TRIBUNE. Le fait d’avoir été privé de la jouissance des richesses de son terroir et loin de voir l’amélioration de ses conditions de vie, mais plutôt reduit à subir les affres d’une gravissime pollution par les hydrocarbures, le peuple de Loango est manifestement victime d’une injustice flagrante et inadmissible.

Il convient de noter que les activités extractives industrielles ont beaucoup d’impacts négatifs, considérables et durables tant sur l’environnement que sur le cadre de vie des populations riveraines. A cet effet, les préoccupations environnementales sont d’autant plus croissantes sur le littoral congolais qu’elles concernent principalement la pollution des eaux, la dégradation des cultures, l’atteinte à l’écosystème marin et côtier, la détérioration de la biodiversité et des sols, et leurs inévitables effets pervers sur la santé publique. Hélas cette gravissime situation n’émeut nullement les pouvoirs publics!

De ce fait, il est cependant indéniable que le peuple de Loango aura subi un préjudice dont on ne peut apprécier l’étendue encore moins l’ampleur de la part des compagnies pétrolières ainsi que par l’attitude laxiste sinon la démission d’un pouvoir ethnocentrique corrompu et dont, par ailleurs, l’hégémonie tribale ostentatoire est assumée sans le moindre scrupule.

Ici se pose avec acuité la question de responsabilité civile concernant les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. C’est pourquoi on comprend très mal, au regard des sérieux dégats causés sinon des désastres perpétrés, il n’a jamais été initié, au niveau du parlement, une loi portant création d’un fonds national d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures.

Les compagnies pétrolières se livrant à la pollution devraient normalement être tenues à une obligation de réparation du préjudice écologique. C’est justement cela qui aurait justifié la mise sur pied d’un mécanisme indemnitaire ou compensatoire à l’endroit notamment des victimes ainsi que pour la réhabilitation de l’écosystème ainsi altéré. On peut affirmer sans coup férir qu’un tel mécanisme participerait de la valorisation de l’être humain et de la sauvegarde de l’environnement.

Par ailleurs, il y a lieu de déplorer le fait que le développement des activités pétrolières au Loango n’est accompagné d’aucune politique de développement socio-économique de cette riche et généreuse région du Congo-Brazzaville. En effet, la justice sociale et l’équité auraient voulu qu’il y ait une redistribution des richesses nationales (construction des infrastructures de base et amélioration significative du bien-être des citoyens) sans exclusive sur l’ensemble du territoire national, mais ici l’égoïsme et l’égocentrisme ont pris le dessus sur la valeur de partage, d’où la confiscation et la dilapidation de la rente pétrolière par le clan kleptomane et criminogène au pouvoir.

Pollution d’un cours d’eau côtier des environs de Pointe-Noire.

On ne soulignera jamais assez que le pétrole de la région du Kouilou est, certes, une richesse nationale. Ceci demeure incontestable! Mais il n’en demeure pas moins vrai que le peuple de Loango, riverain de cette ressource stratégique et des zones d’exploitation, a été littéralement spolié et lésé dans son droit naturel de propriété. Aussi, il est dans son bon droit de faire valoir ses droits sur ce qui lui revient de droit. Et ce droit naturel est inaliénable et imprescriptible.

En effet, on ne saurait perdre de vue le fait que l’Etat de droit, c’est d’abord l’état des droits. Et la démocratie, c’est avant tout les droits des citoyens dont fait partie la revendication des droits et la dénonciation des injustices. Bien évidemment, dans cette perspective, il est surtout question de raison et de bon sens. En conséquence, de deux choses l’une, le peuple de Loango est tenu de faire le choix entre vivre libre en jouissant de ses richesses ou mourir esclave privé de tout droit sur sa propre terre. En fait, pour tout peuple au monde quel qu’il soit, victime d’injustice flagrante, notamment l’expropriation éhontée de ses richesses, la revendication de son droit d’en jouir est un acte hautement légitime.

En outre, on ne dira jamais assez que dans le meilleur des mondes, la redistribution plus ou moins équitable des richesses nationales devait être un impératif du moins une préoccupation au coeur de la politique gouvernementale. Mais hélas, on est reduit à constater que le peuple dans son ensemble, littéralement paupérisé et précarisé, est confronté à une pauvrété ainsi qu’une misère structurelles et endémiques.

Pendant ce temps, la classe dirigeante foncièrement kleptomane affiche de manière ostentatoire une richesse insolente, surtout fulgurante et sans cause, donc mal acquise. Il sied cependant de souligner que l’accentuation des ces inégalités nuisent non seulement au vivre ensemble, à la cohésion et la concorde sociales, mais aussi au bien-être et à la santé de toute la société. On ne saurait cependant occulter une chose non moins importante : le fait d’être privé délibéremment du droit de jouissance des richesses nationales et de se voir plutôt imposer la pauvreté et la misère est susceptible de susciter auprès des citoyens des velléités de frustrations et tensions sinon des convulsions sociales; état de fait fort légitime et compréhenssible.

En somme, c’est un devoir citoyen de proclamer la vérité d’autant que seule la vérité est révolutionnaire, car c’est d’elle que surgit la conscience citoyenne quand ce n’est la résurgence de velléité de revendication tant étouffée par ceux dont l’intérêt ne réside que dans la prédation, l’appropriation, l’accaparement, la captation, la confiscation des richesses nationales, sans aucun souci du bien-être du grand nombre.

On ne saurait indéfiniment se résoudre au silence sur lequel prospère la fripouille félonne! C’est pourquoi cette réflexion n’est qu’une traduction de l’expression de la voix des sans voix, car il serait indécent et malencontreux d’ajouter volontairement à nos injustices la peur et le silence; ce qui ferait des citoyens congolais à la fois des malheureux victimes et complices des infortunes qu’on leur impose par les prédateurs de la république.

René MAVOUNGOU PAMBOU
Activiste politique et combattant de la liberté

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