Paca en 2009. Le livre consacré à ce groupe qu’il édite la même année connaît un franc succès. L’ouvrage est commandé par des universités chinoises, japonaises, australiennes ainsi que celles de Columbia, d’Harvard et de Kinshasa. Les presses nippones et américaines s’interesseront d’ailleurs à ce manager et feront écho à son travail. Aujourd’hui, après 23 ans de métier, la maison de production Cyriaque Bassoka qui possède un porte-feuille d’une centaine d’artistes, continue à produire et encourager les différentes générations de musiciens.