Appréhender les déterminants structurels de l’évolution des niveaux de vie et le partage du surplus de productivité de l’économie entre les différents agents économiques. Tel est l’intérêt de l’étude sur les sources de la création de la richesse au Maroc et sa répartition réalisée par le Haut-commissariat au plan (HCP) et dont les grandes lignes ont été présentées mercredi 20 au siège du HCP.
Des premières conclusions de l’étude, il ressort qu’entre les années 2001 et 2015, la contribution de la productivité du travail a été de 92,5% et celle de l’effet démographique de 19,8%. Alors que la contribution de l’effet emploi (taux d’emploi) a été négative de 12,2%.
Commentant ce volet de l’étude, le Haut-commissaire au plan, Ahmed Lahlimi Alami, a indiqué que la productivité du travail s’est accrue durant cette période de 2,9% par an en moyenne et le ratio de la population en âge d’activité à la population totale a augmenté de 0,4 point en moyenne annuelle entre 2001 à 2015.
En revanche, « le taux d’emploi, qui appréhende la dynamique du marché de l’emploi par rapport aux opportunités offertes par l’évolution démographique, a connu une baisse de 0,2 point en moyenne annuelle, passant de 45,1% en 2001 à 42,7% en 2015 », a-t-il poursuivi.
Notons que durant cette période, le produit intérieur brut (PIB) par habitant s’est accru de 3,2% par an, principalement grâce à l’augmentation de la productivité du travail, suivi de l’effet démographique (part de la population en âge de travailler sur la population totale) au moment où le taux d’emploi s’est inscrit dans une baisse continue durant cette période.
Mais a connu un ralentissement de sa croissance entre les périodes 2001-2008 et 2008-2015, passant respectivement de 3,6% par an à 2,7%, attribué à la régression du taux d’emploi induisant une contribution négative de 35,3% à la croissance du PIB par habitant au lieu d’une contribution positive de 5,4% durant la première période.
Selon l’étude, l’effet négatif de la baisse du taux d’emploi sur le niveau de vie de la population a été largement compensé par l’amélioration de la productivité du travail, confortée par l’accroissement des productivités sectorielles de l’agriculture, forêt et pêche et de l’industrie qui ont enregistré des productivités de travail en hausse respectivement de 5,2% et 3% par an.
Précisons, en outre, que le secteur agricole a contribué pour 25% à l’amélioration du PIB par habitant et l’industrie pour 20,4%, sachant que le reste des secteurs d’activité (BTP et services) ont contribué pour 15,8%.
A noter que la contribution négative de l’effet emploi a montré que les structures économiques n’ont pas permis de valoriser le potentiel offert par l’effet démographique et que les créations d’emploi au niveau de l’économie, qui étaient en moyenne annuelle de 186 mille postes entre 2001-2008, ont baissé à seulement 70 mille postes entre 2008-2015.
Ahmed Lahlimi a toutefois indiqué que l’effet démographique, qui s’est accru de 0,4 point par an durant la période 2001-2015, a pu contribuer de 17,8% et 19,1% à l’amélioration du niveau de vie de la population durant les deux sous-périodes respectivement.
« Cela revient à dire que l’intensité de cet effet démographique a augmenté avec le temps et est devenue de plus en plus favorable à la croissance du PIB par habitant », a-t-il expliqué.
Notons également que la transition démographique accélérée que connaît le Maroc, s’est traduite par une accélération de la population en âge de travailler (+de 15 ans) passant de 19,7 millions en 2001 à près de 24,2 millions en 2015, enregistrant une croissance annuelle moyenne de 1,7%, supérieure au rythme de croissance démographique qui est de 1,1%.
Le Haut-commissaire a toutefois relevé que la baisse du taux d’emploi n’était pas uniforme dans tous les secteurs d’activité économique. « Le taux d’emploi dans le secteur de l’agriculture, forêt et pêche a baissé de 20,1% en 2001 à 16,7% en 2015 et celui des industries de 5,8% à 4,8%. Alors que les services et l’activité du BTP ont enregistré des améliorations des taux d’emploi de 16,2% et 3% en 2001 à 17,3% et 4% en 2015 respectivement », a-t-il fait remarquer.
Dans ces conditions, les baisses des taux d’emploi dans le secteur de l’agriculture, forêt et pêche et dans l’industrie ont contribué négativement à la croissance du niveau de vie de la population durant la période 2001-2015, avec -20% et -5,2% respectivement.
Concluant cette première partie de l’étude, consacrée aux déterminants structurels de l’évolution du PIB/hab, Ahmed Lahlimi a expliqué que la croissance modérée des niveaux de vie de la population de 3,2% au Maroc au cours de la période étudiée trouve son explication dans la baisse des taux d’emploi, « renvoyant à une sous-utilisation du potentiel de main-d’œuvre offert par la transition démographique et aux effets positifs relativement faibles de la productivité globale des facteurs et de la mobilité intersectorielle ».
Il a, en outre, estimé qu’en dépit de l’amélioration significative de l’intensité capitalistique, « les structures économiques n’ont pas encore connu de mutations profondes et par conséquent le niveau de leurs productivités demeure faible, limitant ainsi les avantages qu’aurait procurés la mobilité de l’emploi d’un secteur à un autre ».
Evoquant le volet relatif au partage de la valeur ajoutée et du surplus de productivité entre les facteurs de production, le Haut-commissaire a d’emblée souligné la distinction entre le secteur agricole et non agricole. Avant de noter que la valeur ajoutée du secteur agricole reste très volatile et fort tributaire des conditions climatiques comparativement à celle du secteur non agricole et que, de plus, s’accapare une part importante de la population active occupée avoisinant actuellement près de 40%.
A propos du surplus de productivité dans le secteur agricole, qui a été principalement le fait du facteur capital, elle a été de 5,9% en moyenne annuelle en 2000-2008 et de 5,6% en 2009-2014 et a représenté ainsi près de 98% de la croissance de la VA agricole en moyenne annuelle en 2000-2008 et de 84% en 2009-2014.
En outre, d’après l’étude, la contribution du facteur capital à la croissance de la VA agricole a gagné en intensité au fil des années, passant d’une moyenne annuelle de 4,7% en 2000-2008 à 18,3% en 2009-2014.
A ce propos, le Haut-commissaire a précisé que « la contribution du travail salarié dans la croissance a été faible, de 1,7% en moyenne annuelle sur la période 2000-2014, alors que celle du travail non salarié a été plutôt négative de -4,2% en moyenne annuelle en 2000-2014 ». De son côté, le surplus de productivité dans le secteur non agricole ne joue qu’un rôle marginal dans la croissance de la valeur ajoutée non agricole, selon l’étude.
D’après Ahmed Lahlimi, « son taux de croissance n’a été que 0,5% en moyenne annuelle en 2000-2014 au lieu de 5,8% dans le secteur agricole. Plus encore, il est en baisse de 0,8% en 2000-2008 à -0,04% en 2009-2014 ».
Quant au surplus de productivité dans l’économie nationale, il est de l’ordre de 1,2% en moyenne annuelle durant la période 2000-2014. « C’est le travail salarié qui a connu une amélioration de son surplus de 1,1% par an, suivi de celui du travail non salarié avec 0,6%», a relevé le Haut-commissaire soulignant que « le surplus de productivité du facteur capital s’est inscrit sur une trajectoire négative avec -0,1% par an en 2000-2008 et -0,8% en 2009-2014 (-0,4% durant 2000-2014) ».

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