L’Actions pour la gouvernance et le développement communautaire (AGODEC), partie prenante au processus ITIE Congo, a rendu public récemment un document édifiant et riche d’enseignements sur la gestion des recettes du pétrole au Congo.
Selon ce document, intitulé « Observations sur les recettes pétrolières de la République du Congo », les recettes pétrolières publiées dans les différentes lois de règlement ne concorderaient pas avec les déclarations certifiées des entreprises pétrolières y compris la SNPC et des entités collectrices du gouvernement sur les paiements et les revenus du secteur des industries extractives.
A en croire l’AGODEC, l’exploitation des données contenues dans les rapports ITIE révèle que les recettes pétrolières ont été minorées dans les documents officiels de l’Etat.
D’après elle, « de 2010 à 2014, les recettes pétrolières de l’Etat Congolais sont de 11292milliards FCFA et non de 10300milliards FCFA comme cela est indiqué dans les lois de règlement ; soit une différence de près de 1000 milliards FCFA ».
En fait, explique-t-elle, ces revenus seraient plus élevés si toutes les recettes pétrolières atterrissaient bien dans les caisses de l’Etat, citant le cas de la CORAF qui détient plus de 1241milliards de FCFA qu’elle devrait reverser au trésor public et de la SNPC qui aurait fait perdre à l’Etat près de 600 milliards FCFA dans la valorisation des parts d’huile de l’Etat qui lui ont été confiées pour la commercialisation durant ces 5 ans.
D’après l’AGODEC, certaines taxes pétrolières seraient collectées par les sociétés privées et par conséquent n’arriveraient pas dans les caisses de l’Etat. C’est le cas de la taxe maritime avec plus de 14milliards FCFA collectés par la SOCOTRAM pour son propre compte et non celui de l’Etat.
L’organisation poursuit en indiquant qu’une partie des recettes pétrolières certifiées payées par les sociétés pétrolières manque de traçabilité dans les caisses de l’Etat.
Citant quelques exemples pour illustrer son propos, l’ONG note qu’en 2010, plus de 100milliards FCFA payés par les entreprises n’avaient pas été réconciliés faute de trace du côté de l’Etat.
Quatre ans plus tard, en 2014, même constat : près de 5 milliards FCFA n’ont pas de trace dans les caisses de l’Etat. L’AGODEC en veut pour preuve qu’au niveau des douanes (DGDDI), un écart non résolu de 1,5millionsUSD (environ 742 millions de FCFA. C’est pareil au niveau des impôts, 4.422millions USD (environ 2milliards de FCFA) d’écarts non justifiés ainsi qu’au niveau du trésor public, 4,376millions USD (environ 2milliards FCFA) d’écarts non justifiés.
L’organisation estime que « les prélèvements effectués dans le cadre des accords commerciaux par les sociétés pétrolières Total E&P Congo et ENI Congo sur les parts d’huile de l’Etat, ont fait perdre au trésor public d’énormes sommes d’argent (304milliards FCFA en 5 ans) pour lesquels il est difficile de connaître la destination ».
Aussi, elle ajoute que 466milliards de FCFA ont été prélevés par ENI Congo pour le remboursement des prêts gagés sur le pétrole pour la centrale électrique du Congo et celle à gaz de djéno.
En l’espace de 4 ans, ces deux sociétés auraient prélevé sur la part d’huile de l’Etat près de 15millions de barils pour un montant de 770milliards de FCFA, poursuit l’AGODEC soulignant que « plus de 3121milliards FCFA ont été séquestrés en Chine pour le remboursement des investissements chinoises dans le cadre des projets d’infrastructures ».
Au final, l’Actions pour la gouvernance et le développement communautaire estime que 4000 milliards FCFA environ ne seraient pas tout simplement arrivés au trésor public.
Et s’ils constituent officiellement une contribution indirecte au budget de l’Etat, « il reste à savoir s’ils ont tous été utilisés pour le compte de l’Etat, du simple fait que les chiffres présentés dans les budgets définitifs sont inférieurs aux paiements certifiés des sociétés pétrolières », conclut-elle.